Les Emporte-pièces, de Yannick Pouliot : Trois étoiles
Alors que les vitrines se parent ces jours-ci de leurs plus beaux atours, YANNICK POULIOT occupe celles d’Engramme avec d’inquiétantes silhouettes. Ombres et lumières.
L’espace d’exposition d’Engramme a été transformé en boîte lumineuse. Impossible d’y entrer le temps que dure cette installation du jeune artiste Yannick Pouliot, étoile montante dans le milieu québécois des arts visuels. Si la porte fermée suscite maintes frustrations, il faut s’y résoudre: l’oeuvre ne se laisse voir que de l’extérieur, et la nuit tombée de préférence. Que de contraintes, me direz-vous. Mais cela fait partie du jeu auquel nous convie cette installation signalétique. Alors que Le Courtisan (2002) de Yannick Pouliot, présenté notamment à la Manif d’art de Québec en juin dernier, invitait les spectateurs à entrer dans une étroite cabine nous transportant, avec musique et décor, dans un Versailles condensé, ici, on est absolument exclu de l’oeuvre. Des formes découpées dans des toiles de plastique blanc occupent toutes les vitrines d’Engramme. Étoiles, corps, oiseaux, motifs choisis judicieusement par l’artiste comme autant d’icônes autour desquelles peuvent s’élaborer différents liens: "Ce qui m’intéresse, explique Pouliot, c’est de faire une histoire sans histoire." Pour confectionner son théâtre d’ombres, il a pris le chemin le plus court, réalisant ses silhouettes à l’aide de pochoirs. Lointaine référence aux procédés de l’estampe s’il en est – nous sommes tout de même chez Engramme -, l’exercice n’en recourt pas moins à certains caractères fondamentaux de la gravure: le plein, le vide, le négatif et le positif.
Cette occupation d’Engramme explore avec éloquence les qualités du lieu, quoiqu’elle ne produise pas l’effet saisissant du Courtisan: "Je ne peux pas toujours être sur le mode de la surprise!" précise l’artiste, qui sait combien on en redemande; combien sont grandes les attentes aussi. La force du Courtisan, que nous avions qualifié dans ces mêmes pages de "chef-d’oeuvre" (s’il est possible de s’exprimer ainsi!), a ouvert beaucoup de portes à Yannick Pouliot. L’oeuvre a été acquise par le Musée national des beaux-arts du Québec et on peut d’ailleurs en faire l’expérience puisqu’elle est actuellement exposée dans les aires publiques du Musée. Pendant la dernière année, Yannick Pouliot a eu l’occasion de faire ses classes dans les meilleurs lieux de production et de diffusion à Québec. Après une exposition dans la petite salle de l’Oil de poisson, il a réalisé et présenté des photographies chez Vu. L’été prochain, il participera à la deuxième mouture d’Artefacts à Montréal et exposera pour l’occasion son fameux Courtisan à Quartier éphémère, sans compter quelques projets de résidences à l’étranger. Reste maintenant pour cet artiste à incarner ses multiples (et bonnes) idées dans la matière, puisque, tel qu’il le dit lui-même, "c’est dans son exécution que l’oeuvre se livre".
Jusqu’au 7 décembre
Chez Engramme
Voir calendrier Arts visuels
Bloc-notes
Les trois grâces de Marcel Jean
À chacune de ses expositions, qui ne sont somme toute pas si fréquentes, Marcel Jean ravit par sa peinture, tant par la délicatesse, par la composition que par la couleur. À la Galerie des arts visuels de l’Université Laval, où il est un des plus anciens professeurs, Marcel Jean expose quatre tableaux d’une grande subtilité. À voir absolument. Jusqu’au 14 décembre.
Giorgia Volpe et Jean-François Côté chez Vu
Giorgia Volpe poursuit un travail très personnel réalisé cette fois lors de séjours de production chez Vu. Dans une série de portraits imprimés dans des formats modestes, l’artiste négocie tantôt avec une matière transparente, tantôt avec une forme organique, envisagés comme autant de "prolongements étrangers" à son corps. Ces états d’adhérence, comme l’indique le titre, sont exprimés avec beaucoup de justesse dans la bande vidéo.
Montées sur des boîtes de bois aux volumes variés, les photographies couleur de Jean-François Côté fonctionnent étonnamment. Dans chacune des oeuvres, l’ombre de l’artiste joue le rôle d’admoniteur et double la figure du spectateur devant diverses vues de la côte atlantique. Lire le très beau texte de Vivianne Paradis dans la publication accompagnant l’exposition. Jusqu’au 14 décembre prochain.
Vernissage à l’Oil
Inauguration de deux nouvelles expositions à l’Oil de poisson le vendredi 28 novembre à 20 h. Dans la petite galerie, des oeuvres de la Montréalaise Séfi Amir et dans la grande salle, une proposition de deux artistes marseillais, Pascale Mijares et Alain Domagala.
Les vendredis d’action au Lieu
Annie Lalande et Karen White procéderont en duo lors d’une soirée de performance au Lieu, le vendredi 28 novembre à 20 h. La première est d’origine franco-ontarienne; la seconde, anglo-jamaïcaine. Toutes deux font partie de la "génération montante" de "performeures". À surveiller: d’autres performances se dérouleront le 5 décembre prochain.