Suzon Demers : Théâtre! lorsque tu nous inspires…
Suzon Demers présente Théâtre! lorsque tu nous inspires…, qui associe trois disciplines artistiques, telles que le théâtre, la poésie et la peinture, dans une exposition plutôt étrange…
Art documentaire? Clin d’œil à l’art de peindre les portraits de famille avant la photographie? Art de la scène ou de la mise en scène? Suzon Demers, qui possède à merveille l’art de peindre, nous présente une exposition composite: tableaux qui frôlent l’expressionnisme, inspirés des pièces de théâtre mises en scène dans la région, parfois intégrés dans les costumes provenant de quelques-unes de ces pièces. À cette exposition est associé un livre publié par les Éditions Prises de parole, intitulé Des planches à la palette, où l’on retrouve les mêmes tableaux accompagnés des poèmes de Joël Beddows. Directeur artistique du théâtre La Catapulte, ce dernier s’essaie pour la première fois à la poésie, poèmes qui à leur tour sont inspirés des peintures. Labyrinthe interdisciplinaire où parfois on se demande qui s’inspire de qui, ou quel art donne naissance à l’autre. Ainsi, ce qui perd un peu le spectateur ou le lecteur du livre est l’origine même de l’inspiration: si toutes les peintures ne sont pas consacrées aux pièces de Joël Beddows, parfois l’artiste peint une scène d’une pièce de ce dernier, qui à son tour écrit sur le tableau. Un cercle, avec de constants retours en arrière, des retours à l’origine, thème que l’on retrouve dans l’origine franco-ontarienne de toutes les pièces de théâtre.
Y a-t-il là vraiment une réflexion sur l’identité franco-ontarienne? La publication du livre, par la maison d’édition phare de la lutte identitaire ontarienne, laisserait croire à une telle hypothèse, mais la peinture toute seule n’a ni la thématique ni la force d’une revendication de la sorte. Cette peinture est plutôt de nature documentaire ou représentative. Ainsi, l’artiste a assisté aux répétitions et a peint à partir des photographies. Comme Degas, qui se présentait aux répétitions de ballet pour étudier la lumière et l’expression des corps pour ainsi créer une esthétique propre à lui-même, Suzon Demers étudie les poses théâtrales. Cependant, à part représenter les pièces en s’appuyant sur une palette de couleurs séduisante, elle nous laisse sur notre faim en ce qui concerne la création d’une forme d’art en engendrant une autre.
Nous avons tendance à croire qu’il n’y a aucune appropriation de l’œuvre de départ. Le chemin entre le théâtre et la palette se réduit vite: les deux se confondent et nous sommes simplement à un moment X d’une répétition d’une pièce. Est-ce que ce chemin est tracé par la poésie de monsieur Beddows? Remarquons que les poèmes ont été rédigés plus tard, après l’œuvre picturale, et il semblerait que l’exposition doit se tenir seule.
Est-ce tout ce processus de création complexe qui laisse le projet stérile?
Dans ces dédales où les artistes de différentes disciplines se rencontrent, nous avons la forte impression que Suzon Demers fait de nous des témoins distants de la production théâtrale ontarienne, tout en voulant lui rendre hommage.
Jusqu’au 24 octobre
À la Galerie Montcalm
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