Jean-Paul Riopelle : Où commencer quand il n'y a plus de fin?
Arts visuels

Jean-Paul Riopelle : Où commencer quand il n’y a plus de fin?

Le contexte initial me semble un bon début. C’est à l’époque de Duplessis, de l’après-guerre et de la Révolution tranquille, qu’émerge JEAN-PAUL RIOPELLE…

Il y eut d’abord l’École du meuble en 1943, ou plutôt un certain professeur, Paul-Émile Borduas. Et ensuite, ce fut la propulsion, en l’espace de quelques années, avec la mouvance automatiste – issue du surréalisme et l’équivalent de l’action painting New-Yorkais -, la signature du manifeste Refus global, etc, etc… D’abord connu avec ses séries de "mosaïques" et de dripping, époque d’envolée qui ouvrira sur un nombre impressionnant de périodes entrecoupées de temps d’arrêts, de reculs, question de mieux se renouveler. Du début à la fin, fin que marque L’hommage à Rosa Luxembourg, Riopelle aura emprunté différentes routes, différentes techniques, toujours prêt à délaisser sa "dernière nouveauté" en quête de possibilités nouvelles, cherchant toujours et avant tout l’authenticité, la libération et le sublime. Et récemment, en 2002, Riopelle décède, laissant comme héritage son Ouvre définitivement monumentale.

Les traces de l’envol présenté à la Galerie Montcalm regroupe des oeuvres datées entre 1965 et 1992, dont Sans titre 1965 témoignant des débuts de la figuration, dix tableaux de sa série Les Coqs de 1968, période où il peint aussi la Montagne Sainte-Victoire, peinte à maintes reprises par Cézanne. Il y a aussi une série de sculptures datant de 1970, l’année suivant La Joute, sa célèbre fontaine-sculpture, quelques immenses oeuvres sur papier, fin 80, débuts 90 où il explore un nouveau médium, la bombe aérosol et les caches. Entretenant un rapport étroit avec la nature et les animaux, hiboux, oies, coqs, rondelles de bois, etc, composent l’imagerie personnelle de l’artiste, chacun rempli de charges symboliques comme la liberté sauvage, le dépassement et la fragilité de la vie. Comme pour signifier le quotidien, Riopelle inclut également des éléments tels des clous, des fers à cheval, des chaînes, etc, cohabitant tous le même univers.

Quelle que soit la période, le travail de Riopelle comporte toujours une recherche de spiritualité, se traduisant par une énergie intense et profonde, comme un feu sacré transpirant dans le geste de faire, à travers les textures, les couleurs et tout le reste. Disons que j’ai tendance à considérer Riopelle comme un shaman dans la mesure où il est capable de transcendance, de palper l’impalpable, de toucher l’insondable. D’ailleurs, André Breton disait (sur www.riopelle.ca): "Pour moi c’est l’art d’un trappeur supérieur". En ce sens, seul le senti peut nous faire comprendre, que ce soit lorsqu’il peint à la spatule par empâtements ou encore à l’aide de ficelle – comme le veut une tradition ancestrale inuit -, l’énergie y est toujours, tout comme une certaine séduction plastique et picturale.

Enfin, Sans titre de 1992, la plus récente toile de l’exposition n’a peut-être plus grand-chose à voir, de prime abord, avec ses mosaïques des débuts, mais quand on regarde le chemin liant le tout, il ne fait nul doute que Riopelle tiendra la route.

Jusqu’au 31 août
À la Galerie Montcalm
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