

KIT: missing mass : Un plan pas tellement rassurant
À la fois absurdes et apocalyptiques, trois installations de KIT forment une machination d’apparence autonome, à la fois ingénieuse et "dysfonctionnelle".
Suzanne Richard
KIT est, grosso modo, le fruit d’une collaboration mouvante de professionnels divers, auteurs, artistes, architectes, programmeurs, en provenances du Canada, du Royaume-Uni et de l’Australie. De passage en Outaouais en 1999 avec Greylands / Zones Grises (en collaboration avec Artengine), KIT mettait alors à la disposition du public un robot, Mobot, muni d’un système GPS permettant de le diriger, à partir du Web, sur les plaines Le Breton, question d’avoir vue sur ce paysage toxique, d’archiver ses composantes, etc…
L’atmosphère est futuriste, formée de plans graphiques et d’accessoires calculés. Des fabrications de tissus, que l’on pourrait prendre pour des vestes de parachutes ou encore des recouvrements de sièges d’auto, sont suspendues dans les trois salles, regroupées. Composées de trous, d’X taillés, de ceintures, d’équations mathématiques, ces fabrications, comme d’autres éléments, laissent transparaître une certaine aliénation. Par exemple, dans l’une des salles, au sol, juste sous ces fabrications de tissus, repose un kit de survie inutile, comprenant des câbles électriques neufs coupés de leurs fiches de branchements, des abris précaires, compacts et minces avec des igloos imprimés dessus tel un logo. Au mur, plusieurs dessins techniques montrent des structures transparentes et fragiles, placées sur le x d’une grille comme pour dire "je suis ici", s’affichant du même coup comme cible. Par l’ensemble de ces dessins, une séquence raconte en codes les différentes étapes du plan stratégique conçu pour se protéger d’un cercle rouge, anonyme.
Toutes les salles donnent, par le biais d’images, un point de vue complémentaire à l’autre, déterminent le champ d’opération dans lequel sont suspendus les "parachutes". Dans l’une d’elles, trois séries d’images, se rapportant au transport, l’habitât et les appareils scientifiques, occupent chacune un mur selon son propre domaine. Et, comme pour mieux se concentrer sur leurs applications, les éléments sont paradoxalement isolés de leurs environnements, flottants. L’installation en angle 3D de ces images ainsi que la prise de vue en courbe formée par l’ensemble évoquent le mouvement de la caméra de surveillance. Dans la troisième salle se trouve l’image d’un lieu désert, rouge, sablonneux et sans la moindre trace de vie apparente, imprimée sur le tissu d’une tente suspendue à l’envers. On dirait un parachute commun ou la terre flottante dans l’univers, tenant à elle, à l’aide de boyaux de plastique, les fabrications de tissus, têtes en bas. L’éclairage intérieur de la tente s’ajoute au tragique de la bande sonore entremêlée de bombes, de sirènes, de battements de coeur, qui deviennent, à l’occasion, matière à compositions technos.
Enfin, missing mass du collectif KIT, c’est un système de défense à assembler comme on assemble le meuble acheté chez IKEA. Sauf qu’ici, le plan ne permet pas de composer un stratagème qui saura se tenir debout, j’en ai bien peur. Car, malgré cette distance reliée au stade de l’hypothétique, il y a quand même du vrai là-dedans…
Jusqu’au 12 octobre
À Axe Néo-7
Voir calendrier Arts visuels