Arts visuels

La Folle du logis : Périple en la demeure

Les installations de CLAUDINE COTTON, MARIO DUCHESNE, PARYSE MARTIN, JEAN-PIERRE MORIN et LOUISE VIGER occupent actuellement la Maison Hamel-Bruneau. Les cimaises habituelles ont été enlevées pour retrouver l’état presque original de ce cottage québécois du XIXe siècle. Cinq pièces à parcourir et autant de différentes compréhensions de l’espace.

C’est au philosophe Nicolas Malebranche que le commissaire de l’exposition, René Taillefer, a emprunté le titre La Folle du logis. L’homme du XVIIe siècle qualifiait ainsi l’imagination. Cette faculté, comme l’écrit René Taillefer, «bouscule nos habitudes, provoque un grand remue-ménage dans notre routine». Familiers des mondes imaginaires, les artistes choisis pour l’événement avaient non seulement le mandat d’occuper les pièces de la maison, mais aussi d’y intégrer les oeuvres de leurs pairs.

Nous entrons d’abord par la cuisine où sont installées deux sculptures de Jean-Pierre Morin. Ces sculptures, aux formes riches et évocatrices, occupent l’espace avec une indifférence délibérée à cet univers domestique, conférant à cette pièce la neutralité du lieu d’exposition.

Dans la salle à dîner, Paryse Martin a confectionné une impressionnante table mi-meuble mi-animal, mélangeant couleurs et textures, couverte de seins sculptés dans le bois supportant des fruits et des légumes de plâtre. Les couteaux-oiseaux de Chantal Gilbert sont déposés sur cette table dense et chargée. Quant à Louise Viger, elle occupe le salon avec subtilité. Ses vrais et faux citrons, son minuscule bateau et son immense sculpture de bois transforment l’heure du thé en moment de rêverie. On appréciera également l’hommage à Ulysse Comtois, dans le hall de la maison. Quelques tableaux et deux sculptures ainsi que des livres, des objets, des photographies ayant appartenu à l’artiste permettent de faire un rapide survol de son oeuvre. Dans le cabinet de travail, les impératifs bureaucratiques de la vie d’artiste sont mis en scène par Mario Duchesneau. Un imposant assemblage de chemises de carton forme une structure dont l’arrière multicolore en montre le dispositif. L’autoportrait en dizaines de cartes d’affaires d’Emmanuel Galland et le long texte de Sonia Pelletier sur les sources, délais et stratégies de financement de projets de commissariat participent avec justesse à la critique du système de l’art que propose Duchesneau.

Mais si vous cherchez la folle du logis, c’est probablement dans la chambre à coucher que vous la trouverez. L’installation de Claudine Cotton s’avère une des interventions les plus réussies, sans être pour autant la plus… agréable. L’artiste de Chicoutimi raconte l’histoire (les délires?) d’une femme imaginaire. Une histoire qui dépasse amplement le commentaire anecdotique. Aseptisée, froide et blanche, la pièce nous glace d’abord le sang. Un deuxième coup d’oeil laisse voir des détails qui font basculer le statut de ces objets apparemment banals et fonctionnels: un assemblage de lentilles cornéennes forme un chapelet, des couches de papier forment un lit surréaliste. Au centre de la chambre trône une chaise roulante couverte d’un drap blanc brodé d’un texte. La fenêtre est voilée par un rideau blanc transparent sur lequel est imprimé un portrait de Claudine Cotton, photographiée par Ivan Binet. Avec cet univers immaculé et névrosé, l’artiste révèle d’une façon presque provocante un aspect de la vie bourgeoise du petit cottage type. De la cuisine neutre à la chambre à coucher complètement transformée, des mondes fort divers se côtoient et, somme toute, le pari de rassembler autant d’artistes dans cet espace plutôt restreint s’avère concluant.

Jusqu’au 19 décembre
À la Maison Hamel-Bruneau
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Bloc-notes
La Théière dans tous ses états
Inscrit dans l’air du temps, presque tendance, le thé, avec ses airs d’Orient et ses vertus, gagne des adeptes chaque semaine. L’École-atelier de céramique de Québec (395, boul. Charest Est) offre actuellement aux amateurs de thé et de beaux objets une exposition intitulée La Théière dans tous ses états, qui élève l’objet utilitaire au rang d’objet d’art. Dans l’espace commercial situé au coin de Charest et de la Couronne, on a aménagé un jardin à la japonaise où sont disposées quelque 130 théières et tasses. Certaines des théières exposées _ créées par des artistes professionnels, des professeurs et des étudiants _ sont des réceptacles au fini luxueux pour les thés précieux, et d’autres, des objets si inusités que l’on souhaiterait les exposer et ne les honorer du précieux liquide qu’en de très spéciales occasions. Jusqu’au 17 octobre. (Nadia Seraiocco)

Convergences éléments
Quelques mots sur l’exposition des photographies de Sylvie Readman chez Vu. Cette artiste est reconnue pour son travail et sa réflexion sur l’image photographique. Les paysages en noir et blanc qu’elle présente chez Vu sont volontairement un peu flous et peu contrastés. Certaines photographies rendent avec justesse l’esthétique des paysages de la campagne québécoise. Tout en subtilité. Jusqu’au 10 octobre. (Nathalie Côté)