Nadine Norman : Lèche-vitrine
Arts visuels

Nadine Norman : Lèche-vitrine

Avec un sujet qui n’est pourtant pas nouveau (la critique de la société de consommation), NADINE NORMAN arrive à nous interpeller grÂce à sa plus récente intervention au MAC et dans des vitrines de la rue Sherbrooke Est.

"Pierre, lèche ma vitre"… Voilà un bien étrange titre pour une exposition! Et qui sonne presque comme un code secret entre deux amoureux s’en servant pour désigner à mots couverts quelque pratique sexuelle que je vous laisse imaginer… Pourtant, ce titre est bien celui que l’artiste Nadine Norman a choisi pour son intervention au Musée d’art contemporain et dans les vitrines de l’espace de Fashionlab, rue Sherbrooke (dans l’ancien local du Centre international d’art contemporain).

Ce léchage à la Norman fait bien sûr référence au lèche-vitrine et à la relation d’amour et de haine parfois incohérente qui nous lie tous à la société de consommation. Mais elle ne s’arrête pas là. Son intervention a donné lieu, entre autres, début août, à une performance où l’artiste a nettoyé les fenêtres du Musée avec des chiffons, des squeegies et des langues de plastique… Manière de rire par autodérision de l’artiste en train de lécher les bottes du Musée? Pas vraiment. Qui lèche les bottes de qui?

Il y a dans cette action une forme de dénonciation des riches corporations ayant souvent de nos jours notre absolu respect, et qui s’infiltrent partout, même dans les musées. L’événement Artcité qui se tient au même moment au MAC, n’est-il pas commandité, entre autres, par une célèbre compagnie de voiture… Et comme au dernier moment l’artiste s’est vu retirer par cette dernière le droit d’utiliser une de ses voitures pour sa performance, Norman s’inquiète du pouvoir des corporations dans les choix esthétiques actuels. Elle n’est pas loin de la dénonciation des grosses compagnies par Hans Haacke. Dans avec son oeuvre La liberté va désormais être sponsorisée, on voyait un logo de Mercedes trônant sur un morceau du mur de Berlin…

Norman en profite pour parler de l’ingérence des gouvernements dans l’art, la Ville de Montréal (dont le maire se prénomme Pierre) lui ayant retiré le droit d’intervenir dans la rue. L’usage des squeegies par Norman aurait-il pu sembler un commentaire sur l’intolérance qu’ils subissent?

Avec un sujet qui n’est pourtant pas nouveau, Norman arrive à nous interpeller. Tout comme chez Sylvie Laliberté, des phrases, placées sur les vitres du MAC et de Fashionlab ainsi que sur des t-shirts, constituent l’ensemble principal de cette intervention. Mais ici, elles ont une réelle profondeur critique. Elles sonnent comme des énoncés politiques, philosophiques ou esthétiques, mais ne sont que des slogans publicitaires qui seront vite oubliés pour être remplacés par d’autres tous aussi apparemment songés et pénétrant.

On y lit des énoncés comme: "Conçu/e pour les anticonformistes",

"Un style personnel, toujours", "Designed for individuals who refused to follow the crowd"…

Et le slogan suivant: "Unir forme, fonction et qualité jusqu’au moindre détail". S’y lit un commentaire sur la réappropriation de la modernité (surtout architecturale) et de ses idéaux par la publicité, pour vendre n’importe quelle forme et n’importe quel contenu.

L’art peut-il se payer le luxe d’une réelle critique des institutions tout en ayant un pied à l’intérieur de celles-ci? Norman parie que oui. Le plus amusant, c’est qu’elle le gagne honorablement.

Jusqu’au 8 octobre
Vitrines du Fashionlab (314, Sherbrooke Est)
Entrée du Musée d’art contemporain

Rêve lunaire?
Pas facile de représenter d’une manière nouvelle le ciel, la lune ou les étoiles après des siècles de peinture… C’est presque un acte de courage que de rêver pouvoir ajouter une image à toutes celles produites sur ce thème – rappelons-nous des oeuvres présentées, dans Cosmos au Musée des beaux-arts. Quoiqu’il faille dire que certains, dont Paterson Ewen, ont su récemment renouveler le genre d’une manière céleste!

Et c’est à cette entreprise de haute voltige que l’artiste David Hall consacre lui aussi sa plus récente exposition, Skies, à la Galerie Lilian Rodriguez. Il y est de retour après deux ans, à la suite d’une présentation à l’automne 1999 d’une Série Marine où les cieux occupaient déjà comme chez les peintres hollandais une bonne partie de l’espace pictural. Son regard s’élève encore plus cette fois, et tente de rendre compte de la magie du ciel. Le tout revêt un aspect un peu curieux: ici une lune verte, là un ciel oranger acide font penser que l’ensemble a été réalisé par un astronome ayant capté des phénomènes rares. Malgré un sentiment général que la peinture de Hall est ici devenue un peu sage, cette expo recèle deux ou trois belles choses.

Cette lune de métal découpé, placée sous plexiglas, donne le sentiment que les secrets sélénites ont enfin été saisis. Quant aux deux panneaux oblongs placés aux cimaises de la galerie, ils constituent une belle idée pour rendre compte de l’acte de lever la tête pour voir le ciel.

Jusqu’au 22 septembre

Galerie Lilian Rodriguez
Bain photographique
Le Mois de la photo, avec près de 40 événements, débute officiellement demain soir, le vendredi 7 septembre à 17 h, avec les vernissages de quatre expositions au Marché Bonsecours dans le Vieux-Montréal.

Le reste de la fin de semaine sera bien rempli pour ceux qui voudront suivre le cours des événements. Samedi, à 13 h, à la maison de la culture Côte-des-Neiges, le vernissage du Français Éric Madeleine; puis à 14 h commence l’expo de Fred Mella et Paul Tourenne à la Galerie les Modernes; suivra à 15 h chez Vox la présentation du travail d’Alain Declercq; la journée se finira à 20 h, à la Galerie Clark, avec le projet monté par Pierre Blache intitulé Du Lien social… Un véritable marathon! Dimanche, 9 septembre, à 15 h aura lieu une table ronde à la Maison de la culture Frontenac avec, entre autres, Alfredo Jaar.

Pour ceux qui voudraient se plonger dès aujourd’hui dans ce bain photographique, signalons qu’à 15 h se produira le dévoilement des images d’Ève Cadieux, Éliane Excoffier, Olivier Thieffry et Olivier Vanderaa à la Galerie Observatoire 4. De plus, ce soir, à 19 h, à la Cinémathèque québécoise, a lieu la dernière projection d’une série de vidéos d’artistes nordiques à qui le Mois de la photo dédie une partie de sa programmation.

Renseignements: 390-0383 ou www.moisdelaphoto.com

Ciel, mes bijoux!
Il y a une toute petite expo au Château Ramezay, dont le thème mériterait qu’un jour un musée des arts décoratifs y consacre un événement important. Il s’agit des bijoux d’hommes… Que cela ne prête pas à confusion puisque nous sont présentées les diverses parures que les hommes ont arborées, autant sinon plus que les femmes, jusqu’à la Révolution française et, depuis, plus rarement, grâce aux modes du dandysme et du piercing: bagues, boucles de ceinture et de souliers, épingles à cravate, monocles, montres de gousset, boutons de manchettes… Jusqu’au 30 septembre.