Doyon-Rivest. Vos spécialistes en création de besoins : La firme
Quoi de mieux pour se faire connaître qu’une bonne campagne publicitaire? La firme DOYON-RIVEST prend les grands moyens en détournant le langage de la pub. Autopromotion et cie.
Le duo récemment formé, composé de Mathieu Doyon et Simon Rivest, présente actuellement une exposition intitulée: Doyon-Rivest. Vos spécialistes en création de besoins à l’Oil de poisson. Dans la galerie, ils ont installé quatre grands panneaux publicitaires, semblables à ceux de la compagnie Médiacom qu’on retrouve un peu partout dans nos villes. Des photographies plutôt banales, immenses comme il se doit, envahissent totalement l’espace d’exposition: un groupe de scouts en chemisettes bleues, une vue d’un bord de mer avec piscine et palmiers, un couple de retraité heureux de vieillir en santé et un âne broutant une balle de paille. On nous en met plein la vue. Le tout avec les considérations in situ d’usage. On retrouve les quatre murs de l’espace d’exposition dans chacune des photographies. En bas de chaque panneau, en gros caractères: Doyon/Rivest. Voilà donc l’objet de la publicité, qu’un bon public cible aura tôt fait de comprendre.
Mathieu Doyon, à la fois musicien et artiste en arts visuels, et Simon Rivest, concepteur et directeur artistique d’une agence de publicité, se défendent bien d’avoir un discours quelconque sur la pub. Ils ont voulu évacuer tout discours, surtout critique ou anti-publicitaire, de leur proposition. Une attitude a priori presque agaçante – comme s’il pouvait y avoir "absence" de discours – que leur proposition plastique parvient heureusement à dépasser. Doyon et Rivest veulent tout bonnement se servir du langage et de l’esthétique publicitaires à des fins artistiques. En détourner les moyens en faisant \"la promotion de la promotion", cela sans doute dans l’objectif de s’insérer dans le milieu de l’art et d’acquérir une certaine "notoriété" avec, en prime, la désinvolture que leur statut de duo dilettante – probablement temporaire – leur procure. Ainsi, leur proposition soulève plusieurs bonnes questions. On peut se demander, par exemple, s’il suffit d’associer des moyens techniques, une certaine expertise en matière de construction d’images et des ressources financières pour faire de l’art…
Dès lors, il y a une critique qui s’opère. Et elle s’adresse davantage au monde de l’art qu’à celui de la publicité. Dans ce sens, leur proposition fonctionne très bien. Il y a en effet peu de différence entre les quatre panneaux publicitaires présentés dans la galerie et ceux qu’on retrouve partout. C’est une question proche de celles que suscitaient les oeuvres de Marcel Duchamp ou les Boîtes Brillo d’Andy Warhol. Qu’est-ce qui fait la différence entre deux objets ayant le même aspect physique, mais dont un est de l’art? demandait le philosophe américain Arthur Danto. Exit l’appréciation esthétique de l’oeuvre et le savoir-faire, répondrait l’intellectuelle française, Anne Cauquelin: c’est le réseau qui fait l’oeuvre. On en parle, on écrit dessus et cetera. Justement, dans la perspective d’une critique du réseau, en 1986, avec 350 degrés autour de l’objet, Gilbert Boyer et Louise Viger avaient notamment utilisé la publicité en mettant en branle une campagne qui interrogeait le système de promotion du milieu de l’art. Mais, la campagne de la firme Doyon-Rivest, où l’image est à la fois objet d’art présenté dans une galerie et objet de promotion, devrait nous amener ailleurs. Elle soulève, pour l’heure, des questions stimulantes!
Jusqu’au 18 février
À l’Oil de poisson
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Bloc-notes
Création de résistance
La Bande vidéo lance actuellement un appel à la création de vidéos de contestation, de pastiches et de bandes anti-publicité. L’organisme de production et de diffusion de vidéos invite au détournement de contenu, à la contamination et à l’appropriation. Date limite: le 15 avril prochain pour le dépôt des vidéos et des oeuvres sur papier. Pour plus d’information, contactez La Bande vidéo au 522-5561.
Le retour
Tout le monde en parle. Le Musée du Québec a récemment reçu de Pologne des caisses d’objets précieux ayant jadis séjourné à Québec. Quelques caisses ouvertes lors d’une conférence de presse nous ont donné un aperçu de ce que sera la prochaine exposition: coffres d’ébène richement ornés, sabres et casques militaires d’apparat, grandes tapisseries du XVIIe siècle. Pour l’instant, il faudrait raconter le voyage des trésors polonais. De la Pologne sous occupation allemande en passant par un séjour à Québec sous le gouvernement anti-communiste de Maurice Duplessis jusqu’à leur retour en Pologne, ces trésors ont fait couler beaucoup d’encre. On pourra voir ces précieux objets provenant du château royal de Wawel à Cracovie dès le 8 février prochain.
Pratiques alternatives
Encore quelques jours pour faire un saut à la galerie Trompe-l’oeil pour apprécier la sélection d’oeuvres réalisées avec des médiums non conventionnels provenant de la collection Prêt d’oeuvres d’art du Musée du Québec. On y retrouve notamment des pièces de Pierre Ayot, de Carole Baillargeon, de Claudie Gagnon, de Jacky Georges Lafargue et de Paul Litherland. À voir, jusqu’au 30 janvier.