La Chambre blanche : Mystères du visible
Arts visuels

La Chambre blanche : Mystères du visible

Deux artistes marseillais résident actuellement à la Chambre Blanche. SYLVIE PIC interroge notre regard et EMMANUEL LAMOTTE explore les possibilités poétiques du Web. Arts et  sciences.

Alors que les deux artistes québécoises Murielle Dupuis-Larose et Diane Landry terminent tout juste un séjour de production à Marseille, au Cypres (Centre interculturel de pratiques, recherches et échanges), deux artistes marseillais résident sur la rue Christophe-Colomb. Sylvie Pic s’intéresse à la science, à la perspective et au regard depuis plusieurs années. Elle n’en est pas à son premier passage au Québec, ayant participé, l’été dernier, au Symposium international de la nouvelle peinture de Baie-Saint-Paul. Ses recherches donnent naissance à des installations qui parviennent avec une efficacité surprenante à interroger la perception et les évidences du regard. Une grande table s’inspire des fameuses gravures de Dürer sur la perspective: autant d’images classiques que Sylvie Pic revisite. La référence établie, le sentiment de déjà vu laisse la place à une expérience esthétique. Ce nouvel objet nous donne en effet matière à réflexion sur ce qui se passe entre l’oeil et le monde; sur les mécanismes de la vision. Intégrées avec minutie et attention à l’espace d’exposition, les interventions (maquettes et autres boîtes-tableaux), dépouillées de toutes distractions futiles, orientent le regard vers une introspection sur cet acte quotidien qui va, la plupart de temps, de soi. Ici, tout est pensé et pesé; fignolé, précis. Ces installations peuvent paraître a priori presque austères, pourtant rapidement on s’abandonne aux propos de Sylvie Pic, convaincu.

Cela peut paraître étrange, mais le monde de l’art technologique attend encore l’artiste qui parviendra à secouer cet univers virtuel. Dans ce contexte, ce qu’Emmanuel Lamotte est en train d’élaborer en faisant de "l’informatique libre" ne peut qu’enthousiasmer. Architecte de formation et passionné de technologie, Lamotte est le cinquième artiste à participer à la résidence de production au Laboratoire de création sur le Web de la Chambre blanche: "J’aime être ici. Je suis comme quelqu’un qui fait des esquisses dans son carnet de croquis", explique-t-il. Un carnet composé de claviers et de souris. Dans ses interventions sur le Web, il n’y a pas d’"interactivité de façade" du genre "on presse sur un bouton et le petit diable sort". Pas d’effet spectaculaire non plus. Mais plutôt un travail qui interroge l’architecture de l’information avec des interventions minimales et volontairement simples: des microchangements porteurs d’utopies toutes modestes. Des interfaces et autres interventions subtiles, à mille lieues de l’effet cinéma recherché et dominant dans l’univers d’Internet. Il interroge et tente de cerner comment cet univers modifie notre façon de penser. Les interventions de cet artiste chercheur se font souvent sous le couvert de l’anonymat ou sous un pseudonyme. Pour Emmanuel Lamotte, la dimension esthétique n’est peut-être pas là où on l’attend… Cet artiste a participé en 2000 au Symposium international des arts électroniques. Il présentera son travail le vendredi 24 mai à 19 h à la Chambre blanche. Une conférence qui risque d’être des plus captivantes. À ne pas manquer. D’ici là, voir ces projets à www.erational.org/netart. Suivra à 20 h le vernissage en compagnie des deux artistes invités.

Jusqu’au 9 juin 2002
À la Chambre Blanche
Voir calendrier Arts visuels

Vernissage au Lieu
Mariette Bouillet et Henri-Louis Chalem proposent Emboîteillages, au Lieu. Chalem est vidéaste et musicien (ancien membre des Cabochons !). Mariette Bouillet développe une "écriture critique, scénaristique et poétique" et a aussi une production vidéo. Ces deux créateurs ont choisi ce qu’ils nomment les arts de la présence (performance, manoeuvre, musique): "Nous cherchons peut-être tout simplement à retrouver cette chose simple et évidente, paradoxalement devenue aujourd’hui la plus difficile: le contact…" C’est sur le mode ludique qu’ils envisagent leur engagement artistique. Cette nouvelle exposition s’inscrit dans la série de présentations de travail en duo commencé au Lieu depuis le début de l’année. Inauguration, le jeudi 23 mai à 17 h au Lieu.

Réceptivité
La dernière expo des finissants de l’École des arts visuels est une des meilleures des dernières années. Pas de chromos, de la bonne peinture, de la bonne sculpture. Des installations, de la vidéo, bref, une trentaine de pièces qu’on découvre en arpentant l’école devenue salle d’exposition. Si on pouvait encore utiliser l’expression chef-d’oeuvre – désormais bannie du vocabulaire de l’art -, c’est de cette façon dont on parlerait de la pièce de Yannick Pouliot, Le Courtisan. Une machine à voyager dans le temps: la joie! On vous en reparle plus longuement la semaine prochaine en compagnie de l’artiste. L’exposition se poursuit jusqu’au 2 juin.