Artcité : Place publique
Pour faire connaître et apprécier davantage les oeuvres de sa Collection permanente, le Musée d’art contemporain a choisi de les faire circuler dans divers édifices et lieux de la ville. Une initiative innovatrice, avec ses hauts et ses bas.
Le Musée d’art contemporain possède près de 6000 oeuvres. Et pour les montrer au public, le Musée effectue, deux ou trois fois par an, un roulement dans les salles dédiées à sa Collection permanente. Malgré cela, le visiteur ne peut finalement apercevoir qu’une toute petite partie de cet iceberg muséal en croissance constante. Pour la réorganisation de cet été, le MAC a opté pour une formule qui permettra de voir un plus grand nombre d’oeuvres: en plus de réaménager ses locaux déjà étroits, il prend d’assaut la ville en plaçant des pièces dans une vingtaine d’endroits tels que la cathédrale Christ Church, la basilique Saint Patrick, le Centre de commerce mondial, les locaux du Cirque du Soleil, du Casino de Montréal, de MusiquePlus, de la Sun Life, de l’Alcan… Si le public ne vient pas à l’art, l’art ira vers lui?
On pourrait croire en effet que le MAC fait ainsi le pari d’initier à l’art un public qui ne va pas dans les galeries et musées d’art contemporain. Vu ainsi, voilà un projet qui pourrait sembler utopique et même naïf. Comment croire que tout un chacun peut comprendre, au tournant d’un couloir ou à la sortie d’un ascenseur, l’art actuel qui ne se gêne pas pour produire de l’étrange et du repoussant?
Mais, heureusement, le MAC a relevé un pari calculé. Car il faut dire que les lieux d’exposition ont été très bien choisis, plusieurs de ces entreprises et lieux divers ayant déjà des affinités très marquées avec l’art actuel. Le Cirque du Soleil, par exemple, possède une importante collection d’art contemporain dont une pièce monumentale d’Andy Goldsworthy. C’est pourquoi cet événement risque bien d’intéresser à l’art actuel encore plus d’entreprises et d’individus bien ciblés. Une idée simple mais pertinente, même si elle se révèle un projet délicat du point de vue esthétique. Car trouver un espace qui convienne à chaque oeuvre tient quasiment du défi. Ces lieux n’ont pas l’apparente neutralité visuelle et symbolique d’une salle de musée. C’est le problème que nous évoquions d’ailleurs à propos de l’expo Corridart. L’art actuel peut-il sortir de l’espace blanc et épuré du musée et de la galerie alors que bien souvent il a été pensé pour lui?
Dans plusieurs cas, l’exercice s’avère néanmoins très concluant. Les panneaux de Pierre Dorion ont trouvé un juste écrin et une solennité accrue dans la cathédrale Marie-Reine-du-Monde. La sculpture de Christiane Gauthier placée dans le hall d’entrée de la tour de l’Industrielle-vie semble intensifier la mouvance des passants et fait penser encore plus à la célèbre statue Forme unique du futuriste Boccioni…
J’émettrais cependant une réserve importante qui est plus liée au choix des oeuvres qu’au projet lui-même. Le réaménagement d’une collection permanente est aussi l’occasion de réévaluer celle-ci. Et ici, à l’évidence, certaines pièces ont mal vieilli. Le dispositif de l’oeuvre de Barbara Steinman est très daté; le Temple aux cent colonnes d’Anne et Patrick Poirier, de 1980, si post-moderne et riche de mémoire pour l’époque, semble tellement simpliste maintenant… La pièce de Claude Hamelin apparaît très littérale.
Mais le MAC a aussi effectué des achats judicieux. Il faut absolument aller voir la pièce Atlan du grand artiste James Turrel, oeuvre datant de 1986. Elle est certes moins bien installée qu’elle ne l’était dans les locaux du MAC à la Cité du havre, mais c’est néanmoins un jeu visuel très réussi. Tout comme la fabuleuse pièce mouvante d’Ann Hamilton.
Vous trouverez une carte des différents lieux d’exposition sur le site du MAC: www.macm.org/artcite/
Jusqu’au 8 octobre
Musée d’art contemporain et divers lieux à Montréal
À la belle étoile
Un nouveau musée est né à Montréal. Mais ne cherchez pas son architecture imposante au centre-ville, ni d’ailleurs en d’autres coins de notre cité, car il s’agit d’une institution à ciel ouvert, d’un musée sans murs – ce qui aurait certainement fait plaisir à Malraux -, un musée d’art urbain qui a investi une série de lieux publics.
Deux nouveaux venus dans le milieu de l’art, Stéphane Brault et André Hervieux, avec la collaboration de la très chevronnée commissaire France Gascon – directrice depuis sept ans du Musée d’art de Joliette -, se lancent dans un projet d’envergure qui sera renouvelé l’an prochain. Pour son ouverture, ce musée intitulé Plein ciel présente des artistes dont la renommée n’est plus à faire; et le projet compte deux ou trois réussites majeures.
Les photos de Raymonde April et de Clara Gutsche, installées dans le Vieux-Montréal sur des panneaux lumineux, sont exceptionnelles. Agrandies à des formats presque publicitaires, ces images arrivent à franchir la barrière des musées et galeries avec intensité. Très intéressantes également, les pièces de David Blatherwick, au Marché Bonsecours, et de Claude Tousignant (et ceci malgré le fait que placé à côté d’un restaurant, coin Saint-Denis et Cherrier, l’ensemble abstrait fait penser à une assiette et à des couverts…).
Les pièces de Gilles Milhalcean et de Kamila Wozniakowska sont cependant moins réussies. L’une semble trop petite dans le parc Jarry qui l’accueille; et l’autre, coin Laurier et Saint-Denis, est une simple présentation à l’extérieur d’un grand tableau de chevalet.
Ce début de siècle risque bien d’être signalé dans les livres de notre petite histoire de l’art comme étant celui de l’art public. Avec Artefact au canal Lachine et Artcité réalisée par le MAC, l’art sort des musées. L’art au XXIe siècle sera public ou ne sera pas?
Renseignements: 284-4936
Jusqu’au 1er juillet 2002
Les 30 ans du Vidéographe
Le Vidéographe est encore cette année en pleines célébrations! Après ses 25 ans de fondation officielle fêtés en 98, voici les 30 ans de fonctionnement réel de cette véritable institution, le "premier centre d’accès à la vidéo en Amérique du Nord". Car c’est depuis 1971, en fait, que le Vidéographe existe. Pour marquer le coup, un événement intitulé Les états nocturnes aura lieu du 16 au 19 août au Théâtre de Verdure du parc La Fontaine: jeudi soir à 20 h 30, il y aura une présentation d’Hochelaga de Michel Jetté; vendredi à 20 h 30, 16 oeuvres vidéo de tous genres forment la soirée Vidéos de femmes dans le parc; samedi, dès 13 h, il y aura les performances Vox sensio de Simon-Pierre Gourd et Perceps de Pierre-André Arcand, puis suivront des créations de Jean-Maxime Dufresne, Étienne Grenier, Maud Angrignon, Marjolaine Lebrun, Anne-Stéphanie Lebrun, Geneviève Laurin et Dominic Villard; le tout reprend dimanche dès 13 h pour s’achever à 22 h 45, au Lion d’or, avec un spectacle du groupe Crazy Rhythm Daddies… Entrée libre. Renseignements: 866-4720.
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