Le Corps transformé : Du revers de l'humain
Arts visuels

Le Corps transformé : Du revers de l’humain

L’exposition Le Corps transformé, mise sur pied par le Musée des beaux-arts du Canada (MBAC), inaugure les nouvelles salles d’art moderne et contemporain de la Cité de l’énergie à Shawinigan. Le lieu est superbe; les oeuvres le sont tout autant.

La Cité de l’énergie de Shawinigan, c’est de grands espaces industriels du début du siècle dernier cédés par la compagnie Alcan en 2001 à l’organisme sans but lucratif. C’est un des complexes industriels les plus anciens en Amérique du Nord. Les deux espaces qui sont désormais consacrés à l’art moderne et contemporain s’ajoutent à la vocation de mise en valeur du patrimoine industriel et scientifique de cette ancienne aluminerie située au bord de la Saint-Maurice. On ne peut que se réjouir de voir en "périphérie" des grands centres des bronzes de Rodin et de Picasso: "Le Musée des beaux-arts du Canada, lit-on sous la plume du directeur du Musée, Pierre Théberge, a accepté de participer à ce projet en présentant l’exposition inaugurale et ainsi avoir l’opportunité de remplir un des aspects de son mandat, qui consiste à propager la connaissance de l’art au delà de ses murs, partout au pays." On ne se plaindra pas ici du fait que le comté de Shawinigan soit celui du premier ministre Jean Chrétien, encore moins de l’attribution de fonds publics pour l’art. Il faudrait davantage reconnaître que le MBAC a concocté une exposition d’envergure internationale.

Une exposition qui nous fait voyager en première classe du début du XXe siècle jusqu’à aujourd’hui à travers une soixantaine d’oeuvres signées par de grands artistes. Le tout est mené avec poésie plus qu’avec didactisme. Mais surtout, la plupart des oeuvres parlent d’elles-mêmes. Une pierre deux coups: l’entreprise vise aussi à diversifier le tourisme de la région. Et c’est vrai que c’est une belle occasion de découvrir ce coin de pays tout en y retrouvant les Giacometti ou Degas. Leurs oeuvres nous introduisent élégamment à celles des contemporains, comme aux pièces de cette grande artiste qu’est Louise Bourgeois, avec Maman, 1999, une gigantesque araignée. Du haut de ses neuf mètres, l’insecte de bronze nous domine et nous protège en portant des oeufs de marbre en son ventre: une des pièces de résistance de l’exposition. Hyperréaliste, spectaculaire et troublante, l’immense Tête de bébé de l’artiste d’origine australienne Ron Mueck nous accueille avec éclat avant que l’on découvre les bronzes des plus grands artistes du début du siècle dernier. À mi-parcours, l’installation vidéo de Bill Viola, un des vidéastes contemporains les plus importants, jongle avec l’image et le reflet du plongeon (ou la chute?) d’un homme dans l’eau. On peut y voir aussi les photographies de famille de Geneviève Cadieux et entendre Motet à quarante voix, installation sonore de Janet Cardiff, point d’orgue du parcours.

Le Corps transformé regroupe des oeuvres du MBAC et une partie provenant de musées et de collections européens et américains. Une des forces de cette exposition est de présenter plusieurs pièces de la plupart des artistes. On peut y voir sept sculptures de Giacometti, six de Rodin, cinq d’Edgar Degas, quatre de Picasso, L’Échiquier de Germaine Richier et une sculpture de Matisse… Le bronze domine autant dans les oeuvres du début du siècle dernier que dans celles plus récentes, qu’on pense seulement aux Américains George Segal et Kiki Smith ou bien aux sculptures du Sud-Africain William Kentridge. Les huit pièces de Betty Goodwin nous introduisent à l’oeuvre de cette fameuse artiste montréalaise et, hormis la sculpture de Calder qui se confond trop avec l’environnement, l’ensemble des pièces – bronzes, photographies et vidéo – s’envisage avec facilité, nous amenant au coeur de l’univers des artistes. Le parcours propose des oeuvres de grande qualité esthétique, des oeuvres qui sont parfois très touchantes, voire bouleversantes, comme peuvent l’être certaines propositions de Louise Bourgeois et comme le sont aussi celles de Ron Mueck. Des corps fragmentés de Picasso jusqu’à la chute selon Bill Viola en passant par la force tranquille des danseuses de Degas, on revient, en effet, de Shawinigan avec une plus grande connaissance de l’art…

Jusqu’au 5 octobre

À la Cité de l’énergie de Shawinigan
Bloc-notes
Biennale internationale d’estampes contemporaine de Trois-Rivières
Pour qui s’intéresse à l’estampe, l’événement vaut sûrement le détour. La Galerie d’art du Parc et la Maison Hertel-de-la-Fresnière exposent pas moins de 300 estampes de 52 artistes provenant de 20 pays. Voir aussi les expositions hors compétition au Musée québécois de culture populaire, celles au Centre de diffusion Presse Papier et à la Galerie R3 de l’Université du Québec à Trois-Rivières.

L’art fonctionnel au jardin
Depuis trois ans, Matéria revient avec une exposition estivale consacrée au jardin. Sont réunies les propositions des artistes provenant de diverses disciplines des métiers d’art. On peut y voir des pièces d’André Bécot, Isabelle Dallaire, Micheline Soucy, Julien Delisle, Kevin Harding, Kathy Ouellette et Julie Savard. Jusqu’au 31 août.