Carlos Sainte-Marie : Changement d’huile
CARLOS SAINTE-MARIE expose sa production récente à la Galerie des arts visuels de l’Université Laval. Nous l’avons rencontré dans son atelier entouré de motorisés, de machinerie lourde et autres véhicules occupant ses retables revisités.
Dans sa peinture récente, Carlos Sainte-Marie jongle avec les références religieuses et les symboles de la société industrielle. Délaissant la configuration des calendriers qui ont organisé plusieurs de ses oeuvres des dernières années, le récipiendaire de la bourse d’excellence René-Richard de 1999 propose dans sa nouvelle production d’imposants retables de bois sur lesquels trônent de grandes figures sur des fonds où l’on devine les couches successives de peinture. Les icônes élues pour cette nouvelle série: un camion nous faisant face, un winnebago qui offre son flanc, un tracteur prêt à construire comme à démolir, ainsi qu’un yacht encore inaccessible lors de notre visite à l’atelier. On trouve des dorés, des bleus peints, propres aux retables religieux, mais aussi des rouges vifs, des jaunes, des verts industriels. Sainte-Marie utilise du latex, de l’acrylique et de l’huile. Ces couleurs, il les étend, les étale, les malmène avec la vigueur gestuelle qu’on lui connaît. C’est tout, sauf une peinture léchée. Presque irrévérencieuse. Un véritable travail de peintre. Mais il ne faut pas lui dire. Il déplorerait au passage les cloisonnements. Faut-il être un peintre? un sculpteur? un musicien? Il veut pouvoir ne pas choisir, se donner le droit de changer…
Objets de convoitise, objets utilitaires, tous ces véhicules qui peuplent ces tableaux devenus des espaces publicitaires peuvent s’envisager comme des emblèmes possibles d’une nouvelle religion régnant au royaume de l’automobile, un des piliers de la société de consommation. Rien de nouveau sous le soleil. Quoi qu’il demeure toujours pertinent de penser aux rapports qu’on entretient avec toutes ces machines, des rapports complexes: ce sont à la fois des outils de liberté et les objets de notre propre perte. Et la référence au retable, cet élément décoratif de l’autel, central dans l’art religieux? Contrainte formelle qui permet d’organiser la surface. En outre, les supports de bois inspirés des retables sont si massifs, le traitement si physique, que ce matérialisme affirmé vient contrecarrer toute tentation de véritables portées spirituelles. La référence religieuse est un prétexte à une confusion délibérée des genres. "Qu’est-ce qu’on en a à faire, de la religion?" lance Sainte-Marie à propos du choix des retables. Mais rien n’est anodin: "On vit quand même dans une société où il n’y a pas de modèles, sauf celui de la réussite sociale…"
Même si les camions et autres moyens de transport sont au centre de cet ensemble teinté d’ironie, c’est la peinture qui demeure au coeur des préoccupations de l’artiste. C’est là que loge d’ailleurs la force de Sainte-Marie: la matérialité de la peinture, la superposition des couleurs, le travail avec les espaces vides et pleins; autant d’enjeux qui structurent ses tableaux. "J’aime la peinture, avouera finalement Sainte-Marie. C’est une des rares formes d’art où on reconnaît la trace du travail de l’artiste. Il y a un côté humain…" Cette production permet à Sainte-Marie de renouer avec la figure, rompant ainsi avec plusieurs années de peinture plus abstraite. Mais, les délibérations usées entre abstraction et figuration ne le touchent qu’à moitié. Au demeurant, son attitude reste celle d’un peintre abstrait: ses quatre retables font partie d’une nouvelle production sérielle. Les motifs dont il s’empare deviennent des prétextes à l’exploration de la peinture; ses retables, les lieux d’un combat entre la figure et le fond.
Du 19 septembre au 13 octobre
À la Galerie des arts visuels
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Bloc-notes
Chez Rouje
Vernissage attendu chez Rouje où l’on inaugure l’exposition des oeuvres récentes de Paul Lacroix, Gaétan Gosselin et André Barette. Le jeudi 19 septembre dès 17h.
Au 36
Marcel Jean ouvre les portes de sa galerie au travail de Lucie Fortin. Espace intime tout désigné pour l’installation des oeuvres picturales tout en nuances de cette artiste. L’inauguration de "ce par quoi les choses sont éclairées" aura lieu le vendredi 20 septembre à 19h. L’exposition se poursuit jusqu’au 13 octobre au 36 de la rue Couillard.
L’Art qui fait Boum!
La deuxième édition de la Triennale de la relève québécoise se prépare avec pour thème Ouvres à sensation. Un petit rappel pour les artistes en arts visuels, ceux de la performance, des arts médiatiques et du cinéma (court métrage) qui désirent proposer des projets. La date limite: le 1er octobre prochain. L’événement se déroulera au Marché Bonsecours de Montréal au printemps 2003. Pour plus de détails: http://artquifaitboum.qc.ca.