Artefact 2001 : Imaginaire collectif
Arts visuels

Artefact 2001 : Imaginaire collectif

Serge Fisette et Gilles Daigneault ont conçu Artefact 2001, une intervention qui exhibe l’art de 10 artistes contemporains à un large public, celui des cyclistes et autres passants qui arpentent les berges du canal Lachine durant l’été.

Le canal Lachine est l’hôte d’un grand défi artistique. Intervenir dans le tissu urbain, et ici plus spécifiquement post-industriel, est souvent un casse-tête infernal. Il faut tenir compte des contraintes physiques du lieu, des règlements municipaux, du service des incendies afin que les oeuvres soient totalement sécuritaires, de la fonction usuelle de l’endroit… Mission néanmoins accomplie pour l’événement de sculptures urbaines Artefact 2001, et ce, malgré quelques pièces plus faibles.

Concocté par Serge Fisette, directeur du Centre de diffusion 3D (qui publie la revue Espace), et par le commissaire et critique d’art Gilles Daigneault, Artefact 2001 est une intervention qui exhibe l’art de 10 artistes contemporains à un large public, celui des cyclistes et autres passants qui arpentent les berges du canal pour profiter de l’été… L’art s’y trouve confronté à sa capacité de produire des oeuvres allant intervenir dans l’imaginaire collectif.

Pas toujours facile de sortir de l’espace blanc et épuré de la galerie ou du musée. Pas évident pour l’art d’habiter certains lieux qui sont forts autant symboliquement que spatialement. Récemment, le ratage majeur de l’expo L’Hôpital – qui frôlait la phase terminale – tenait à cela: à la force d’un lieu, un ancien établissement hospitalier, très chargé en émotions et dans lequel les pièces avaient du mal à s’imposer. Le canal Lachine représente aussi à cet égard un défi majeur, qui tient à l’immensité du lieu ainsi qu’à l’étrangeté de la topographie formée de bâtiments industriels et de terrains vagues.

Pourtant, l’intervention de Marie-Chrystine Landry est très pittoresque, attirante pour le regard. Elle a recréé une sorte de station balnéaire avec des chaises longues flottant sur le canal… Belle utopie que de croire que cette étendue d’eau pourrait devenir un lieu de plaisirs aquatiques. Forte aussi, la sculpture de John McEwen formée d’un ours et d’un canot. Comme s’il voulait redonner ce lieu à la nature ou à un passé amérindien. Le container de Pierre Bourgault flottant sur le canal est imposant visuellement. Il est comme un symbole "d’une action horizontale de la culture"… Un commentaire sur le poids de l’art qui résiste à son immersion, à sa disparition de l’espace public.

La pièce d’Herménégilde Chiasson est cependant un peu clichée. Une banderole sortant des eaux donne à voir une main portant un bracelet sur lequel est inscrit le mot "démocratie"… Et le visiteur ira aussi voir les interventions parfois trop réduites en dimensions mais jamais en qualité de Jean-Pierre Aubé, Cozic, Michel de Broin, Michelle Héon, Francine Larivée et Michel Saulnier.

Avec un budget très modeste, Artefact a réussi la prouesse de donner corps à une intervention urbaine de qualité. Il faut que cette triennale nous revienne en 2004 avec des moyens plus dignes. Montréal a besoin d’un tel événement.

Jusqu’au 30 septembre
Canal Lachine

Liaisons dangereuses
Traversée de l’Atlantique qui frôle le naufrage pour l’expo Une liaison transatlantique dans les Galeries Circa, Occurrence et Skol. Pourtant, cette idée d’un échange entre deux pays ou deux villes – ici, entre Bâle et Montréal – a déjà fait ses preuves. L’an dernier, l’événement L’Algèbre d’Ariane, créé par Stéphane Gilot, fut une fructueuse rencontre entre des artistes belges et québécois. Cette fois-ci, il n’y a pas d’interaction réelle entre les créateurs mais une simple juxtaposition de pièces plus ou moins réussies. S’il y a liaison, elle est vraiment à distance…

