Valérie Blass et Frédéric Lavoie : Le bruit des choses vivantes
Arts visuels

Valérie Blass et Frédéric Lavoie : Le bruit des choses vivantes

Valérie Blass et Frédéric Lavoie ont investi la Galerie B-312. Deux incontournables de la rentrée 2005…

Je ne sais pas encore si la saison en arts visuels sera retentissante, mais elle sera à coup sûr bruyante et sonore. Cet hiver, il y a une prolifération d’œuvres auditives, ou tout au moins qui utilisent le son comme part essentielle de leur dispositif. Chez Oboro a déjà débuté l’intervention de Monique Jean (composée de 80 haut-parleurs) et on attend avec impatience l’expo Sons d’espace de la commissaire Nicole Gingras à la Galerie Leonard et Bina Ellen, dans les premiers jours de mars. L’intérêt est même d’ordre international, avec la gigantesque installation uniquement composée de bribes de paroles de Bruce Nauman à la Tate Modern de Londres (www.tate.org.uk/modern/exhibitions/nauman/) et l’expo sur l’histoire du son dans l’art du 20e siècle qui vient de s’achever au Centre Pompidou à Paris.

L’installation du jeune artiste Frédéric Lavoie investit ce champ de création avec justesse. Dans L’Angle mort, il met en scène des portraits de jeunes gens (ayant un petit côté Pascal Grandmaison) qui sont comme laissés à eux-mêmes devant la caméra. On a un sentiment de déjà-vu, les Screen Tests (muets) de Warhol ne sont pas bien loin. Mais il y rajoute une bande-son originale, composée uniquement de petits bruits du quotidien. Crissements de chaises, fous rires des unes ou des autres, bruits des ongles qui grattent la peau d’un bras ou d’une tête, voilà la petite musicalité inharmonique et très amplifiée qui compose cet espace sonore diffusé par quatre haut-parleurs. Parfois s’ajoutent des bribes de phrases pertinentes comme celle-ci: "Devoir attendre un événement semble augmenter sa valeur."

Cette œuvre nous permet en fait d’écouter le silence et ses petits événements. Voilà qui est rare. Et si nous étions plus qu’à l’ère de l’image, mais à celle du son omniprésent, avec la télé et la radio tout le temps ouvertes, le walkman et l’iPod partout en bandoulière, les ascenseurs musicaux (et j’en passe)?

Toujours chez B-312, mais dans la grande salle, l’expo Presque ça de Valérie Blass n’est pas à vrai dire sonore, mais elle contient néanmoins une pièce avec du son, et toutes les œuvres semblent faire référence à l’écho… Le vidéo montrant une structure de bois qui oscille trouve sa résonance dans une bande-son qui, à la première écoute, semble constituée des bruits du bois qui travaille, mais qui en fait tiennent plus de gargarismes et autres sons gutturaux (produits par la voix de l’artiste?). Le reste de l’expo est composé de sculptures jumelles où la texture convie autant le sens du toucher que celui de l’ouïe. Le travail de Blass sur le double est d’une inquiétante étrangeté. Ces sculptures ont quelque chose d’organique et de vivant. Dans ces doubles, il y a de la reproduction, comme celle qu’effectuent les microbes ou les organismes unicellulaires… Un univers presque monstrueux dans lequel on s’attend à tout moment à entendre un rugissement ou un grognement. Une réussite.

Jusqu’au 12 février
À la Galerie B-312

Voir calendrier Arts visuels