World Press Photo : Toute la misère du monde
Arts visuels

World Press Photo : Toute la misère du monde

C’est le 50e du World Press Photo, le concours le plus prestigieux en photojournalisme. Et la Parisian Laundry permet de voir les photos primées…

Certains photographes de presse vous diront que nous ne vivons pas le moment le plus fort du photojournalisme. Les journaux et revues réduisent de plus en plus l’espace qui lui est dévoué, les divers politiques et gouvernements tentent de contrôler de plus en plus leur image (et encore plus strictement celle de leurs guerres) et puis, dernier coup du sort, des photos prises par de simples citoyens lors de catastrophes avec des téléphones munis de caméras font la manchette… Est-ce la fin du grand reporter photo? N’aurons-nous plus de nouveaux Robert Frank, Robert Capa, Dorothea Lange? Malgré toutes ces limites, la photo de presse est bien vivante et elle a quelque chose à dire.

Cette année, le jury du World Press Photo a dû choisir parmi 70 000 images prises par 4266 photographes en provenance de 123 pays! Ce sont les sections qui parlent de l’actualité politique et sociale qui volent, bien sûr, la vedette. Les lauréats nous y montrent comment la photo journalistique peut être engagée, porteuse d’une réflexion sociale forte. Dans ces sections, presque toutes les images contiennent un petit récit poignant.

Vous serez troublés par ces images de l’Allemand Michael Wolf qui traitent de l’exploitation des ouvriers en Chine, clichés qui rappellent les pires moments du capitalisme en Occident. Vous y verrez des hommes amputés de leurs bras et de leurs mains, une vignette vous rappelant que "dans les seules usines de Shenzhen, 27 personnes par jour perdent une partie de leurs membres"! Le Sud-Africain Brent Stirton montre avec finesse et sans voyeurisme une fillette noire qui fait partie des "15 millions d’enfants à travers le monde qui ont perdu père et mère ou l’un deux" des suites du sida. Et puis un peu plus loin, l’États-Unien Adam Nadel documente les événements du Darfour où "deux millions de gens ont dû fuir leur nation" et où "150 000 sont morts depuis 2003". Et la liste se poursuit de plus belle. Il faut dire que l’actualité ne manque pas de sujets: victimes des troubles sociaux à Haïti ou du tsunami en Indonésie, soldats états-uniens blessés, amputés ou défigurés en Irak…

Souvent, ces images montrent des récits de courage. Tel est le cas de celles du Britannique Bob Martin, qui a capté Xavi Torres, nageur espagnol amputé de ses quatre membres, alors qu’il plonge dans l’eau lors d’une compétition des Jeux paralympiques à Athènes, laissant sur le bord de la piscine ses prothèses.

Voici l’une des meilleures éditions de la WPP. Les images sont bien regroupées; l’assemblage de plusieurs clichés, parfois plus petits, du même photographe dans un même cadre rend la présentation plus complète.

Cette exposition est accompagnée de deux autres événements qui valent eux aussi le détour. Une première section est dédiée à de jeunes créateurs afin de promouvoir la relève. Ils ont été invités à participer à un atelier photographique où ils sont reçu une assignation. Voilà une belle idée. Dans La Vie secrète des adolescents, reportage sur les jeunes, de nouveaux talents se font remarquer dont Levon Schuller et Christian Lamontagne, qui ont remporté les deux premiers prix. Et puis au sous-sol du bâtiment, la photographe Ami Vitale fait l’objet d’une mini-rétrospective. Elle nous montre des images des quatre coins du monde dont plusieurs prises au Cachemire. www.parisianlaundry.com

Jusqu’au 29 octobre
À la Parisian Laundry (3550, rue Saint-Antoine Ouest)
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