Arts visuels

Pèlerinage dans Saint-Roch : Le feu sacré

Hors des lieux d’exposition habituels de l’art contemporain point de salut? Les artistes dont les oeuvres se retrouvent dans les églises de Saint-Roch nous prouvent encore une fois le  contraire.

Avec la complicité des paroisses Jacques-Cartier et Saint-Roch, les artistes Laura Vickerson de Calgary, Johan Creten de Belgique et Carl Bouchard de Chicoutimi ont pu intégrer des oeuvres dans les deux églises toujours en fonction. Il faut le souligner, ce volet hors galerie de la Manifestation internationale d’art de Québec pose la question de l’ornementation (le thème de l’événement) d’une manière particulièrement pertinente. Les églises ne sont-elles pas des lieux où l’architecture est particulièrement signifiante, des espaces débordant d’images et de signes fortement connotés? Ce sont, il va sans dire, des espaces où l’ornementation est peut-être plus que partout ailleurs omniprésente.

Intervenir dans une église pose donc un double défi aux artistes: intégrer une production dans un espace à la fois majestueux et rempli d’objets et d’images, le tout en poursuivant une oeuvre personnelle. Carl Bouchard, comme tous les artistes participants, a choisi d’intervenir en considérant ce lieu sacré avec beaucoup de respect. En même temps, il semble avoir fait peu de compromis sur la manière dont il travaille habituellement. En plus des multiples et discrètes interventions dispersées dans l’église, les trois photographies qu’il a intégrées à l’espace sont, quant à elles, absolument éloquentes. Autant par leur composition que par leur propos, elles occupent le lieu, tout en se situant juste à la frontière de l’acceptable… Dans la photographie Trinité, l’artiste s’est mis en représentation, tenant son propre squelette et en train de se photographier par le truchement du déclencheur à distance. Trois moments, trois "soi" (un vivant, un mort et un… plus objectif), trois états qui revisitent la notion de trinité en réfléchissant autant sur le travail de création que sur notre condition de mortelles. Avec l’installation in situ Les Pleureuses (oublier par don), Carl Bouchard parvient avec une approche radicalement personnelle à transcender son individualité pour atteindre une dimension presque… "universelle". Bref, ça fonctionne!

À l’église Saint-Roch, Laura Vickerson a installé d’immenses tissus recouverts de pétales de roses qu’elle a introduits avec beaucoup d’égard pour l’architecture. Un travail de moine, pourrait-on dire. Offering est en effet le produit d’un travail laborieux, chaque pétale étant fixé avec une aiguille sur de grandes surfaces d’organdi de plusieurs mètres descendant du jubé jusqu’au sol. Le résultat est à la fois fragile et monumental. L’effet est ici davantage décoratif, mais non sans signification. On peut associer les aiguilles à la douleur et au danger; les roses, au plaisir et à la beauté… et situer le tout dans le contexte religieux. Cette intervention de Laura Vickerson est beaucoup plus abstraite et plus esthétique et, dans ce sens, peut-être moins risquée que celle de Carl Bouchard où peuvent s’élaborer diverses interprétations autour des images. Quant aux trois imposantes sculptures de céramique Johan Creten installées dans la même église, quoiqu’elles possèdent leurs propres qualités intrinsèques, elles sont présentées sans vraiment interagir avec le lieu.

En plus de nous faire découvrir – ou redécouvrir – des églises du quartier Saint-Roch, ces oeuvres in situ montrent aussi à quel point le lieu de présentation de l’art influence le sens de l’oeuvre et vice versa.

Jusqu’au 15 octobre
Aux églises Jacques-Cartier et Saint-Roch
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Bloc-notes
Chronique du portrait
L’exposition Des yeux, des visages… Chronique du portrait réunit pendant tout l’automne 18 artistes à la Maison Hamel-Bruneau. Un genre qui bénéficierait d’un nouvel intérêt chez les artistes selon le commissaire de l’exposition Guy Mercier. On ne saurait dire le contraire. S’y côtoient notamment les photographies de Claude-Maurice Gagnon, celles de Paul Lacroix et un portrait de Mgr Maurice Couture peint à l’huile par Denis Jacques… Inégale, donc, cette sélection. Même si plusieurs, sinon la plupart, des pièces présentées ici ont été vues dans différentes expositions au cours des dernières années, elles méritent tout de même le détour. Ne serait-ce que pour revoir l’autoportrait de Carl Bouchard (dont nous parlons plus haut), un tapis tissé avec ses propres vêtements. Il faut toutefois le souligner, cet amoncellement d’oeuvres nous semble aller dans toutes les directions. À vouloir tout dire, on peut parfois se perdre… Jusqu’au 17 décembre, à la Maison Hamel-Bruneau.

Les Journées de la culture
En plus des activités du Musée du Québec, les Journées de la culture seront aussi soulignées par les 10 organismes logeant dans le complexe Méduse. On pourra notamment assister à un forum intitulé Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la coopérative Méduse et que vous n’avez jamais osé demander… Des artistes en profiteront pour servir une soupe populaire. Le samedi 29 juin, de 13h à 19h.