Branka Kopecki : Au milieu de nulle part
Arts visuels

Branka Kopecki : Au milieu de nulle part

Branka Kopecki, avec Le Chant aux bains ambrés, réalise une de ses plus éloquentes expositions à ce jour. Visite obligatoire au 36 de la rue Couillard.

Celle qui s’intéresse aux "espaces qui existent et à ceux qui n’existent pas, utopiques et en même temps présents" a réalisé une superbe installation in situ dans l’espace de la Galerie Le 36. Aux murs: deux grandes photographies en couleurs. Au sol: deux bassins de verre remplis d’eau. Des photographies prises en mer où se devine le Rocher Percé. Les tirages, agrandis à l’aide d’un photocopieur, ont été re-photographiés avec les grands aquariums géométriques, tels d’immenses lentilles, devenant des éléments de la composition de la seconde prise de vue. S’ajoutent çà et là des poissons (vrais ou faux?) et des dessins de bateaux, eux aussi photographiés, donnant un caractère onirique au paysage. Mais il y a plus encore. Doublant cette dimension "narrative" des images, un travail de réflexion sur la photographie s’articule. Ici, pas de manipulation numérique ni de retouche, pas de Photoshop. Mais un travail de prises de vue, de manipulation, de photographies photographiées. Cela est à la fois très simple et intelligible. "Depuis longtemps, je travaille sur les rapports entre la photographie et l’objet, explique-t-elle. C’est une difficulté qui me motive." Le résultat n’est pas strictement celui d’une recherche formelle, mais participe d’une certaine poésie. Et peuvent s’élaborer de multiples dialogues entre les images et ce qu’elles évoquent, voire des délibérations sur les symboles, sur les différentes modalités de la présence de l’eau, notamment. Tout cela donne accès, en définitive, à la dimension réflexive de l’acte photographique.

L’artiste, née à Sarajevo, a quitté sa ville natale pendant la guerre en 1992. Entre ses recherches sur les paradoxes de la photographie et l’enseignement des arts, Kopecki continue d’élaborer une œuvre photographique. Elle recevait en 2003 le prix Événement de Videre, un des prix d’excellence de la culture de la Ville de Québec, soulignant la qualité des photographies présentées chez Vu. Devant ce travail récent où les photographies se répondent d’un bout à l’autre de la pièce et où les bassins (dont on devine que leur construction ne s’est pas faite sans difficulté) aux reflets verdoyants semblent creuser le sol, s’impose le sentiment que cela ne peut exister que dans un lieu précis. Que dans un espace d’exposition qui ne se définit pas seulement comme un lieu de présentation, mais comme celui d’une expérience. Et c’est là que les paroles de l’artiste prennent tout leur sens, lorsqu’elle dit "produire des choses possibles qui deviennent nécessaires".

Jusqu’au 24 octobre
À la Galerie Le 36
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BLOC-NOTES

LE THÉÂTRE DE LA MAISON CÉLESTE DE MARIETTE BOUILLET

L’artiste, d’origine française, présente en collaboration avec Antitube et toute une équipe d’artistes talentueux un événement multidisciplinaire qu’on peut pour le moment définir comme "une archéologie fantasmagorique" racontant l’histoire d’une maison abandonnée du quartier chinois de Québec. Convoquant vidéos, "théâtres de masques, d’ombres et d’objets", la chose invite les spectateurs à faire un exercice de contemplation. Trois représentations par jour, les 9 et 10 octobre (à 14 h, 16 h et 20 h 30). Au studio d’essai de Méduse.

SAMUEL ROY-BOIS À LA GALERIE DES ARTS VISUELS

Soixante-dix dessins au crayon sur papier (avec les traces de doigts d’usage) ont été fixés sur les murs de la galerie, peints pour l’occasion en rose. Joyeuse audace qui ajoute un peu d’envergure à cet "hommage terrifiant à la petite architecture" et qui permet aussi d’éviter le dépouillement total que la seule présence des dessins n’aurait peut-être pas comblé… Regard condescendant sur l’architecture vernaculaire ou œuvre hautement conceptuelle? Une chose est sûre, l’artiste en arts visuels, également musicien, remporte un certain succès dans les deux arts. Récemment invité à New York par la Fondation Chashama, qui lui a offert un atelier, il vit maintenant entre la métropole américaine et Montréal. Son exposition? Cool (dans le sens de "détaché"). Fractures mortelles jusqu’au 24 octobre à la Galerie des arts visuels

COPYRIGHT RUBENS

En guise d’événement marquant le lancement de la campagne de promotion de l’exposition sur le maître flamand, le Musée national invitait la presse à l’ouverture de quelques caisses contenant les précieuses gravures et une Vierge Marie à l’enfant Jésus endormi, peinte vers 1616. L’exposition s’annonce des plus instructives avec ses 115 œuvres, pour la plupart des gravures (les mieux conservées). C’est quand même rarissime de voir des œuvres de Rubens. On a l’intention d’en profiter et de s’intéresser à "l’art du grand imagier", un des grands peintres baroques, à qui on doit notamment d’avoir porté une attention remarquable à la diffusion de son œuvre par la gravure. À suivre, le 14 octobre prochain.