Tom Thomson (1877-1917) : Peinture fraîche
Aussi fulgurante que brève, la carrière de peintre de Tom Thomson a marqué la peinture canadienne. De 34 à 39 ans, il a peint des centaines d’oeuvres. La peinture dans toute sa splendeur.
Tom Thomson est un des plus grands coloristes canadiens. Bien sûr, il y a le mythe construit autour de l’homme depuis sa mort tragique en 1917 à l’âge de 39 ans, mais il y a aussi et surtout sa peinture, qui s’avère à la hauteur de sa réputation. De grands tableaux de Thomson et de ses contemporains sont présentés dans trois salles du Musée. Pourtant, ce qui nous révèle vraiment son art, ce sont les quelque 160 petites huiles sur panneaux de bois qui nous font traverser les quatre saisons et découvrir la géographie de notre province voisine. Simplification de la composition, négociation audacieuse de la surface et du fond, ces esquisses sont peintes avec une liberté et une insouciance propres à la spontanéité du travail sur le motif. Le siècle qui nous sépare de leur réalisation disparaît sous l’éclat et la sensualité de ces tableaux.
Chacune des esquisses raconte la fascination de Thomson pour la nature. On retrouve la froideur exacte des eaux presque noires du Nord; l’élan des aurores boréales propres aux régions froides; des bouleaux et des érables rythmant la surface. Le peintre nous transporte près des rivières, sur les lacs et dans la forêt au nord du lac Ontario, dans la région du parc Algonquin, lieux qu’il a longtemps fréquentés. Thomson pratiquait la pêche dans un esprit de recueillement; il était fasciné par ces contrées sauvages devenues accessibles par le développement de l’industrie forestière. Il en peindra les voiliers d’outardes, les orignaux dans la nuit, de fabuleux couchers de soleil, mais aussi les barrages et les collines dévastées par le feu. Son approche révèle toute la capacité poétique de la peinture; oscillation indicible entre la référence à la nature et la matière picturale.
Ce sont les arts décoratifs qui ont occupé principalement Thomson dans sa jeunesse. Le peintre était au centre du mouvement Arts & Crafts (Arts et Métiers), lancé par les écrits et l’oeuvre de l’Anglais William Moris, valorisant – à l’instar de l’Art nouveau ou du Jugendstil en Allemagne – la représentation de la faune et de la végétation autochtones, un retour aux traditions locales face à l’industrialisation, une esthétisation de la vie quotidienne aussi. On retrouve évidemment les traces d’une pratique de l’art décoratif dans la peinture de Thomson, mais sans caractère péjoratif aucun. On comprend davantage pourquoi Tom Thomson est un précurseur du Groupe des Sept. Les peintres canadiens lui rendront maints hommages et s’inspireront de son oeuvre et de sa vision de l’art. Si la mort prématurée de Thomson au lac Canoe aura contribué à la création d’une légende – venant ainsi rejoindre les héros et autres explorateurs ayant laissé leur vie dans les contrées sauvages -, sa reconnaissance ne fut pas que posthume. Très tôt, sa production a été soutenue par un mécène, le Dr MacCallum, qui fit don de sa collection au Musée des beaux-arts du Canada, d’où nous parvient cette belle excursion dans l’art et la nature. Le Musée d’Ottawa s’est associé pour l’occasion au Musée des beaux-arts de l’Ontario et les deux institutions ont publié un catalogue qui fait honneur aux oeuvres de Tom Thomson.
Jusqu’au 4 mai
Au Musée national des beaux-arts du Québec
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Bloc-notes
François Chevalier chez Madeleine Lacerte
C’est sa production des deux dernières années que présente François Chevalier chez Madeleine Lacerte. Exposition généreuse avec des dizaines d’impressions de goudron sur papier, résultant d’un travail tout en nuances aux formes floues vibrant sur la surface. Dans la série des collagraphies, des fractions de blancs et de noirs se disputent la surface et font se déployer à l’infini papillons et autres insectes. À voir chez Madeleine Lacerte, jusqu’au 3 mars.
L’art du bonheur
L’organisation de la seconde édition de la Manifestation internationale d’art de Québec annonçait récemment ses couleurs. C’est sous le thème Bonheur et Simulacres que se déroulera l’événement en mai, et de multiples collaborations avec les centres d’artistes de Québec sont organisées. De la liste des invités sélectionnés par le commissaire et journaliste Bernard Lamarche, nous retenons la Manifestation pour le droit au bonheur que prépare Folie/Culture le 1er mai (traditionnelle fête des travailleurs et des travailleuses) et le colloque que concocte le sociologue Guy Sioui-Durand. Entre autres invités: Rose-Marie Arbour (L’art qui nous est contemporain), et peut-être aussi – en pensée – le Dalaï Lama, qui sera vraisemblablement de passage à Toronto au printemps. D’ici là, comme l’écrivait Jacques Prévert, on se fera un devoir d’être heureux, ne serait-ce que pour donner l’exemple…