Gilles Kègle, l'infirmier de la rue : Au cour de Saint-Roch
Arts visuels

Gilles Kègle, l’infirmier de la rue : Au cour de Saint-Roch

Gilles Kègle, l’infirmier de la rue, expo présentée à la Galerie Rouje, regroupe une vingtaine de photographies qu’Éric Côté a croquées dans le vif de l’action. Documenter  l’urgence.

Éric Côté

a accompagné Gilles Kègle dans ses tâches quotidiennes pendant des semaines. L’infirmier de la rue, bien connu dans Saint-Roch pour le travail de soins à domicile qu’il pratique depuis son arrivée à Québec en 1984, se rend chaque jour, sept jours sur sept, en vélo comme à pied, chez des gens esseulés, malades, isolés. Un livre sur Kègle publié cet hiver et son passage à l’émission radio-canadienne Tout le monde en parle l’ont fait connaître bien au-delà de la Basse-Ville. Les photographies d’Éric Côté nous en apprennent un peu plus sur l’action de cet homme hors du commun, et sur Québec.

L’action de Gilles Kègle, c’est aussi une maison: la Maison Gilles-Kègle, située au croisement des rues Saint-Joseph et du Pont, où sont distribués chaque jour médicaments, vêtements et nourriture. Gilles Kègle n’agit pas seul dans cette œuvre charitable. Une trentaine de bénévoles s’activent avec lui, des bonnes sœurs et des stagiaires en médecine de l’Université Laval. Certains bénévoles y ont trouvé une vocation, s’engageant par la suite dans Médecins sans frontières ou partant en Inde œuvrer avec l’équipe de mère Teresa. Ce n’est pas étonnant! La seule vue des photographies qu’a prises Éric Côté aiguise la conscience sociale: elles instruisent, elles touchent, elles révoltent. Ces photographies nous font voir ce qu’on ne voit jamais. On ne peut que convenir que le travail de Gilles Kègle est extraordinaire et essentiel, et qu’il est en même temps symptomatique de sérieuses failles dans notre système.

Éric Côté, photographe de rue et réalisateur caméraman à TQS, a voulu éviter tout voyeurisme. Plutôt que de mettre l’accent sur la pauvreté, le regard du photographe montre davantage le partage, l’entraide, l’humanisme de l’action de Gilles Kègle. Le reportage de photographies prises en 2004 et 2005 n’a en effet, et fort heureusement, rien de sensationnaliste. Le résultat est sobre, l’approche, sensible, et le résultat, subtil. Éric Côté possède une certaine expérience. Il a photographié la ville de Québec et son activité urbaine depuis plus de 10 ans, toujours avec le même souci d’y mettre l’humain à l’avant-plan. En passant de la rue à l’espace privé, le photographe n’a pas eu peur de se rapprocher de ses sujets.

Au Québec, la photographie documentaire a connu ses belles heures dans les années 70 avec les Gabor Szilasi, Clara Gutsche et Michel Campeau. Elle était socialement engagée. "Aujourd’hui, comme l’explique fort à propos Éric Côté, la photographie documentaire est plus contemplative. Ce sont souvent des portraits. De grands formats." Ce que propose Éric Côté est cependant plus classique. De l’impression à la présentation, des prises de vue aux tirages. C’est plutôt conventionnel. Mais c’est un parti pris de photographe. Ces photographies s’effaçant presque devant leurs sujets, elles se font modestes et discrètes. Elles ne crient pas haut et fort leur existence. On pourrait dire que cela les rapproche du sujet dont elles parlent. Elles sont engagées par la force des choses.

Il va sans dire, on est ici à mille lieues d’un cliché du Château Frontenac. Le sujet est essentiel, urgent et fondamental. Il s’agit de la vie, de la mort, de la condition humaine. Ces photographies ont aussi une autre qualité. Celle d’être sans prétention aucune, si ce n’est d’être au service d’une cause des plus nobles. "Des gens crèvent seuls dans leurs logements en bas de la falaise!" scandent ces images, scande le photographe. Parce qu’elles sont présentées au cœur de Saint-Roch, parce qu’elles montrent ce qui se passe à l’ombre des beaux bâtiments qui se construisent, cette exposition prend l’allure d’un événement. L’inauguration a lieu le jeudi 16 juin chez Rouje à compter de 17 h.

Jusqu’au 3 juillet
À la Galerie Rouje

Voir calendrier Arts visuels

ooo

BLOC-NOTES

Philanthropie sur Grande Allée

Le musée de la Grande Allée a récemment acquis La Tour, un bronze de Riopelle. La sculpture de 1969-1970 fait partie d’un ensemble, La Joute, dont le déplacement récent de l’est de Montréal au centre-ville de la métropole a suscité tout un débat. La Tour (une édition de 1974) s’ajoute à d’autres éléments de La JouteLe Hibou, Le Chien et L’Ours – que possédait déjà le Musée national des beaux-arts. Le parc de sculptures du Musée, qui comprend un peu plus de 15 œuvres, portera désormais le nom des enfants de Pierre Lassonde, mécène principal de cette dernière acquisition: Julie et Christian Lassonde.