Janieta Eyre, Jesper Just et les frères Sanchez : La somme de toutes les peurs
Arts visuels

Janieta Eyre, Jesper Just et les frères Sanchez : La somme de toutes les peurs

Janieta Eyre, Jesper Just et les frères Sanchez font partie de l’expo Fabulation montée par Marie Fraser au Centre VOX.

La deuxième exposition présentée par la commissaire Marie Fraser au Centre VOX tient bien mieux la route que la première, proposée en début d’été. La qualité des œuvres y joue pour beaucoup. Avec Fabulation, Fraser traite du fait que le réel n’est pas (et de loin) imperméable à l’imaginaire. Il est envahi par des récits, des fictions, des fantasmes, des peurs qui semblent prendre corps.

Le travail des frères Carlos et Jason Sanchez est à cet égard exemplaire. Même si leur photo The Gatherer fait beaucoup penser à Jeff Wall, il y a dans cette image une efficacité visuelle indéniable. On y voit un homme, seul, dans une pièce encombrée d’objets hétéroclites, pour la plupart des bébelles insignifiantes. Ça parle de l’insécurité dans nos vies personnelles, de la peur de jeter des choses, du poids de nos inquiétudes sur notre quotidien. Une image qui touchera beaucoup d’entre nous.

Les photos de Janieta Eyre, malgré un côté gore un peu trop souligné (une forme d’esthétique qui vieillit vite ces temps-ci à force d’être récupérée par plusieurs), sont elles aussi très intelligentes en regard du sujet. Un texte de présentation nous parle d’une jeune femme qui rencontre un homme obsédé par le fait que trois personnes sont toujours derrière lui… Grossesses, enfantements, relations amoureuses sont, chez Eyre, toujours hantés par des récits à la limite de l’effroi.

Le Danois Jesper Just nous montre comment, dans un univers masculin où il est encore mal vu d’exprimer ses émotions, certains récits préfabriqués peuvent être utiles. Atmosphère de films noirs et chansons populaires permettent de traiter avec justesse d’homosocialité. Le vidéo No Man Is an Island II est particulièrement réussi. La chanson Crying de Roy Orbison permet à un jeune homme de pleurer, avec en accompagnement les voix de quatre hommes âgés… Les vrais hommes ont des émotions. Les vidéos de Just (presque tous réalisés, mise en abyme amusante, dans des clubs de strip-tease, alors que VOX occupe un ancien cinéma porno…) sont des pièces importantes de cette expo.

On ne peut en dire autant du travail de Scott McFarland, dont l’esthétique très banale n’arrive pas à se retourner contre elle-même pour produire un regard critique.

Jusqu’au 16 octobre
Centre de l’image contemporaine VOX
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