Stéphane Gilot : Les corps dociles
Arts visuels

Stéphane Gilot : Les corps dociles

Qu’est-ce qu’un bon citoyen? Un individu pacifié qui obéit ou un être qui sait se révolter contre des règles et des lois injustes?

Au cours des ans, la production de Stéphane Gilot s’est divisée en deux: d’une part, les interventions plus ludiques comme celle présentée dans le cadre de l’expo Le Fil d’Ariane, en 2000, représentant des espaces de jeux sportifs (volley-ball, basket-ball…); d’autre part, les installations moins sympathiques traitant de l’enfermement, de l’espace privé et public comme pièges – il en était ainsi, en 1999 à la Galerie Lilian Rodriguez, de L’Enlèvement, étrange espace qui traitait entre autres de la notion de kidnapping.

Je dois dire que je préfère le Gilot faisant dans l’espace oppressant à celui qui interpelle l’espace ludique et ses règles. L’aspect critique de son travail y est plus articulé, plus dérangeant.

Son Pavillon de réorganisation des sens va dans cette direction. Gilot nous oblige à réfléchir aux systèmes de répression qui tentent de transformer les individus (toujours pour leur bien, même s’ils ne le comprennent pas!). Dans cette structure, la science et souvent l’art, avec la peinture d’histoire ou religieuse, furent des outils bien utiles…

Pour son installation, Gilot s’est inspiré d’un livre, Plan d’évasion (1945) d’Adolfo Bioy Casarès, qui traite d’une colonie pénitentiaire où le commandant effectue des expériences sur ses prisonniers pour les rendre paisibles. Un homme condamné sans raison se retrouve dans un monde presque virtuel (thème que Casarès a aussi développé dans L’Invention de Morel) digne du film The Matrix.

Gilot a élaboré une installation en deux temps: d’un côté, une sorte de salle de surveillance; de l’autre, une sorte d’arène proche de celle utilisée dans le théâtre d’improvisation, mais avec des murs de miroirs et un sol composé de couleurs vives. Pour accéder à l’arène, le spectateur devra revêtir une combinaison colorée qui lui permettra de se fondre encore plus dans le décor… Le visiteur a alors le sentiment d’un renversement: les miroirs transforment l’espace fermé en espace gigantesque presque infini, l’arène d’étude et de surveillance devient espace de jeu où l’individu pourra se croire un moment libre de ses gestes…

La série télé Le Prisonnier n’est pas loin. À voir en relisant Surveiller et punir du philosophe Michel Foucault, tiens…

Jusqu’au 20 décembre
Au Centre d’exposition Circa
Voir calendrier Arts visuels