Lucie Fortin : Teintes de mystère
Les pièces récentes de LUCIE FORTIN rayonnent dans l’espace intimiste de la galerie le 36. Propos sur la peinture. Sans tableau.
Chaque nouvelle exposition nous fait apprécier ce bel espace qu’est la galerie du 36 de la rue Couillard dans le Vieux-Québec. Une galerie qui occupe une place de choix dans les lieux de diffusion des arts visuels de la Vieille Capitale. Ce lieu presque secret, sans être clandestin, accueille dans ces deux pièces les oeuvres récentes de Lucie Fortin. Des constructions dans l’espace, quelques pièces au mur, autant d’oeuvres qu’on peut considérer comme faisant partie d’une installation élaborée avec une attention spécifique au lieu. Cinq oeuvres composent l’installation où trône une sculpture de bois, objet central de l’ensemble, autonome tel un nouvel objet au monde. L’oeuvre est constituée de deux caisses de bois, dont celle à la verticale est déposée, légèrement décentrée, sur l’autre au sol. La boîte-tableau, peinte d’un vermeil lumineux et profond, est ponctuée de cercles noirs qui se révèleront à notre approche des trous percés à même le bois. Jeu optique propre à certaines oeuvres de l’Optical Art, inscription et immatriculation géométriques soutenues par un propos sur la peinture, sur le support et sa surface, sur les effets de la couleur: "Je me considère comme ayant une sensibilité de peintre", dira Lucie Fortin. La peinture étant ici envisagée comme problématique plus que comme un médium.
Pour Lucie Fortin, "l’expérience de la couleur est l’expérience picturale première". Une expérience qui s’incarne dans des objets portés par une narration auréolée de mystère: une structure de bois trouvée recouverte de céramique jaune marquée par le temps, qu’une fenêtre ovale ouvre sur une bouteille bleue, laissant voir au second plan des marques au sol. Plus loin, des pochoirs ont été fixés au mur où on peut lire Heaven. Un des deux panneaux d’émail brillant est recouvert de la phrase no more tears. La répétition d’une image publicitaire de Chanel est collée au mur. Des photographies de cerises minutieusement encadrées sont loin de laisser paraître leurs humbles origines de napperon de table. Dix-huit cerises, comme on compte 18 cercles noirs dans la sculpture centrale: coïncidence formelle qui rythme l’espace. Tel qu’on peut le lire dans le texte accompagnant l’exposition dans Introduction à l’esthétique, sous la plume de Maurice Nédoncelle: "La vraie peinture est toujours concrète; même si elle géométrise, elle cherche la figure sensible, le corps irradié de gloire; elle ne se prive de certaines ressources que si cette privation est inoffensive et si elle sert à faire voir soudain l’essentiel." Essentiel comme cette lumière qui nous révèle les couleurs qui nous entourent. On en ressort réjoui.
Jusqu’au 13 octobre prochain
Au 36 de la rue Couillard
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Bloc-notes
Paul Lacroix, Gaétan Gosselin et André Barette
Trois artistes occupent les cimaises de Rouje jusqu’au 6 octobre prochain. Quoiqu’un peu austère, cette exposition a toutefois le mérite de nous faire voir la production récente de Gaétan Gosselin, découvrir les paysages radicalement minimalistes d’André Barette et apprécier encore et toujours les pièces de Paul Lacroix. Trois belles publications accompagnent les oeuvres, dont celle de Paul Lacroix finement commentée par les réflexions poétiques de Lisanne Nadeau.
Simulacre de Tania Girard-Savoie
Participante au Symposium d’art contemporain de Baie-Saint-Paul l’été dernier, Tania Girard-Savoie présente en solo quatre grandes mosaïques d’estampes chez Engramme, réalisées à partir de photogrammes et de radiographies (celle des poumons de son père aujourd’hui décédé). La répétition du motif et l’exploration de la couleur parviennent à libérer la source iconographique du tragique, comme si le temps inscrit dans chacune des impressions permettait de traverser les étapes successives du deuil. Même si la présentation semble à demi résolue, la qualité des impressions et des compositions est remarquable. Jusqu’au 13 octobre.
Dépossession/dernière chance
Organisée par Folie/Culture, Dépossession regroupe des interventions et des installations nomades. En cours depuis une semaine, l’événement se termine ce jeudi, le 3 octobre, par un 5 à 7 chez Rouje. D’ici là, il reste quelques précieuses heures pour rencontrer Devora Newmark dans son camion sanctuaire. L’artiste montréalaise nous invite à méditer dans son temple mobile. Ouvre bienfaisante de cette artiste chez qui la performance est "comme un moyen d’apaisement personnel et social". Pour connaître la position de Neuwark le jeudi 3 octobre, consultez le www.folieculture.org. Incontournable. Isabelle Laverdière et Claudine Cotton occupent elles aussi leur camion respectif. Laverdière sera stationnée au 224, Saint-Joseph de 17 à 20h et Cotton, au 557, Saint-Joseph de 13 à 17h. À voir aussi l’installation vidéo de Christine St-Maur dans la vitrine de Rouje et celle des Fermières obsédées dans la rue Saint-Joseph.
Rencontre à la Chambre blanche
Autre rendez-vous ce jeudi 3 octobre à 19h pendant lequel Murielle Dupuis-Larose et Diane Landry nous entretiendront sur leurs expériences de résidence au Centre Cyprès de Marseille. Présentation aussi du travail de l’artiste français Emmanuel Barrault. Avis aux artistes de la région de Québec, vous avez jusqu’au 29 novembre prochain pour proposer vos candidatures pour la prochaine résidence à Marseille en mai 2003…