Design à gogo : Nostalgie d’un pays à gogo
Le Musée canadien des civilisations présente Design à gogo, une exposition qui examine le design et les métiers d’art canadiens des années 60.
L’exposition nous montre une panoplie d’objets conçus au Canada et qui ont marqué l’univers canadien des années 60. De prime abord, l’idée est bonne, mais les moyens sont peu efficaces. Nous n’arrivons pas à saisir s’il est question de style ou si nous avons affaire à une étude sociale sur les différents groupes qui ont composé cette société en pleine mutation.
Dès que nous pénétrons dans la seule salle de l’exposition, l’éclairage nous donne l’impression que les objets sont tirés de pages de magazines qui jaunissent depuis les années 60. Il y a un autre anachronisme: ces objets font toujours partie de notre environnement, au moins celui de nos chalets, ce qui semble curieux pour une exposition que l’on annonce comme la rétrospective du design canadien qui a permis au pays de sortir du bois afin de se définir comme une société moderne.
Un à un, ces objets recadrés dans un musée ne sont pourtant pas insignifiants. Revoir du macramé sans la poussière est quelque chose qui vaut la peine d’être vécu. Les quelques téléphones Contempra constituent aussi une joyeuse touche à l’exposition avec leur myriade de couleurs que l’on voyait encore récemment dans nos foyers. Et les quelques chaînes stéréo Electrohome et Clairtone satisferont ceux qui ont la nostalgie du mobilier aux formes expressives.
Malgré une bonne part d’objets et de meubles aux matériaux plus conservateurs, nous comprenons que le plastique, démocratisé à l’époque, était déterminant pour le style. Tout en étant une source d’inspiration et d’épanouissement pour les designers, il était aussi un leurre pour la production ainsi que pour la consommation.
Lampe en forme de point d’interrogation fabriquée par Danesco et conçue par Douglas Ball et John Berezowsky. Prêt de Design Exchange, Toronto. Photo: H. Foster, MCC |
La présence côte à côte du mobilier moderne d’influence scandinave et des œuvres des métiers d’art et de la contre-culture rendent le sujet principal de l’exposition moins évident, d’autant plus que la différence entre les objets groupés dans la catégorie des métiers d’art et ceux groupés dans celle de la contre-culture paraît très mince. Design à gogo semble rechercher davantage une raison historique de représenter le passage du Canada vers la modernité qu’une raison de questionner les objets en tant que tels.
Dans ce même ordre d’idées, on y explore le mobilier public conçu pour les nouvelles aérogares nationales. Cette avenue théorique a permis aux conservateurs de l’exposition de tracer un portrait fidèle de la volonté politique du gouvernement de réaliser ce changement stylistique dans les habitudes de vie du pays.
L’exposition semblera ne s’adresser qu’à une seule génération. Si pendant cette décennie le Canada était déterminé à s’offrir une identité moderne, qui répondait également au fait que les baby-boomers pouvaient alimenter un nouveau marché de la consommation, l’exposition ne retient rien de la véritable génération des années 60, communément appelée X, celle qui en a été le véritable spectateur et qui est le plus marquée, ayant été conçue au beau milieu de cet élan de la société canadienne.
Bref, pour les gens qui sont nés durant les années 60 et après, l’exposition n’a rien de spécial (mis à part le macramé); c’est tout ce que l’on connaît déjà sans la nostalgie que peuvent représenter ces objets, en rapport aux bouleversements des habitudes de consommation, pour ceux qui étaient de jeunes adultes à l’époque.
Jusqu’au 28 novembre
Au Musée canadien des civilisations
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