Marc Séguin : Source lumineuse
Arts visuels

Marc Séguin : Source lumineuse

La peinture peut-elle encore éveiller les passions? Depuis quelques années, celle de MARC SÉGUIN suscite un engouement hors du commun. Elle a su conquérir la curiosité du public, l’estime de la critique et l’intérêt des collectionneurs.

Marc Séguin

expose actuellement de grands tableaux, au Musée d’art contemporain de Montréal (MAC), un corpus de gravures à la Galerie Trois Points de la métropole, ainsi qu’une série de peintures récentes à la Galerie Madeleine Lacerte. Après son passage au MAC, ses grandes compositions se rendront au Centre culturel canadien à Paris. Fait rare et notable, dans un marché de l’art que l’on croyait presque inexistant, après cinq années de productions et de participations à diverses expositions, Marc Séguin parvient à vivre de sa peinture. Travailleur patient et solitaire, il produit sans répit. Comme il l’explique dans un documentaire sur son travail: "Il y a tellement d’images que je pourrais faire, que le monde réel me ralentit." Difficile d’ignorer l’aura extraordinaire dont sa production bénéficie actuellement. Il faut donc absolument profiter du passage de ses tableaux à Québec pour apprécier les récentes voies que prend son travail.

En septembre 1999 à la galerie de l’Oil de poisson, Marc Séguin nous avait présenté de grands tableaux noirs ponctués de figures intégrées à des compositions marquées de jets de couleurs et de formes en dualité avec un dessin académique. Les tableaux présentés actuellement chez Lacerte sont plus modestes que ce qu’il proposait alors. Le lieu a ses contraintes. Certaines pièces se rapprochent parfois de l’étude préparatoire ou de fragments provenant de plus grandes compositions. Il y a aussi, fort heureusement, des tableaux plus audacieux et quelques-uns réellement saisissants: des toiles naturelles non touchées alternant avec des zones de peintures, des figures fragiles et angoissées aux squelettes de goudron et deux portraits sur fond noir. Les grandes surfaces vierges de certains tableaux s’avèrent tout aussi déstabilisantes que les grands pans de peinture noire qu’on retrouve dans la série Les Rosaces présentée actuellement au MAC.

On pourrait penser que Marc Séguin, fort de ses découvertes et de son savoir-faire, reprend des formules éprouvées. Une visite chez Madeleine Lacerte et au Musée d’art contemporain nous convainc toutefois du contraire. Non seulement sa peinture étonne toujours par sa facture, mais le sens s’y affirme avec plus de clarté. Les oeuvres monumentales présentées au MAC ont permis à Marc Séguin d’explorer la lumière à travers le motif des rosaces (vitraux circulaires propres aux cathédrales médiévales). Ce travail sur la lumière peut s’envisager autant au sens propre, comme une étude des sources lumineuses, qu’au figuré, comme recherche spirituelle et quête de connaissances. Ces quêtes y sont d’ailleurs articulées avec une lisibilité étonnante.

En considérant les tableaux de la série Les Rosaces, mettant en scène des personnages angoissés qu’on pressent soit au bord de l’abîme ou sur le point d’émerger de la nuit et certaines pièces présentées chez Lacerte, on constate que Marc Séguin parvient à exprimer avec de plus en plus d’acuité les troubles existentiels contemporains. Et il y a, bien sûr, les qualités plastiques indéniables de sa peinture: son dessin toujours aussi précis et imprévisible, la richesse de la couleur à l’huile; la trivialité du goudron, l’audace de la composition, le tout doublé d’une intelligibilité qui démontre que l’engouement pour sa peinture n’est pas fortuit.

Les Peintures
Jusqu’au 10 décembre 2000
Galerie Madeleine Lacerte
Voir calendrier Arts visuels

Les Rosaces
Jusqu’au 4 février 2001
Musée d’art contemporain de Montréal

BLOC-NOTES
Les mots préférés
Quatre artistes occupent les galeries du Centre de production photographique Vu, Julie Fauteux, Lionel Fourneaux, André Willot et Emmanuelle Schmitt. À partir d’une histoire écrite en français puis traduite en allemand, Julie Fauteux a transcrit son anecdote dans un code inventé qu’elle a rigoureusement respecté. De ce récit, dont on ne saura rien, il reste un collage de carrés et de rectangles. Le résultat est totalement abstrait, mais possède des qualités plastiques et visuelles autonomes par rapport au texte initial. Accompagnant cette mosaïque sur les limites entre le visuel et l’écriture, un livre de ses mots préférés permet d’apprécier encore davantage la matérialité des signes et la relativité de leurs significations. Quant aux photographies d’André Willot, elles s’inspirent du langage signé. La série de mains photographiée sur un fond noir amalgame des signes qui pourraient s’avérer énigmatiques même pour les malentendants. Quant à Lionel Fourneau, il présente des collages de mots et d’articles de journaux qui brouillent leur lisibilité. Il faut voir aussi Passage d’Emmanuelle Schmitt. L’artiste française propose des images narratives où se superposent des photographies et des récits personnels. Chez Vu, jusqu’au 17 décembre.

Le 36 expose des oeuvres de Pierre Ringuette
La galerie de la rue Couillard accueillait en début d’automne les pièces de Diane Létourneau et Lucie Fortin. On peut y voir maintenant celles de Pierre Ringuette. On se souvient de la transformation qu’il avait opérée à la Chambre blanche l’automne dernier, en reconstruisant subtilement l’espace de la galerie. Il propose, du 1er au 17 décembre des oeuvres sur papier. Le vernissage a lieu le vendredi 1er décembre à 19h au 36 de la rue Couillard.