François Courbe : Jouer au docteur
Le docteur COURBE vient d’ouvrir son cabinet dans l’espace du Lieu. Recréant l’univers médical, de la salle d’attente au lit d’hôpital, ce drôle de médecin offre des consultations gratuites à tous les patients intéressés. Avec ou sans rendez-vous.
L’artiste français François Courbe, en visite pour la première fois au Québec, est l’artisan d’une fiction où se confondent l’art et la médecine. «Artiologue», tel qu’il s’est nommé, François Courbe a troqué les supports traditionnels de création pour le matériel et le discours médical. Il a donc inventé son propre vocabulaire «artiologique» et s’est entouré avec excès des attributs de la profession: stéthoscope, paperasse de toutes sortes, blouse blanche, ambulance, seringues, gants de latex, etc. Ce faux médecin s’infiltre parfois dans le monde hospitalier où il observe, espionne et déjoue ses confrères. Comme il le souligne: «La blouse permet plein de trucs. Je vais dans tous les services des hôpitaux où on me prend souvent pour un vrai médecin. Ça me donne des idées pour mon cabinet.» Ce cabinet est rempli d’objets divers: une salle d’attente avec ses habituelles lectures et sa petite musique en sourdine, un bureau sur lequel repose une quantité incroyable d’objets bigarrés, des gadgets de toutes sortes trafiqués, fabriqués et récupérés par un docteur manifestement bricoleur à ses heures. Derrière son bureau, le docteur Courbe, affublé de sa blouse blanche, discute avec ses patients autant d’art que de coupures de budget dans les soins de santé et de problèmes plus… personnels. Le tout en vous administrant une transfusion vinicole, si cela s’avère nécessaire. Les limites de ses activités semblent d’ailleurs plutôt floues. Mais le secret médical est garanti et le diagnostic, personnalisé, comme se plaît à le rappeler l’artiste médecin.
Fiction pour les uns ou imposture pour les autres, ce jeu a été jusqu’à aujourd’hui, outre quelques petites poursuites judiciaires, le prétexte à l’exécution de différentes interventions, manoeuvres, performances et installations assez sympathiques. L’alliance entre art et médecine fait naître de multiples métaphores teintées d’humour, mais aussi des critiques sur le système de santé à deux vitesses et sa privatisation éventuelle. Un problème criant autant en France qu’au Québec, comme l’éminent doyen de la Faculté d’artiologie l’a constaté depuis son arrivée en Amérique. Renouant avec la tradition du médecin de campagne, on pourra aussi voir le docteur saltimbanque déambuler dans les rues de la ville sur sa bécane-ambulance muni d’une sirène criarde. Des consultations à domicile qui font sortir l’artiste dans la rue: « Cela me permet d’entrer en contact avec des gens qui ne fréquentent pas les centres d’artistes», précise-t-il.
Ici, l’art n’est ni montré, ni présenté, mais se situe plutôt dans l’action même. De plus, l’illusion que crée le dispositif médical en place, l’habit, les outils, les titres imposants (membre de l’académie, doyen ou professeur) procède de l’activité artistique en cultivant cette étrange ambiguïté où les limites entre le réel et la fiction demeurent incertaines. En fait, l’activité à laquelle se livrent les patients spectateurs et le docteur Courbe dans son cabinet du Lieu s’avère autant une pacifique mais efficace parodie du monde médical qu’un défi lancé aux conventions artistiques.
Du 7 au 31 ocobre
Au Lieu
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Bloc-notes
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Arts et lettres: la calligraphie japonaise
Précision du geste, beauté du signe sont les basiques de la calligraphie. Ils sont plusieurs au Québec à avoir redécouvert cet art millénaire qui se pratique encore aujourd’hui avec les humbles instruments que sont le pinceau, l’encrier et le papier de riz. Tout près de vingt artistes québécois dirigés par madame Hiroko Okata, de l’École de calligraphie japonaise, participent à cette exposition. À la salle d’exposition du pavillon Alphonse-Desjardins de l’Université Laval, jusqu’au 22 octobre.
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