Le Mois de la photo, 2e partie : Photos de famille
Arts visuels

Le Mois de la photo, 2e partie : Photos de famille

Notre critique poursuit sa visite et guide nos pas à travers la multitude d’activités du Mois de la photo.

Lady Di était-elle enceinte de Dodi al-Fayed lors de son fatal accident de voiture à Paris, en août 1997? La rumeur publique le voulait, et ce, même avant son crash au pont de l’Alma. Ce qui est sûr, c’est que l’enfant qu’elle aurait mis au monde aurait été dérangeant. Imaginez… La demi-soeur (ou le demi-frère) du prince William, futur roi d’Angleterre, futur chef de l’Église anglicane, aurait été à moitié arabe et, qui sait, peut-être musulmane… Aurait-elle porté le tchador? Shocking! Ce malaise tout hypothétique, puisque Di est morte, le public pourra tout de même le ressentir devant une série d’images de la photographe anglaise Alison Jackson à la Galerie Occurrence.

Prenant des sosies de Diana et de Dodi, elle a réalisé des photos du couple tenant sur leurs genoux un petit enfant basané aux cheveux foncés et tout frisés… Pas très anglo-saxon. Et ce n’est qu’une des séries réalisées par Jackson.

Les autres ne manquent pas non plus de piquant. L’une montre, comme captés par un paparazzi, Diana, le prince Charles et sa maîtresse Camilla Parker Bowles ensemble dans une même pièce… Ménage à trois? Les péripéties de la famille royale d’Angleterre deviennent chez Jackson tel un drame bourgeois digne du théâtre de boulevard, du théâtre d’été ou d’un mauvais soap américain. Elle ramène la fascination des Anglais pour cette famille au même niveau que celle des téléspectateurs pour Days of our Life ou Virginie

Jackson montre aussi un sosie du prince William avec une jeune fille qui, dans l’intimité d’une chambre, lui écrit sur son torse nu, au rouge à lèvres, le mot king en grosses lettres… Pas mal aussi est cette image d’un sosie de notre reine, Élisabeth II, à quatre pattes, en train de jouer avec ses chiens tout aussi racés qu’elle. Images différentes de celles de nos billets de banque et dont rêveraient tous les paparazzis du monde. Heureusement, le photojournalisme a aussi produit des icônes plus exemplaires.

Jusqu’au 18 octobre

À l’Espace Occurrence

Au salon avec Freud
Une petite visite chez Sigmund Freud vous plairait-elle? En juillet 1932, c’était possible. Pour à peine 2 francs. Le magazine Vu était alors "chez le professeur Freud" et publiait "un reportage photographique du plus haut intérêt". Avec entrevue!

Après s’être bien diverti chez Occurrence, le spectateur devra se rendre à la Maison de la culture Frontenac pour l’expo retraçant un pan majeur de l’histoire de la photo de presse. Intitulée Le Reportage photographique dans la presse illustrée: 1918-1939, cette présentation, en provenance de l’International Center of Photography de New York, donne à voir comment les magazines au 20e siècle ont permis la présentation au grand public de questions sociales, politiques ou intellectuelles grâce à la vision de photographes majeurs: Brassai, Margaret Bourke-White, Robert Capa, Henri Cartier-Bresson, André Kertész, Dorothea Lange et même Alexander Rodchenko, artiste constructiviste russe… Dans des revues comme Vu (fondée en 1928), Match (journal de sport transformé en 1938 et qui deviendra Paris Match après la Seconde Guerre mondiale), Life (fondée en 1936), Picture Post, Berliner Illustrierte Zeitung (et j’en passe), ces créateurs ont trouvé un espace bien plus accessible que les musées et les galeries.

L’expo n’a pas une approche naïve, elle traite autant du développement de techniques comme le photomontage que de l’usage de la photo comme "arme politique", incontournable outil de propagande. Jusqu’au 12 octobre.

À la Maison de la culture Frontenac.


Récit de voyages
Parlant de montages visuels et idéologiques, je vous incite à aller voir à la Galerie Optica le travail du Belge Johan Grimonprez, qui s’attaque à la représentation des avions dans les médias. Depuis plusieurs années cet artiste semble obsédé par ce mode de déplacement. Avec sa vidéo Dial H-I-S-T-O-R-Y, il effectue un survol d’un siècle de détournements aériens. Un regard très acide sur le traitement de ces événements par les médias en quête de sensationnalisme. Il souligne comment les nouvelles télévisuelles sont un type de récit avec ses structures narratives, au même titre qu’un roman. Grimonprez a d’ailleurs déjà comparé les nouvelles télé à un soap! Et il n’a pas tort. À la limite on pourrait presque dire qu’un détournement d’avion bien réussi est celui qui fait récit, avec ses anecdotes, portraits d’individus, moments forts et chute… narrative. La mort comme spectacle.

Jusqu’au 11 octobre

Au Centre d’art contemporain Optica