"C’est une opération exigeante de travailler sur un artiste que personne ne connaît, soutient le directeur du Musée du Québec, John R. Porter, c’est un travail de conviction. Mais, c’est aussi un beau risque…" poursuit-il. La première rétrospective de Henri Hébert, un artiste demeuré en effet dans l’ombre depuis sa mort en 1950, est le résultat d’une recherche et d’un travail de "détective" effectués par la commissaire et historienne de l’art Janet M. Brooke. Cette exposition contribue à l’écriture de l’histoire de l’art du Québec. Un apport qui s’incarne autant dans la découverte des oeuvres que dans la publication de l’intéressant catalogue accompagnant l’exposition.
Henri Hébert fait partie des artistes, encore nombreux, à propos desquels aucune recherche sérieuse n’avait encore été effectuée. "C’est une façon de faire exister un artiste, précise Porter. Après cette exposition, le paysage montréalais de l’entre-deux-guerres ne sera plus le même…" Mais qui était-il au juste, ce Henri Hébert? Cet "homme du monde", ami et collaborateur de l’architecte Ernest Cormier, a côtoyé l’élite intellectuelle de la première moitié du XXe siècle. Sa fortune critique a été éclipsée par celle de son paternel, Louis-Philippe Hébert (1850-1917), un de ceux qui a produit les sculptures ornant le Parlement du Québec (une expo sur ce dernier est d’ailleurs actuellement en préparation au Musée du Québec); éclipsée aussi par celle de son rival et contemporain, Alfred Laliberté (1878-1953), qui le considérait surtout comme "le fils de son père…"
Lorsque les commandes de monuments se sont faites rares (le genre étant en déclin), Henri Hébert a innové en produisant plusieurs sculptures en relief intégrées à l’architecture. Des reliefs qu’on peut voir encore sur les façades de banques et d’écoles montréalaises ou sur celles du bâtiment du jardin botanique. Le titre le souligne, Henri Hébert est un sculpteur moderne. Notamment parce qu’il s’intéressait plus à la forme qu’au sujet. Pour Janet M. Brooke, "l’oeuvre de Hébert se distingue très souvent de celui de ses contemporains par des sujets qui tendent à l’allégorie ou à la décoration pure et s’écartent, à de rares exceptions près, du récit et de l’anecdote". Henri Hébert revendiquait un art international. Son approche se dissocie de celle du "sculpteur du terroir" qu’était Alfred Laliberté, dont les oeuvres sont magistralement animées par les légendes, la vie des autochtones ou celle des habitants.
Dans une présentation sobre, on découvre dans les deux grandes salles du musée les sculptures en relief de Henri Hébert, deux imposants monuments funéraires de bronze, des bustes, plusieurs statuettes, des photographies montrant les intégrations à l’architecture de l’artiste ainsi qu’une documentation biographique. Tout cela contribue à nous faire apprécier son oeuvre, mais aussi à éveiller notre attention et à stimuler notre sensibilité pour cet art du passé qui orne encore les parcs et les bâtiments des villes.
Jusqu’au 7 janvier
Au Musée du Québec
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Bloc-notes
L’art mexicain contemporain
La Chambre blanche n’a jamais aussi bien porté son nom. Tania de la Cruz, l’artiste mexicaine en résidence à Québec depuis le début de septembre, a rempli l’espace de dizaines d’oreillers. Cette artiste se réapproprie une pratique rituelle mexicaine consistant à sculpter de petits crânes en sucre pour souligner l’anniversaire des morts en novembre de chaque année. "Chez les artistes mexicains pratiquant l’installation, souligne Tania de la Cruz, c’est maintenant une caractéristique d’utiliser la tradition, de chercher une identité propre."
L’artiste a divisé la galerie en deux pièces distinctes. Dans la première, dans une noirceur presque totale, on peut voir la projection d’une oreiller sur un matelas déposé au sol. Dans la seconde, des dizaines d’oreillers imbibés de sucre caramélisé, baignés dans une lumière intense, sont disposés en rang. Chacun est recouvert d’un mot de sucre fondu: solidaridad, amor, derecho, humanitad, education, etc. Des mots qui expriment ce que l’artiste considère comme étant "perdu" dans son pays. Avec un accent à la fois grave et plein d’espérance. À voir, à la Chambre blanche jusqu’au 22 octobre.
Dernier week-end de la manif…
La première édition de la Manifestation internationale d’art de Québec se termine le 15 octobre. Profitez de ces derniers jours pour faire un saut chez Vu, où sont présentées les photographies de l’artiste anglaise Sharon Kivland. À voir aussi, les plâtres de Spring Hurlbut à l’Oil de poisson, l’installation de Bernie Miller à la Caserne Dalousie, de même que l’exposition collective à l’Édifice Mozart, sans parler des interventions in situ dans deux églises de Saint-Roch…
Vernissages
Le jeudi 12 octobre à 16h débute, à la Galerie des arts visuels de l’Université Laval, l’exposition des récipiendaires des prix et bourses 2000. Ceux de la Fondation René-Richard ont été attribués à Éric Burman, Mélanie Couture et Virginie Chrétien. Vernissage également à la galerie Estampes Plus, le dimanche 15 octobre à compter de 14h pour l’inauguration de l’exposition des pièces de Jou Lee.