Helga Shlitter : La ménagerie de verre
Avec ses sculptures de bois peint et ses figures recouvertes de mosaïques de verre, HELGA SHLITTER dispose d’une place singulière dans le monde de l’art actuel. Depuis une dizaine d’années, elle se consacre à la sculpture avec une candeur renouvelée.
Avant que l’artiste s’envole à nouveau pour le Mexique, son pays natal, où elle étudiera pendant quelques mois l’art précolombien et reverra les fresques en mosaïque de Diego Rivera, la Galerie Trompe-l’oeil nous permet de découvrir sa production récente. Helga Schlitter n’en est pas à son premier voyage de perfectionnement. En 1998, une bourse du Conseil des arts et des lettres du Québec lui permettait de faire un stage à l’Escola Massana de Barcelone pour perfectionner la technique de la mosaïque. Voilà qu’elle part à nouveau.
Il faut voir les sculptures récentes d’Helga Schlitter et la nouvelle manière dont elle travaille la mosaïque. On se souvient comment l’architecte espagnol Antonio Gaudì (1852-1926) fragmentait la céramique en morceaux asymétriques pour créer ensuite des collages informels. Le travail de mosaïque d’Helga Schlitter s’apparente à celui de l’architecte dans l’assemblage de fragments dissymétriques. Cependant, plutôt que d’utiliser de la céramique, Helga Schlitter recouvre d’abord de couleur ses formes de bois pour ensuite les tapisser de pâte de verre ou parfois de petits objets de verre. Le rendu est éminemment lumineux et riche en coloris.
En plus des sculptures et des bas reliefs en mosaïque de verre, l’exposition actuelle comprend un ensemble d’oeuvres composées de formes végétales et animales. Ces sculptures de bois aux ornements colorés évoquent autant des totems que des stèles funéraires. Elles sont «semi-joyeuses», comme l’artiste les qualifie elle-même. Si elles évoquent la mort tout en étant joyeuses, ce n’est pas sans rappeler l’attitude des Mexicains face à la mort. «Pour les Mexicains, nous rappelle Helga Schlitter, on ne peut rien faire contre la mort, c’est comme ça. La mort est une fatalité.»
Ces sculptures réfèrent à un type d’imagerie qui ne nous convainc pas toujours, mais qui demeure d’une grande cohérence dans l’oeuvre de l’artiste. Par exemple, le serpent, tel un fétiche, revient constamment dans son travail. Mais il ne renvoie pas à la signification chrtienne négative de représentation du mal. Il se rapproche plutôt du serpent païen des Mayas, figure du commencement du monde. Cette iconographie est extrêmement connotée. Mais pourrait-on vraiment le reprocher à Helga Schlitter puisque la qualité de ses recherches plastiques, l’originalité de ses explorations en mosaïque autant que sa fraîcheur sans cesse renouvelée permettent à ses sculptures de transcender l’aspect anecdotique des figures pour atteindre un niveau archétypal.
Du 27 janvier au 16 février
À la Galerie Trompe-l’oeil
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Bloc-notes
«3 Ways in Town» de la Torontoise Libby Hague
On regrette de ne pas avoir parlé plus tôt des photographies de Libby Hague exposées chez Vu. Il ne reste que quelques jours pour y faire un saut. Cette série de photographies couleur de Libby Hague rappelle à quiconque ayant voyagé en train à quel point c’est un lieu propice aux rêveries solitaires. D’une gare à l’autre, nous suivons le trajet de trois passagers dans trois séries parallèles de 85 petites photographies circulaires. Ces récits photographiques expriment le passage du temps sans tomber dans une lourdeur existentielle. S’y chevauchent les vues d’un même paysage parcouru et les souvenirs propres à chacun.
Il faut aussi voir les sculptures de François Lamontagne chez Vu. Si on retrouve au mur de grandes photographies, ce sont surtout les sculptures qui nous interpellent. Brodées et filées à la main, les sculptures aux formes organiques et tentaculaires, de tissus, de mousse, de jute ou de cuir, se déploient au sol. Les deux expositions, Dis-moi ce que je pense, je te dirai qui tu es et 3 Ways in Town se poursuivent jusqu’au 13 février.
«Air» d’Andreas Oldörp
Plus que quelques jours pour faire l’expérience de l’installation de l’artiste allemand. Si cette installation sonore radicalement minimale produit un effet, outre les sons subtils émis par les fins tuyaux ixés au plafond, c’est bien en nous faisant voir l’espace avec un regard neuf en révélant la structure et l’architecture du lieu. Dans la petite salle, la jeune artiste Émilie Santerre-Ayotte a investi le sol d’une dalle de béton sur laquelle sont imprimés des motifs géométriques de tapis. Bien qu’ayant moins d’envergure que la première, dont le dispositif sophistiqué fascine par son immatérialité, cette intervention contraste avec efficacité par sa densité matérielle et son assise au sol. À L’Oeil de poisson, jusqu’au 13 février.