Maclean : Signes de vie
Arts visuels

Maclean : Signes de vie

Maclean s’est fait connaître avec ses panneaux "ARRÊT" transformés en "A R T". Il fait une nouvelle halte à la Galerie Roger Bellemare.

Comme on parle de road movie, faudrait-il parler de road art ou, encore mieux, d’esthétique routière? L’artiste américain Tony Smith a déjà expliqué, il y a maintenant près de 40 ans, comment une promenade la nuit sur une autoroute avait changé sa vision de l’art. L’esthétique conventionnelle et les médiums traditionnels lui avaient semblé totalement finis. Et il y aurait beaucoup à dire sur l’expérience de la route (et même sur les voitures) comme source de réflexion pour l’art moderne et contemporain dans un esprit de négation d’une esthétique de la contemplation.

L’artiste franco-manitobain (mais qui vit à Montréal) répondant au simple nom de Maclean (et qui, lui aussi, a beaucoup voyagé, de jour comme de nuit) nous propose une exposition placée sous la direction inspirante des signes de la route. Toutes les œuvres de Maclean prennent des allures de panneaux de signalisation symbolique. Mais il s’agit de panneaux dont les pictogrammes auraient été revus par un ministère du Tourisme ou du Transport totalement post-moderne ou encore par un ministre converti au surréalisme (mais ne le sont-ils pas tous un peu, sans le savoir, avec leur étrange langue de bois?). Dans cette expo, Maclean poursuit sa réappropriation, avec un soupçon d’activisme, de ces indicateurs visuels qui régissent nos routes et l’espace public.

Un panneau, où l’on voit les mots "REST AREA", est composé de morceaux de tissus cousus comme un patchwork évoquant les anciennes courtepointes. Un art du réconfort? Au moment où l’État veut se retirer de plus en plus de tous les services (pour les remettre aux gentilles entreprises), cette affiche est presque drôle. L’État veut notre confort ou plutôt nous endormir? Plus loin, sur un autre panneau qui semble inviter à admirer le paysage, est écrit "L’AUBE", comme si le promeneur se devait d’attendre le petit matin pour mieux en apprécier la vue… Grâce à Maclean, le panneau routier touristique se révèle dans sa fonction de normalisation de l’expérience du paysage. Ici tel paysage est à voir, là telle route des vins est à suivre… Même le chemin des écoliers semble balisé. Dans ces panneaux, il y a plein de flèches et de directions à suivre, mais aussi de parcours possibles. Quel chemin emprunter? semble nous demander Maclean. Comment être à l’écoute de ce que les chemins de la vie nous réservent? Faut-il aller à droite ou à gauche? Résolument à gauche, même si nous sommes à l’ère du virage à droite… Mais par ici ou par là?

Surtout, n’hésitez pas à prendre le chemin du bureau du galeriste pour aller voir quatre ou cinq autres pièces de Maclean. Elles sont encore plus fortes. Un immense panneau, avec des étoiles, reprend la position du ciel lors de la naissance de l’artiste. Juste deux mots y sont apposés: Thank You. Que dire de plus? Très drôles sont aussi ces panneaux colorés, d’un ton très vif, indiquant par une flèche la direction à suivre pour aller retrouver un champ bien particulier, le "COLOUR FIELD" tant prôné par un certain art abstrait. Mais Maclean n’est pas dans le champ, il a trouvé sa voie et a su écouter les signes rencontrés sur sa route.

Jusqu’au 5 mars
À la Galerie Roger Bellemare

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