Marc Mayer : Ici, maintenant
Marc Mayer, le nouveau directeur du MAC, veut que son musée soutienne de façon encore plus marquée les créateurs d’ici. Deux expos estivales leur sont consacrées.
Par le passé, on a reproché au Musée d’art contemporain (MAC) de ne pas accorder assez d’importance aux jeunes créateurs d’ici. On se rappellera, par exemple, toute la fâcheuse polémique en 97-98 autour de De Fougue et De Passion, expo qui, selon certains critiques et artistes, en faisait bien peu et bien tard en ce domaine. Cet été, le MAC a décidé de faire les choses en grand. Nouveau directeur, nouvelles directions. Vous y verrez donc deux expos où nos artistes dominent et où les plus jeunes ont une place prépondérante.
Comme le disait en conférence de presse le nouveau capitaine du MAC, Marc Mayer, ce musée est une vitrine importante pour nos artistes auprès des visiteurs étrangers qui, l’été, représentent près de 70 % de la clientèle de cette institution. Si nous voulons que nos créateurs aient une réputation hors frontière, il faut commencer par les défendre nous-mêmes, non?
ART ET SECRET
Débutons par L’Envers des apparences. Voilà une expo où se cachent des secrets. Elle pourra vous sembler parfois hermétique, mais elle vous séduira si vous prenez le temps de jouer le jeu en essayant de résoudre le mystère que plusieurs pièces recèlent. J’ai plusieurs réserves à émettre au sujet de certaines interventions, mais voici néanmoins un événement comme on devrait en avoir plus souvent à Montréal et qui fait un grand (et nécessaire) bilan de notre création artistique. Bien que le titre de l’expo soit un peu facile, le commissaire Gilles Godmer y pointe par-là un sujet important: l’œuvre contemporaine poursuit son repliement sur l’idée de secret.
Soulignons les prestations les plus remarquables parmi celles des 11 artistes à l’affiche. Parmi les pièces à ne pas rater, il y a bien sûr Le Courtisan de Yannick Pouliot, œuvre qui fit les beaux jours de la Manif d’art 2 en 2003 à Québec. Un dispositif fabuleux sur la notion de prestige. Je ne vous le décris pas plus, je laisse à ceux qui ne l’ont pas encore expérimenté le plaisir de la découverte. Et Pouliot n’est pas l’artiste d’une seule œuvre, comme on en voit souvent. Il s’affirme, de plus en plus, comme un créateur incontournable de la scène québécoise. Sa série Couloirs, photos montrant des hôpitaux, est aussi très réussie. Un jeu visuel sur le dédale. Moins fort est son sofa victorien boursouflé, qui se rapproche du travail de Nina Saunders, présenté au même MAC en 2000.
Jérôme Fortin poursuit son travail minutieux et obsessionnel sur la récupération, la réappropriation, le recyclage. Il représente quelques-unes de ses meilleures pièces et une nouvelle (Écran), composée de bandes dessinées manga qui, dans un jeu de pliage, se transforment en une calligraphie énigmatique.
Puis, allez voir Light Works de Taras Polataiko (de Vancouver). Dix lumières encastrées dans les murs s’allument et s’éteignent. Si vous lisez attentivement la notice explicative, vous découvrirez que ce sont 10 personnes "ayant commis des infractions à la loi" qui, assises sur des bicyclettes (munies de dynamos), génèrent l’électricité de ces ampoules en guise de travaux communautaires. On pourra être choqué par tout ce dispositif, mais l’artiste offre, dans l’art, un espace échappatoire au système judiciaire.
ACQUISITIONS
Pour compléter votre parcours de la création canadienne, vous pouvez aussi visiter Questions de temps et d’espace, expo qui regroupe 13 œuvres nouvellement acquises. Il y a, bien sûr, des étrangers incontournables, comme William Kentridge (son expo au MAC fut extraordinaire) ou James Casabere (artiste de moindre envergure). Mais il y a aussi une flopée de créateurs d’ici. Notons que le MAC a acheté une des meilleures pièces de Pascal Grandmaison, Solo, qui est composée d’un immense miroir où c’est le visiteur qui devient œuvre d’art. Vous y trouverez aussi des œuvres de Martin Bourdeau, Denis Farley, Henri Venne, Lynne Cohen, Serge Tousignant…
Le Mac a pris clairement le parti de défendre les artistes d’ici. C’est très bien ainsi.
Jusqu’au 11 septembre
Au Musée d’art contemporain
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