Centre national d'exposition : Tour du chapeau
Arts visuels

Centre national d’exposition : Tour du chapeau

Le Centre national d’exposition inaugurait, samedi dernier, les trois nouvelles expositions qui occuperont ses salles jusqu’au mois de novembre.

D’une pierre trois coups. En un voyage en haut de la montagne, vous pourrez visiter trois expositions fascinantes.

1, RUE DES APPARENCES

Après avoir été présentée dans plusieurs villes de la province, dont Sept-Îles, Sherbrooke et évidemment Québec, 1, rue des Apparences s’arrête à Jonquière du 11 septembre au 28 novembre. Conçue par le Musée de la civilisation en étroite collaboration avec l’Office des personnes handicapées du Québec, "cette exposition se veut beaucoup plus sensible que pédagogique", mentionne Mme Claire Simard, directrice du Musée de la civilisation. En passant la porte de l’exposition, on entre dans la réalité quotidienne des personnes vivant avec un handicap, qu’il soit physique ou mental. On a voulu laisser la parole aux personnes handicapées – et à leurs proches – de façon à mieux faire comprendre comment elles reçoivent le regard des autres, comment elles perçoivent les comportements des autres vis-à-vis elles, comment elles vivent au jour le jour avec leur incapacité, quelle qu’elle soit. Afin de donner l’impression de partager une intimité, l’exposition a été imaginée comme un 5-1/2 dans lequel le visiteur déambule. Chacune des pièces évoque un aspect différent et particulier de la réalité d’une personne handicapée. L’entrée, par exemple, est prétexte à aborder les préjugés, alors que la chambre des maîtres traitera des délicats sujets de la sexualité, la vie de couple et l’inhibition. L’amour, la pitié et la méfiance sont quelques thèmes abordés dans la chambre d’enfants, qui contient plusieurs témoignages de parents et de proches vivant avec un enfant handicapé. La chambre d’ados est le lieu approprié pour parler de l’identité, de la séduction, de l’isolement et de la révolte, tandis que la salle de bain, avec ses miroirs, est le lieu idéal pour parler de l’apparence. "On ne le sait pas, mais dans la région, le nombre de personnes handicapées est l’équivalent de la population de la ville d’Alma, affirme M. Norbert Rodrigue, président-directeur général de l’Office national des personnes handicapées. C’est pourquoi il est si important d’aller voir cette exposition, de prendre contact avec la différence et d’y porter un autre regard", conclut-il.

TOHU-BOHU

L’exposition intitulée Tohu-bohu présente une sélection d’œuvres de l’artiste Serge Murphy s’échelonnant sur une dizaine d’années de production. Sculpter les jours, la pièce maîtresse de l’exposition, est aussi l’œuvre la plus récente. Elle se compose d’une soixantaine de petites sculptures disposées sur de grands tréteaux au milieu de la salle. Chacune des sculptures est fabriquée à partir de matériaux trouvés, recyclés, "des matériaux pauvres qui au départ n’auraient probablement pas été choisis pour faire une sculpture", raconte l’artiste. "D’une fois à l’autre, je les change de place, continue-t-il, je n’aime pas ce qui est figé." Parmi les sculptures, on reconnaît des objets ordinaires de la vie quotidienne, dévoyés de leur fonction première. "J’aime faire des mélanges", confirme M. Murphy. En effet, toutes ses œuvres se dessinent sous le signe des contrastes et des mélanges. Sabliers et Lacrymatoires, les 16 collages du mur de droite, mélangent toutes les techniques de peinture, de la gouache à l’aquarelle, le dessin, le noir et blanc ou encore l’abstrait et le figuratif. Même principe pour Le Magasin monumental, une série de reliefs abstraits, posés au mur. Abstraits, oui, mais toujours évoquant quelque chose de connu: un animal, un autel, voire une armoire à épices! "J’ai réalisé les gravures alors que j’étais invité par les centres de gravure Engramme et Graff. Encore une fois, j’ai essayé d’éviter de figer les œuvres en faisant plusieurs variations par superposition des plaques", mentionne Serge Murphy. Le tout créant une exposition bric-à-brac dans laquelle se côtoient le spectaculaire et l’ordinaire, la technique et l’urgence, l’ordonné et l’aléatoire. Un vrai de vrai tohu-bohu.

PETR MATASEK

C’est dans le cadre du Festival international des arts de la marionnette qu’est présentée l’exposition sur le travail d’un des scénographes les plus importants de la République tchèque, Petr Matasek. Invité d’honneur, en quelque sorte, du Festival, celui-ci est aussi le concepteur de la scénographie de la pièce La Tempête qui a été jouée au début de la semaine. L’exposition qu’il présente ici propose une rétrospective de son travail avec les théâtres tchèques. Des maquettes de décors, des marionnettes, des esquisses de plusieurs de ses projets, des affiches de multiples spectacles pour lesquels il a œuvré permettent au visiteur de côtoyer l’art dramatique tchèque contemporain. Ayant travaillé autant auprès de théâtres d’art dramatique que de théâtres de marionnettes, M. Matasek considère que la distinction entre les deux est inutile. "C’est la même chose. Il n’est pas nécessaire de faire la différence", est-il convaincu. Pour un comme pour l’autre, l’important, c’est de travailler avec l’équipe, de cerner les besoins, d’avoir le sentiment qu’il ne manque rien. Pour concevoir un espace scénique, Petr Matasek s’inspire des lieux, de la pièce, des acteurs. Loin d’être statiques, ses décors aident l’action, soutiennent l’acteur. "Je ne veux pas simplement décorer la pièce. Je veux trouver la beauté dans la fonction", explique le scénographe en montrant, par exemple, un décor conçu pour Le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare. Tout de noir, puisque c’est la nuit, la seule lumière émane de sous la scène, "comme le feraient des petits poissons fluorescents dans un marais. Ça évoque le côté magique de la pièce". L’exposition tout entière a un côté magique. En y entrant, le visiteur sera plongé dans un univers quasi onirique et déconcertant. Rien de banal.