Les Islomanes, Symposium en arts visuels : Sous le soleil exactement
Invitée sur une croisière nous menant jusqu’aux Îles-de-la-Madeleine, il n’y avait pas de meilleure façon, une fois les pieds sur terre, de découvrir les récifs, les caps et les dunes majestueuses de l’archipel en suivant le trajet emprunté par les œuvres in situ.
Un mois durant, neuf artistes ont arpenté les Îles, cherchant l’endroit idéal pour y construire leurs œuvres. Ainsi, land art, sculptures éphémères et autres projets ont été produits pendant le Symposium Les Islomanes (néologisme de L. Durrel défini comme un "dérangement de l’esprit" qui survient à la vue d’une île). Au cœur de ces lieux incomparables, les artistes sont intervenus avec modestie et tout le respect qu’impose ce territoire avec lequel il est difficile de rivaliser. Serge Dupreuil a soudé une sculpture d’acier sur l’épave du Corfu Island échoué sur les Dunes de l’Ouest en 1963. La sculpture de l’artiste madelinot traversera les saisons. Au Parc Jomphe, Christopher Varady-Szabo, Gaspésien d’origine australienne, n’a pas eu peur, lui non plus, du "travail physique". Il a construit un abri de paille, d’argile et de sable. À la fois sculpture et habitat, son architecture biodégradable possède ce caractère ambigu qui fait s’interroger sur sa nature: cela ne peut être que l’ouvrage d’un artiste… Même nature indécise dans l’installation de pierres de grès qu’André Lapointe a transportées du continent. Ces fausses pierres, il les a polies et les a déposées méthodiquement sur la plage de la Dune du Sud (une des plus belles). Elles sont rapidement disparues, fort appréciées pour leurs qualités sculpturales. Enfin, les commissaires Jean-Yves Vigneau et Vivianne Paradis ont eu l’excellente idée d’inviter un écrivain, Nicolas Dickner, dont on peut lire le récit de voyage sur le site www.islomanes.net, dans le but "d’élargir les pratiques in situ". Dickner réussit à partager ses déambulations avec les mots comme matériau. Ces textes sont d’ailleurs très bons. En outre, Jocelyn Robert et Alain-Martin Richard se sont joints à l’équipée en réalisant sept minutes quotidiennes à la radio communautaire locale, "sculptant le son", comme le dit si bien Jean-Yves Vigneau.
Quelques interventions auront lieu pendant l’été. Jusqu’au 11 juillet, le Centre d’artistes AdMare expose aussi les cahiers de bord de chacun des participants ainsi que les projets de Pierre Bourgault, qui poursuit son travail de dessin "automatiste" formé par ses trajets de navigation sur cartes marines. Quant à l’artiste anglaise Lilian Cooper, elle a dessiné les rochers des Îles, colligeant la côte sur papier, venant ainsi alimenter son projet d’esquisser toutes les côtes de l’Atlantique Nord! Enfin, sur la Butte du vent, Dominic Lefrançois, artiste madelinot, a installé de vieux bancs de cinéma, donnant un caractère hospitalier à ce point de vue qui embrasse presque toutes les îles de l’archipel. Quant à Steve Heimbecker, il a investi un des lieux les moins exotiques avec une structure signalétique. La peintre des Îles Marie Berger est sortie de son atelier et a coloré des bois de grève devenant girafe et autres figures ludiques. Le Symposium – comme la seconde édition de la Semaine des arts du cirque qui se déroule aussi en juin – participe au développement de nouveaux "métiers". Ils viennent s’ajouter aux plus traditionnels comme ceux de la pêche, de l’usine de sel ou de l’artisanat local. On constate surtout que ce territoire est fait sur mesure pour le land art…
Au Centre AdMare des Îles-de-la-Madeleine