Brad Buckley : Société, société, tu m'auras pas
Arts visuels

Brad Buckley : Société, société, tu m’auras pas

L’artiste australien Brad Buckley parle d’étiquette, de conventions et de contrôle avec The Slaughterhouse Project. Quand l’art joue de la séduction, on succombe à la  tentation.

La Chambre blanche accueille dans ses lieux un des artistes australiens les plus réputés de l’art in situ. Brad Buckley parcourt le monde depuis 20 ans, installant son art éphémère et tout-ce-qu’il-y-a-de-plus-anticommercial à New York comme à Berlin. Il n’y a rien à vendre et rien ne sera vendu. Voilà un artiste contemporain exemplaire, une installation faite sur mesure pour la Chambre blanche, une occupation de l’espace tout à fait dans les perspectives esthétiques que le centre de la rue Christophe-Colomb aime à explorer. On se réjouit de découvrir l’art de l’artiste de Sydney qui, cette fois, traite d’étiquette comme d’autres fois il a traité de pornographie, toujours avec un regard critique et un certain humour. Toujours pour réfléchir aux façons dont "la société nous contrôle". Les installations architecturales de Brad Buckley, "professeur, artiste, un peu activiste", relèvent des arts plastiques tout en étant totalement émancipées d’eux. En recouvrant les murs d’un noir total, l’artiste "occupe et colonise le site". Au mur: les textes tirés d’un manuel d’étiquette donnent le ton: "Le plus important, au cours d’un dîner, est de savoir comment tenir sa fourchette et son couteau." Ou encore: "Les bananes se tiennent de la main gauche." De subtils mécanismes de contrôle nécessaires au maintien du pouvoir; clés de la réussite sociale; clés de la "compréhension" de l’œuvre (!).

En amont de cette occupation de l’espace mille fois réfléchie défilent des œuvres littéraires et philosophiques qui motivent et alimentent de manière indissociable la réflexion et l’art de Brad Buckley. Dans cet espace, qui n’existait pas hier et disparaîtra demain, le spectateur, le regardeur et l’amateur d’art seront sous le charme des néons, du dessin blanc sur le mur noir et des autres "appâts" absolument assumés par l’artiste. Mais on n’en restera pas là. Dans une anthologie de l’œuvre de l’artiste publiée en 2001, l’auteur Nicholas Tsoutas, directeur au Artspace de Sydney, écrit: "Chez Buckley, l’art est plus qu’un décor, il est central dans le discours politique et essentiel pour se connaître soi-même. Pour une meilleure compréhension de la société" (notre traduction). On s’attend à une inauguration pas tout à fait comme les autres dans l’environnement que Buckley a construit. Rendez-vous le vendredi 25 février à 20 h, en présence de l’artiste et d’Alexis Bellavance, qui fera pour l’occasion une performance sonore. Une intéressante occasion de se voir vivre en société, notre corps étant possiblement aussi un "site" et cet espace "érotisé", le lieu d’une expérience (phénoménologique!).

Jusqu’au 6 mars
À la Chambre blanche

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BLOC-NOTES

Entreposage domestique d’Amélie Laurence Fortin

"Ah! Quel bazar! Encore du bazar!" se dit-on en entrant dans le vaste espace d’exposition de l’Oeil de poisson. Ce premier refus bravé, il est possible d’apprivoiser le désordre. Dans ce brouhaha de ficelles, de vieilles fenêtres suspendues et de dessins aux murs, quelque chose se sent et se dit. Au cœur de cette organisation, il y a un semblant de sculpture: des bibliothèques surmontées de fenêtres nous font entrer dans une forme, qui est aussi le lieu de l’intimité de celui – de celle – y ayant laissé traîner deux ou trois tasses de café vides, un mégot, des pots de couleurs, un crayon… On parcourt les titres des livres sans trop d’intérêt. Et soudainement, nous sommes quelque part. La récipiendaire du prix Tomber dans l’œil en met plein la vue (à sa façon). À voir. Jusqu’au 20 février.

Bien inscrit dans l’espace exigeant de la petite galerie de l’Oeil de poisson, le Musée de la Nostalgie de Claudia Baltazar mérite aussi qu’on y regarde de près. Jusqu’au 20 février.

Sign Post

À voir chez Engramme, quelques eaux-fortes devant lesquelles on peut s’éterniser. Elles sont de Walter Jule. L’artiste d’origine américaine vit et travaille en Alberta depuis les années 70. Jusqu’au 20 février.

Vernissages…

"Inauguration" serait dans doute plus approprié que cette expression tirée tout droit du XIXe siècle. Peu importe, il y a quelques vernissages à ne pas manquer cette semaine:

Esthésio inaugure sa saison avec Dessous zéro d’Yvan Binet, un de meilleurs photographes de Québec, un des plus appréciés aussi. Le vendredi18 février à 18 h.

À la Galerie Le 36, Marcel Jean s’invite dans ses propres lieux. La réputation de l’artiste comme celle du professeur n’est plus à faire. Au rendez-vous, la recherche, la couleur et une des expressions les plus désintéressées de ce que peut être l’art. L’exposition sculptures intempestives débute le 18 février à 19 h et se poursuit jusqu’au 13 mars.

Chez Vu, on pourra apprécier notamment les photographies de Clara Gutsche à compter du 18 février. Inauguration dès 20 h.