Alain Pelletier : La mort dans les yeux
La première installation vidéographique de l’artiste multidisciplinaire ALAIN PELLETIER, au Musée d’art contemporain, évoque l’insoutenable gravité de l’être. Sombre mais humain.
La salle est totalement plongée dans le noir. Puis, les yeux s’habituent lentement à cette obscurité. Surgissent alors des ténèbres des images de corps fantomatiques et des organes de porcs – presque humains – flottant dans les airs à l’intérieur de caissons de verre!
La première installation vidéographique de l’artiste multidisciplinaire et particulièrement actif dans le domaine du théâtre Alain Pelletier, au Musée d’art contemporain n’est pas nécessairement très rassurante… Il faut dire que le sujet mérite une telle ambiance. Il y a dans cette pièce, intitulée Persée.id.Méduse, une réflexion "sur les limites du visible et du supportable".
Pelletier interroge ce "qui nous pétrifie ici maintenant, dans l’état d’hygiène généralisé de notre monde". Et d’expliquer comment de nos jours "il n’y a que peu de contact ou de confrontation avec la mort, les cadavres, la maladie, la dégénérescence et les dérèglements du corps". À travers les figures de Méduse qui pétrifiait toute personne croisant son regard et de Persée qui alla lui trancher la tête dans sa caverne, s’énonce un dispositif qui parle de l’insoutenable gravité de l’être humain toujours ramené à son état de matière organique mortelle mais qui préférerait oublier à tout prix une telle fatalité.
Voilà un sujet pas très nouveau dans le domaine de l’art contemporain. Depuis 20 ans, celui-ci nous a donné son lot de cadavres. D’Andres Serrano jusqu’au très à la mode Damien Hirst, la mort se porte bien. À quand une oeuvre sur le bonheur (sans pour autant tomber dans l’esthétique réconfortante des publicités ou de Hollywood!)?, serait-on tenté de se demander.
Pourtant le dispositif scénique de l’ensemble est ici particulièrement efficace avec son ambiance de clair-obscur. Comme durant le baroque, ce type de lumière donne paradoxalement à voir de l’innommable, d’autant plus horrifiant qu’il frôle parfois le non-identifiable. Sombre mais humain.
Jusqu’au 6 mai
Au Musée d’art contemporain
C’est la faute à Michel Louvain
"C’est à cause de Michel Louvain si je m’appelle Sylvie. Ma mère adorait une de ses chansons dans laquelle il parlait d’une fille qui portait ce prénom." Cette anecdote que me confie Sylvie Cotton pourrait paraître banale. Combien de filles doivent quant à elles leur identité à la mignonne et blonde chanteuse Sylvie Vartan qui a hanté l’imaginaire des jeunes des années 60? Chacun d’entre nous pourrait d’ailleurs raconter de tels petits faits curieux et en apparence négligeables ayant marqué son histoire personnelle et son nom.
Mais justement, ce qui intéresse Sylvie Cotton, c’est la marque qu’imprime sur l’identité – l’air de rien – dès notre enfance, notre prénom.
Voilà pourquoi elle a décidé d’installer, à la Galerie Skol, une salle où elle consigne les confidences "sylvesques". "Si la psychanalyse a raison, je vais certainement recueillir une série de récits significatifs." Qui traceront le portrait du prénom qui "entre 1961 et 1964 fut le plus utilisé pour les filles en Occident" et qui a d’ailleurs dominé la scène de 1955 à 1964 au Québec, supplantant les Diane, puis à son tour remplacé par les Louise… De ses racines dans le mot "forêt" à ses liens avec l’héroïne des livres pour adolescentes, ce prénom mérite bien ce curieux et intelligent travail sur l’identité. Cela vous amènera vous aussi à vous demander si vous n’avez pas bâti votre personnalité en liaison avec l’inconscient collectif attaché à votre prénom. Idée simple mais très riche.
Toujours chez Skol, la grande salle abrite un record du monde… Rien de moins! Celui de la plus longue chaîne de trombones (plus de un million!) enfilés bout à bout par une soixantaine de personnes durant 24 heures. Ce travail a été supervisé par l’artiste Diane Borsato, qui est aussi connue pour ses performances.
Au-delà de la fatuité de ce défi, s’y énonce aussi un désir de créer un projet collectif… où pointe (encore une fois en art actuel) une certaine ironie? Afin de montrer l’incapacité actuelle de motiver les gens pour de vraies causes? Heureusement, c’est très fort visuellement. Ces petits morceaux de métal étalés sur le sol forment comme une armure, une cotte de mailles resplendissante, qui miroite comme de la soie. Plaisirs des petits riens.
Jusqu’au 28 avril
À la Galerie Skol
À signaler
La Galerie Clark nous promet une soirée vidéo hors de l’ordinaire avec des "images épileptiques" exhibant une "contamination kaotike du tube katodike" (sic). Tout un programme! Hôpital brut (de P. Bolino), Le Mauvais Oil (Bolino/Collin/Roelandt) ainsi que d’autres bandes vidéo auxquelles le bédéiste Henriette Valium a participé seront donc à l’honneur. L’événement totalement branché – attention: électrocution possible! – aura lieu le vendredi 13 (brrr!) avril à partir de 20 heures. Renseignements: (514) 288-4972.