David Rabinowitch : Sésame, ouvre-toi… Toi-même, de répondre Sésame
"… Le sens d’une œuvre est identique à l’expérience qu’on peut faire d’une œuvre…", raconte DAVID RABINOWITCH à travers l’audio-guide du musée. Et effectivement, le sens de son œuvre est aussi simple à saisir…
Mais, en même temps, ce n’est pas si simple non plus, l’œuvre n’étant point simplette… Bien que chaque pièce semble au premier regard minimale, chacune s’avère complexe, comportant diverses tensions, des rapports à la physique, la philosophie, la géométrie, etc. Aux premiers abords froides et austères, les œuvres, sans fioritures, dévoileront petit à petit une chaleur, une certaine sensualité, une poésie céleste et spirituelle ouverte à une propre projection.
Artiste canadien empiriste s’inscrivant dans la tradition constructiviste, Rabinowitch débute sa carrière dans les années 60, explorant d’abord la peinture, puis la sculpture. Encré dans la réalité, son univers rejoint, à travers les plus simples dénominateurs, sur le plan universel. Il s’agit simplement d’explorer la composition, la constitution, la forme, le contour, la surface, la matérialité, le déploiement des œuvres, bref, d’y consacrer un temps d’observation suffisamment long pour que le regard puisse voir les choses telles qu’elles sont plutôt que comment elles devraient être. Et, il n’y a pas, tant sur les plans physiques et conceptuels de l’œuvre, de point de vue idéal, pas plus que de socles. En fait, quelques séries de sculptures planes obligent le spectateur à regarder l’art de façon inhabituelle, c’est-à-dire vu en plongée et parfois à genoux. "(…) Je considère le champ gravitationnel et le plan perspectif, explique l’artiste, comme deux modalités globales et complémentaires, essentielles à la construction d’une sculpture". À partir de ces deux conditions fondamentales se forme une relation entre la perception externe du spectateur et les composantes internes de l’œuvre, tout comme se dévoilent différents pôles d’un tout cohérent. Par exemple, la pesanteur des matériaux utilisés, en l’occurrence l’acier, s’allège par le morcellement organisé, par les trous percés dans un tuyau laissant infiltrer la lumière éclairant l’intérieur sombre, les ouvertures et les surfaces polies. L’horizontalité est en constant rapport avec la verticalité, comme on le voit avec les ouvertures de l’imposant monolithique Construction en bois quasi-conique avec ouverture, III (peuplier) 1966-67, ou encore par les trous traversant à la verticale Cylindre d’une masse 1969, un cylindre plein, collé au sol de tout son poids. Rabinowitch joue avec les lignes verticales, horizontales, obliques et courbes, formes géométriques et volumes pour les déployer dans l’espace, puis éventuellement dans l’esprit du spectateur. Les œuvres traduisent plusieurs dualités tel le haut et le bas, le devant et le derrière, le plein et le vide, l’ouverture et la fermeture des volumes, etc. La circulation autour des pièces est nécessaire à l’observation, car elle façonne la perspective de l’œuvre, accumule des points de vues physiques et virtuels, eux-mêmes en mouvement.
Enfin, Rabinowitch rend consciente l’expérience de regarder, nous oblige à revoir notre façon de percevoir les choses, à commencer avec l’expérience d’une œuvre se voulant égale à l’expérience que l’on en fait…
Jusqu’au 16 mai
Au Musée des beaux-arts du Canada
Voir Calendrier Arts visuels