Monopoly : Projets utopiques
La Galerie Monopoli est la première à proposer un espace consacré à l’architecture. Pour son exposition d’ouverture, elle a convié 22 firmes d’architectes à se lancer dans un débat d’idées et de formes.
L’architecture domiciliaire est d’une grande platitude. De Saint-Léonard à Laval, elle affiche des alignements de bâtiments identiques et aussi mornes les uns que les autres. Montréal ne mériterait-elle pas une architecture contemporaine plus marquante?
Que faire contre cette uniformisation? À l’opposé des constructeurs et entrepreneurs, les architectes contemporains ne semblent pourtant pas en manque d’idées. Et les preuves de cette originalité s’étalent dans l’exposition d’ouverture d’un nouvel espace dédié uniquement à l’architecture. Si à Montréal plusieurs excellentes galeries sont consacrées aux arts visuels, la Galerie Monopoli est, quant à elle, la première à proposer un espace expérimental de recherche et d’émulation créatrice en architecture. Sise dans le local 516 de l’édifice Belgo – 372, rue Sainte-Catherine Ouest -, la Galerie Monopoli risque bien de remplir un mandat plus que nécessaire, celui de créer un dialogue entre les citoyens et les architectes. Sera-t-il fructueux? Pour l’instant, il est très prometteur.
Pour cette première expo, la commissaire Sophie Gironnay a convié 22 firmes d’architectes – certaines très connues comme Bosses Design, Dan Hanganu, Saucier+Perrotte…- à se lancer dans un débat d’idées et de formes. Toutes ont respecté le thème qui consistait à renouveler le genre de l’habitation résidentielle.
Le résultat? Plusieurs projets utopiques juste créés pour faire rêver, telle cette maison de chocolat (imaginée par Affleck et de la Riva). Mais le visiteur trouvera aussi des maquettes dont il pourrait goûter la réalisation à plus long terme. Cette maison de Julia Bourke et Simon Jones, sur laquelle se dresse un jardin, fera réfléchir plus d’un sur les possibilités d’aménagement des toits à Montréal. Tout comme seraient originales ces maisons montées sur un système hydraulique permettant à leurs locataires, selon leurs humeurs, de les faire bouger dans l’espace, tel un ascenseur… La firme Yh2 (formée des architectes Hamelin et Yacouvakis) ainsi que l’Atelier Braq (composé du duo Fianu et Eide) ont proposé dans cet esprit une idée assez similaire qui ne manque pas d’intérêt. Une nouvelle tendance à l’horizon? J’aime beaucoup aussi la maison de Scheme Consultant qui a pour façade un immense écran permettant de projeter la devanture qui plaît au client. Si vous revenez de voyage, vous pourrez y placer la photo du palais vénitien que vous avez adoré…
Le visiteur pourra voter pour le projet lui semblant le plus prometteur. Si votre environnement urbain vous intéresse… Cette expo sera suivie par une autre, Six acrobates pour une école, qui permettra de scruter les six maquettes des projets pour le concours de l’École de cirque.
Jusqu’au 14 avril
Galerie Monopoli
Le degré zéro de l’intériorité
Les collages de Johannes Zits présentés à la Galerie Pierre-François Ouellette pourraient être interprétés comme une forme de parasitage d’un monde straight par des gais plus marginaux. Cette maison, où des hommes flambant nus semblent bien à l’aise, ne serait-elle pas en fait le salon de l’ancien président Ronald Reagan, trafiqué par le talent de Zits? Ces images très Wallpaper ou Architectural Digest mais envahies par des corps nus d’hommes souvent bandés et plongés dans diverses activités sexuelles, sont-elles un pied de nez aux bien-pensants?
Les choses ne sont pas si simples. Zits ne critique pas que l’univers hétérosexuel. Car il y a aussi des gais qui ont revendiqué une normalité BCBG. Des gais straight? Dans les années 80 et 90, bien des militants ont ouvertement dénoncé l’édulcoration de la vie homosexuelle par les gais eux-mêmes. Parmi ceux-ci, on peut citer Leo Bersani qui, entre autres avec son essai Le rectum est-il une tombe?, s’est attaqué à cette normalisation de la vie homo. Le monde hétéro accepte bien mieux les gais quand ceux-ci correspondent au modèle dominant. Dans ces images de Zits révélant des gars nus baisant dans des appartements très proprets, se joueraient les codes d’une identité gaie lavée de tout soupçon. Les hommes qui y sont montrés sont masculins, bâtis comme des cow-boys et souvent montés comme des chevaux! De vrais Américains sortis d’un film hollywoodien… tel Rock Hudson! Une critique du placard mais aussi du gai caméléon sachant se fondre dans le groupe. Ici, pas de travelos, pas de pauvres non plus: la grosseur des muscles va de pair avec la grosseur du compte en banque.
Mais ces corps composés de fragments d’images de revues pornos pourraient de plus nous faire dire que nos désirs sont envahis par des fantasmes collectifs et par une volonté de conformité. En fait, Zits s’attaque à une esthétisation du quotidien (que vivent autant hétéros qu’homos), un peu comme dans le film Fight Club, où le héros s’en prend à une aliénation de sa vie attribuable entre autres à la mode de décoration intérieure proposée par IKEA. Même si le propos n’est vraiment pas nouveau, il ne manque pas pour autant de justesse.
Jusqu’au 30 mars
Galerie Pierre-François Ouellette art contemporain
Le corps du spectateur
La Galerie Dare-dare propose jusqu’au 23 mars une installation de Julie Andrée T. qui nous plonge dans un espace similaire au film Being John Malkovich. La galerie a été divisée en deux, mais dans le sens de la hauteur! Au demi-étage inférieur, le visiteur sera obligé de se promener accroupi. Des écrans accrochés à l’envers l’obligeront à se contorsionner dans des positions évoquant la danse moderne. Comme quoi une oeuvre n’est pas seulement une expérience visuelle mais aussi une manière d’être au monde et dans son corps.
Ce décor permettra à l’artiste de donner des performances, le 15 mars à 17 h et le 23 mars à 15 h. Renseignements: 878-1088.