Le Ciel : À la croisée des chemins

L’inauguration officielle du Centre international d’exposition de Larouche a eu lieu récemment. Depuis, il abrite Le monde entier est pourri, une exposition d’art contemporain à la fois historique, politique et poétique, sur le thème, exploité de façon large, des mouvements noirs des années 60 aux États-Unis.

Ce nouveau centre qui vient de voir le jour à Larouche s’inscrit dans cette vaste opération amorcée il y a quelques années déjà, entre autres avec la construction du Restaurant Le Margot. L’objectif ultime: faire de Larouche un beau village; certains parlent même de village-musée. Bref, faire en sorte que les gens s’y arrêtent, le visitent de fond en comble, en parlent à leur amis, y envoient leur famille, y reviennent eux-mêmes; faire de Larouche la place où être au Saguenay-Lac-Saint-Jean. L’an dernier, Manon Guérin, coordonnatrice du programme Villes et Villages d’art et de patrimoine, a d’ailleurs été engagée par la municipalité afin d’accélérer ce processus.

Derrière cet ambitieux projet qui est en train de convaincre même les plus sceptiques s’affaire un businessman qui a fait ses preuves, un artiste, un visionnaire, Claude Simard. D’abord et avant tout, Claude Simard est un homme qui aime son village natal et qui lui est resté attaché même après toutes ces années à New York où il a connu le succès. "Pour moi, c’est important de redonner ce que j’ai à ma communauté. C’est juste naturel", insiste l’artiste, des idées de développement plein la tête. "Je suis comme un bûcheron qui va gagner sa vie dans les chantiers et qui rapporte l’argent dans son village. Je vais bûcher à New York et je reviens investir ici", illustre-t-il. Il entend prouver que la culture rapporte, et qu’elle est possible en région autant qu’ailleurs. "J’espère que Larouche donnera l’exemple et que les autres villages de la région auront envie de se doter d’endroits attirants, de miser sur la culture eux aussi. C’est important pour moi de le faire. Je veux changer le cours de la roue de la négativité et je suis convaincu que c’est possible par la culture", continue-t-il.

On écoute cet homme sensible, en ébullition, parler de l’importance de croire en sa communauté, et on le croit. Importer des temples indous ou un presbytère patrimonial, on le croit. Andy Warhol à Larouche, on y croit, on le voit.

LE MONDE ENTIER EST POURRI

Claude Simard

L’idée qui lui trottait dans la tête depuis quelque temps – il confie s’être toujours intéressé à la politique – s’est imposée avec le gouvernement actuel en place chez nos voisins du sud. "On pensait que Reagan était à l’extrême droite, mais on n’avait rien vu!" se désole, s’alarme presque, le commissaire de l’exposition. Pendant trois ans, il a réuni les pièces qui la forment, cueillies aux quatre coins du monde. Le résultat est d’une intensité presque insoutenable, une charge émotive due à la force des propositions. Heureusement des "temps de repos", selon les termes du concepteur, créés par les installations et les sculptures, œuvres plus poétiques, plus symboliquement politiques, font baisser la tension. Tout est calculé dans l’alternance des œuvres. Elle se parlent, s’interpellent, "elles dialoguent ", dira Claude Simard. Côte à côte, elles créent un nouveau sens.

L’exposition arrive de New York où elle a été appréciée ce printemps. "Le fait que je sois Blanc et francophone – donc que je sois moi-même une minorité – m’a donné le droit, en quelque sorte, d’aborder ce sujet encore tabou", analyse Claude Simard. Après Larouche, elle prendra la route pour une tournée américaine qui la mènera dans les plus grandes galeries, les plus prestigieux musées. Pour l’instant, elle est au Ciel.

Jusqu’au 5 septembre
Au Centre international d’exposition de Larouche

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