Albrecht Dürer / Toucher l’art : Graver dans la mémoire
Avec Léonard de Vinci, ALBRECHT DÜRER fut l’une des premières stars du milieu de l’art. Une expo en provenance du Musée des beaux-arts d’Ottawa nous permet d’admirer sa grandiose production gravée.
Il y a des images qui font partie de la mémoire collective. L’artiste allemand Albrecht Dürer (1471-1528) en a produit plusieurs, dont ses autoportraits peints. Mais il a aussi réalisé, en gravure, des icônes de la culture occidentale. Vous connaissez certainement plusieurs d’entre elles: Le Rhinocéros, La Représentation de la Mélancolie, Adam et Ève, Saint Jérôme, Le Chevalier, la Mort et le Diable… Vous pourrez voir plusieurs de ces images gravées dans une expo du Musée des beaux-arts (MBA). Cela débute par la présentation des exemples de la série des 15 gravures sur bois de L’Apocalypse, réalisée en 1498, série qui lui assura la notoriété.
De nos jours, la gravure nous semble un art allant de soi. Quoique certains, comme le Québécois René Donais, dont je vous parlais il y a quelques semaines, sentent le besoin de se battre pour lui redonner ses lettres de noblesse dans le milieu de l’art contemporain. Mais la forme d’art est néanmoins reconnue. Il n’en fut pas toujours ainsi.
C’est à l’époque de la Renaissance que la gravure est véritablement née, représentant une révolution parallèle à celle de l’imprimerie. La gravure a alors joué un rôle fondamental dans la diffusion des idées et de l’art. À une époque où il n’existait ni musées, ni photographie, elle a contribué à faire connaître toutes les autres formes de réalisations artistiques. La gravure permettait d’appuyer la renommée d’un artiste, mais aussi de lui procurer un revenu et donc une certaine indépendance par rapport à l’Église, à la noblesse et à la bourgeoisie (très friande de cette nouvelle forme de création), qui avaient alors beaucoup de pouvoir sur les créateurs. À ce sujet, il faut écouter le court documentaire sur Dürer, présenté dans l’une des salles du musée, où il est décrit comment l’artiste se rendait avec sa femme dans des foires et des marchés pour vendre ses gravures.
Plus besoin de gardiens dans les musées?
Pendant que vous serez au MBA, profitez-en pour faire un détour par les salles de l’espace éducatif, où est présentée l’expo Toucher l’art. Pourquoi vous envoyer voir cela?
Un important galeriste de Montréal me parlait un jour de l’importance d’avoir un contact physique avec les œuvres d’art. Il m’expliquait qu’en les soupesant et en sentant leur texture, on développait une affinité plus grande avec la réalité de l’œuvre. Je crois qu’il a bien raison. Une œuvre, c’est plus qu’une image, c’est aussi une texture, une présence physique. Voilà pourquoi, en tant que professeur d’histoire de l’art, je souhaite toujours emmener mes étudiants dans les musées. Les diapositives, dans une salle de classe, ne rendent jamais tout à fait compte de la réalité matérielle de l’œuvre.
Cette expo, conçue au départ pour les personnes aveugles ou amblyopes, est donc une occasion intéressante pour nous tous. Avec des pièces de Geneviève Cadieux, Jordi Bonet…
Dürer
Jusqu’au 8 août
Toucher l’art
Jusqu’au 3 octobre
Au Musée des beaux-arts
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