Qabaret QUARAALUKTUQ : Cabaret Neiges blanches
Le très éclectique événement Vasistas propose Qabaret QUARAALUKTUQ, une incursion gestuelle et musicale dans les traditions inuits.
Vasistas, de l’allemand "was ist das?" (qu’est-ce que c’est?), est devenu au 18e siècle le signifiant servant à désigner ce petit ventail mobile s’ouvrant devant une porte ou une fenêtre. Quand on ouvre le vasistas, c’est généralement pour faire pénétrer la lumière à l’intérieur. Le mot semble donc bien choisi pour représenter un happening dont l’objectif est justement de mettre en lumière le travail des artistes qui se questionnent présentement sur les enjeux d’une partie de la création contemporaine, actuellement fortement influencée par le mélange des genres et les nouvelles technologies. Reflet d’une société en pleine mutation.
Parmi les ateliers, installations, performances, présentations vidéo et spectacles qui nous seront offerts, se trouve le Qabaret QUARAALUKTUQ, mis sur pied par le musicien-compositeur Michael Reinhart. Cette création multidisciplinaire nécessite la participation du vidéaste Alain Francœur, de la chanteuse Robin Gorn, du jongleur Christian Harel et des chorégraphes-interprètes Chantal Lamirande, Motaz Kabbani, Mary Ann Lacey, Miki Nishida, Nadine Sures, Mariko Tanabe, Sara Wiskar et Lin Snelling, qui a bien voulu nous glisser quelques mots sur le projet.
"L’idée du Qabaret provient initialement d’un voyage que Michael et moi avons fait à Igloolik, au Nunavut. Nous y avons rencontré des artistes inuits qui ont bien voulu partager leurs richesses culturelles avec nous. Par exemple, nous avons été initiés à la technique du chant de gorge indigène et aux chansons ajaja de tradition uniquement orale. Un disque est alors né de cette rencontre entre le Nord et le Sud, entre l’ancestral et le moderne: Quaraaluktuq."
Durant la soirée, nous pourrons entendre les 11 chansons faisant partie de l’album. Dix d’entre elles seront animées par le mouvement des danseurs d’ici; la dernière, par un concept de vidéo live. L’esprit de cette musique des grands espaces nordiques se trouve aux antipodes de la musique électronique et souvent hyper-rapide à laquelle nous sommes habitués ici. Mais aussi, d’une majorité de chorégraphies contemporaines dans lesquelles une gestuelle en temps rapide est souvent mise de l’avant. "Pour nous, le temps semble étiré dans le Grand Nord, explique Lin Snelling. L’horizon est plat et s’étend à perte de vue. C’est vraiment différent d’ici. La notion de silence prend alors une tout autre dimension. Ça fait du bien et ça permet de se reconnecter sur l’espace intérieur du corps."
Le silence des profondeurs
Est-ce que cette nécessité d’une rencontre avec le silence n’est pas le fait d’une contemporanéité occidentale, typique des grands centres urbains accablés par la pollution visuelle et sonore que nous imposent dorénavant les nouvelles technologies et les médias de masse? Si oui, il semble que cette volonté artistique, en ce qui a trait à la danse, ait un point en commun avec celle de ses prédécesseurs. Car au début du siècle dernier, la danse (moderne américaine) d’Isadora Duncan et de Ruth Saint Denis avait déjà pour objectif "de reconquérir […] une authenticité et une vérité humaine […] égarées dans la fureur du progrès industriel", pour citer les propos de l’écrivain Thierry Vila (Paroles de corps, 1998).
Lorsqu’une création artistique attire ainsi notre attention sur les travers d’une société – qui n’ont visiblement pas été réglés – et qu’elle pose des questions et propose une ou des piste(s) de résolution, n’est-elle pas pertinente – voire nécessaire?
Or, si des œuvres d’une telle simplicité peuvent parfois nous paraître vides et irritantes, c’est peut-être parce que l’on a perdu (semble-t-il depuis un peu trop longtemps!) le réflexe de l’existence. Qui, contrairement à ce que la société matérialiste projette, ne consiste pas à consommer de manière compulsive l’objet de nos moindres caprices, mais plutôt à développer une relation humaine (d’écoute) avec autrui. Pour se connaître et se reconnaître.
Les 13 et 14 février
Au Théâtre La Chapelle
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