Malgré tout, le travail de Philipp Gasser, présenté chez Skol, se démarque nettement, en particulier dans son vidéo intitulé Le Peuplement de Montréal. Cela débute comme un documentaire avec une série de faits et de chiffres sur l’histoire de notre ville. Et puis cela dérive rapidement vers une sorte de pièce néo-dada où des formes d’immeubles (qui font penser à des dessins de Philip Guston) se déplacent devant l’écran, allant jusqu’à cacher totalement le mont Royal en arrière-plan. Très drôle. Presque absurde, mais cela rend très bien compte de la bêtise de l’architecture moderne. Notons aussi la participation d’André Clément (chez Circa), même si cela est un peu répétitif par rapport à ses oeuvres passées, et de Josée Dubeau (chez Occurrence) avec cet oiseau mort harnaché d’un parachute non ouvert.

Jusqu’au 14 juillet
Galeries Circa, Occurrence et Skol

Sortir de l’ombre?
La publicité de cette expo souligne beaucoup qu’elle a été la maîtresse de Picasso, sa muse… pour aussitôt signaler combien elle a été une artiste tout à fait accomplie! Ce qui est certainement très juste, puisque qu’avant de rencontrer à 29 ans le maître catalan, Dora Maar avait déjà à son actif une carrière de photographe professionnel mais aussi d’artiste proche du surréalisme.

Malheureusement, l’expo présentée au Centre Alfred Dallaire ne permettra pas vraiment de pouvoir juger de ce talent puisque seulement une quarantaine d’esquisses et quatre tableaux de Dora Maar y sont exposés. Difficile de jauger une carrière avec si peu, et cela, même si les organisateurs de cette présentation ne sont pas les seuls à vouloir réévaluer la place de cette artiste. Entre autres, un livre qui vient de paraître sous la plume de l’historienne Mary Ann Caws va dans la même direction.

Mais il faut dire que la mort de Maar en 1997 a donné lieu à une vente aux enchères dans laquelle on pouvait se procurer des pièces de Picasso, dont… des bouchons de liège avec lesquels le Grand Artiste avait joué… Dans un marché de l’art où les Picasso sont extrêmement chers, assiste-t-on à une commercialisation de sous-produits et reliques du Grand Maître? L’oeuvre de Maar risque de ne pas y trouver une juste reconsidération.

Jusqu’au 29 juillet
Centre de référence et de documentation Alfred Dallaire

À signaler
Du 2 au 8 juillet, a lieu la 2e édition du Festival des Arts du Village, dans le quartier gai. La rue Sainte-Catherine sera fermée à la circulation automobile, entre Saint-Hubert et Cartier, à compter du jeudi 5 juillet, et les artistes y exposeront de 10 h à 23 h. Parmi tous les événements auxquels participeront 140 créateurs, signalons L’Azile aux Arts, au Parc de l’Espoir, coin Sainte-Catherine et Panet, tous les jours de 14 h à 20 h. Vous pourrez y voir une installation de Marie-Claude Pratte, Yvon Goulet, Hermès et Martial; une série de performances de la troupe Re-pair, du groupe d’intervention Séro Zéro; la présentation de poèmes d’Étienne Vigneault… L’exposition du photographe Robert Laliberté, qui a été pendant 10 ans le photographe officiel du magazine Fugues, se tiendra du 5 au 12 juillet dans les nouveaux locaux de la librairie L’Androgyne, 1436, rue Amherst. Dans la Galerie des crudités, le visiteur pourra dévorer l’art cru… Y seront exhibées tout au long du festival, à la Galerie Bergeron (1227-A, rue Amherst) les photos d’appareils reproducteurs de Paulo Finnochi, l’art érotico-religieux de Ricardo Olivarez, et les pièces de Zilon… Renseignements: www.festivaldesarts.org

Du 2 au 8 juillet
Rue Sainte-Catherine Est