Lucie Robert : Haute couture
Retour en force pour Lucie Robert dans la région métropolitaine, où elle présente deux expositions. On peut voir ses dessins réalisés de main de maître à l’Espace Occurrence et au Centre Plein sud de Longueuil.
Voici une artiste dont le public montréalais n’a pas eu souvent l’occasion de voir la production. Dans notre cité, la dernière exposition de Lucie Robert remonte à 1994 (elle se tenait au Centre des arts actuels Skol). Plus active sur la scène de la ville de Québec, d’où elle est originaire, Robert fait un retour très remarqué dans la région montréalaise avec non pas une mais deux présentations, l’une à l’Espace Occurrence, l’autre au Centre Plein sud de Longueuil.
Le dessin continue d’être un mode d’expression privilégié en art contemporain. Robert en a produit une multitude, majoritairement des encres sur papier. Ils sont surpiqués de fins fils qui ajoutent à l’ensemble un sentiment de délicatesse, mais aussi et surtout une échelle pour le regard. Ces coutures accentuent le sentiment d’intimité que le dessin et l’encre évoquent. Pour voir ces points, il faut s’approcher, les appréhender avec attention. Robert continue à se réapproprier sur le plan artistique une occupation longtemps associée à la main féminine et à la place de la femme dans le tissu social. La couture, du petit travail de reprise d’un accroc dans le vêtement des enfants à celui des petites mains ou grandes finisseuses des maisons des célèbres couturiers, serait comme un symbole du travail des femmes qui fut longtemps sans grande reconnaissance publique. Une couture, on la préfère invisible… Mais Robert poursuit aussi sa recherche visuelle sur les notions de dualité et de répétition, sur le même et le différent. D’ailleurs, son expo bipartite s’intitule Doubles.
Les 60 images formant la série Ciseaux (à Plein sud) sont particulièrement riches, tantôt ressemblant à des organes génitaux masculins ou féminins, tantôt prenant la forme d’un arbre ou d’une chaise… Ceci n’est pas une paire de ciseaux… mais plutôt une variation sur le couple et ses métamorphoses. Les pièces Fée et Cage thoracique (chez Occurrence) me semblent aussi de très grandes réussites. Bien sûr, parfois, cela fait penser à d’autres d’artistes. Mais ces dessins dépassent pour la grande majorité ces parentés visuelles.
J’aurais certes apprécié que l’artiste effectue une sélection plus resserrée. Sa série Les Grosses Têtes me paraît un peu inégale. Je doute aussi, pour quelques dessins se trouvant proche de l’entrée chez Occurrence, du mode de présentation par suspension dans l’espace. Néanmoins, ce sont des détails mineurs dans une expo de haut niveau.
Jusqu’au 15 février
À l’Espace d’art et d’essai contemporains Occurrence
Jusqu’au 2 février
Au Centre d’exposition en art actuel Plein sud à Longueuil
La mer qu’on voit danser
Le bord de la mer à Montréal en hiver! Voilà à quoi nous convie le sculpteur montréalais, d’origine argentine, Alfredo Abeijon à la Maison de la culture Plateau Mont-Royal. Son installation, une sculpture mobile, est une petite curiosité qui nous reconnecte avec l’émerveillement de l’enfant devant la vie. Dans cette nouvelle mécanique mouvante d’Abeijon, certains éléments bougent selon un axe avant-arrière, d’autres de gauche à droite… Un homme sortant d’une cabine de bain tangue d’un bord, un immense poisson roule de l’autre… Comme le mouvement d’un bateau balancé par la houle. Le tout est amplifié par une caméra placée dans le corps de bois du nageur qui capte la scène et la diffuse sur un écran. Une danse où l’équilibre semble toujours sur le point de se rompre. Mal de mer en vue? Belle idée d’oeuvre qui nous parle de nous jeter à l’eau, de plonger dans l’immensité d’un océan, métaphore de la vie. La peur de l’espace infini triomphe-t-il de la jouissance des grands espaces inconnus?
Jusqu’au 26 janvier
À la Maison de la culture Plateau Mont-Royal
Jeunes artistes à surveiller
À la Galerie d’art du Collège Dawson, il y a une petite expo de photos qui mérite le détour: Joanna Rosciszewska et Jocelyn Michel y présentent un double mixte… intitulé Holga (e) Scapes et Bleu.
Rosciszewska propose des photos urbaines très réussies où elle manie avec grande justesse des superpositions de textures et d’images. Quant à Michel, il a produit une série qui, au départ, était pensée dans le but de représenter les personnages d’un film. Cela donne finalement des photos toutes bleues, d’un bleu tranchant et éblouissant, tirant beaucoup vers la photo publicitaire. Un travail très maîtrisé.
Deux artistes à surveiller.
Le vernissage de cette expo a lieu ce soir, jeudi 23 janvier, de 18 à 22 h.
Jusqu’au 29 janvier
À la Galerie Warren G. Flowers, 4001, boulevard De Maisonneuve Ouest
À signaler
Pascal Grandmaison, dont je vous louais il y a trois semaines la plus récente intervention vidéo chez VOX, a lancé son site Internet. Le visiteur y trouvera plus de 30 extraits de vidéos dont un de son très rythmé clip Les Yeux tout autour de la tête, réalisé pour le merveilleux Jérôme Minière. Des informations sur la production de Grandmaison entre 1998 et 2003, des nouvelles sur ses plus récentes interventions, mais aussi des projets exclusifs à son site sont aussi disponibles: www.pascalgrandmaison.com/.