Jeune design nordique : En formes
L’expo Jeune design nordique: Génération X – au Centre de design de l’UQAM jusqu’à dimanche – propose un panorama curieux des productions (parfois de qualité inégale) de cinq pays.
Non, le design d’Europe du Nord ne se résume pas à IKEA et à ses objets aux noms énigmatiques – qui, soit dit en passant, doivent certainement demander le travail d’une ribambelle de linguistes tentant d’éviter des quiproquos langagiers gênants (la table en vrai bois appelée Hallum serait-elle une invitation à la pyromanie?)…
Après avoir connu son heure de gloire dans les années 50 avec des créateurs comme Arne Jacobsen (ses chaises Cygne et Ouf sont encore totalement in dans les revues de décoration) ou Alvar Aalto, le style des pays du Nord semble en plein renouveau. Et il est moins tourné vers des matières et des formes naturelles se voulant invitantes; moins inspiré par le travail bien fait de l’artisan; en train de s’éloigner du cliché du Nord authentique et chaleureux malgré le froid…
L’expo Jeune design nordique: Génération X – au Centre de design de l’UQAM jusqu’au dimanche 24 février – propose un panorama curieux des productions (parfois de qualité inégale) de cinq pays: Norvège, Suède, Finlande, Islande, Danemark. Elle recèle plusieurs formes inusitées avec parfois même un aspect un peu hard…
Le spectateur pourra voir que le design, après des décennies de quasi-dictature ergonomique, de lignes épurées et de look presque scientifique – pour ne pas dire médical tant il était souvent aseptisé -, se veut de plus en plus une oeuvre d’art échevelée. Les produits actuels sont comme des porcs-épics… On ne sait par où les prendre! Déjà dans les années 50, l’engouement pour l’art de Moore ou de Miro avait été un peu responsable de la mode des formes organiques et arrondies. Mais, de nos jours, le designer revendique l’art plus que comme source d’inspiration. Il prétend à part entière au titre d’artiste… Le fonctionnalisme s’éclipse. Les objets sont bien sûr toujours adaptés à un usage particulier, mais semblent offrir un sens supplémentaire. En littérature, on parlerait de fonction poétique. Ces inventions apparaissant souvent comme des éléments lyriques dans nos univers très utilitaires. Le design ne semble pas ici uniquement fait pour rendre plus attirants auprès des consommateurs les nouveaux produits industriels. Alors que bien peu de gens achètent de l’art contemporain, le design démocratisé deviendrait-il étrangement le refuge de la différence et de l’originalité?
Cette lampe Globlow, croisement entre un nuage blanc et une montgolfière se gonflant et se dégonflant continuellement, est un bon exemple de cela. Tout comme la lampe Block (d’Harri Koskinen), constituée d’une ampoule prisonnière d’un pavé de verre ressemblant à de la glace. Elle est une rencontre fabuleuse entre le chaud et le froid. Et que dire de la lampe Sugar Ray de Thomas Bernstrand? Une création coup-de-poing! Faite de caoutchouc de silicone, elle est comme un punching-bag qui "permet de se débarrasser de ses frustrations" tout en s’éclairant… Do Swing, du même designer, est une lampe à laquelle on peut se suspendre pour des activités multiples!
Qui a dit que les pays du Nord proposaient un design soft?
Jusqu’au 24 février
Centre de design de l’UQAM
Scandale chez Clark
La Galerie Clark est devenue un repaire de faussaires! Dénonçons la supercherie: toutes les pièces présentées dans ce centre d’artistes sont en fait des faux. Contrefaite est cette photo d’Emmanuelle Leonard; fallacieuses, ces peintures de Marie-Claude Bouthillier et cette image de Nicolas Baier… Clark serait-elle devenue un repaire de brigands?
Jeudi soir dernier, c’était la réouverture de la Galerie Clark, dans ses nouveaux locaux au 5455, rue de Gaspé (local 114); et pour l’occasion, les membres de cet important centre d’artistes ont eu une très belle idée d’expo: pasticher le travail d’autres créateurs. Le résultat est fabuleux. Dans ces copies d’oeuvres, les artistes imitateurs soulignent les caractéristiques stylistiques de leurs collègues, comme par exemple l’aspect évanescent et presque ancien des images de Yan Giguère (refaites par Nicolas Baier).
Étrangement, cela donne aussi des pièces extraordinaires par elle-mêmes et pas seulement par comparaison avec l’oeuvre ainsi pillée. La série de photos d’Emmanuel Galland, parodiant le travail de Corine Lemieux, est fabuleuse.
L’art moderne et contemporain fut souvent créateur de canulars. On raconte que récemment, à Paris, des artistes mystérieux envoyaient des cartons d’invitation à de faux vernissages d’artistes connus avec de fausses reproductions de leurs nouvelles oeuvres accompagnées de faux textes de critiques d’art influents… À travers cela se réalise une forme de moquerie des travers artistiques des uns et des autres mais aussi une forme d’hommage à leur style. Et Clark recèle des artistes ayant visiblement un langage plastique personnel – original car imitable! – très affirmé que l’on peut identifier même lorsqu’il est seulement résumé par deux ou trois indices formels ou narratifs.
Une expo à voir absolument. Un excellent portrait de la jeune création au Québec.
Jusqu’au 16 mars
Galerie Clark