LE CIEL S’OUVRE SUR LA VILLE
Lors de sa dernière exposition, le Centre international d’exposition de Larouche (CIEL) nous a préparés à des expositions hors du commun. Déjà, la richesse et la pertinence des œuvres et des objets présentés, ainsi que la renommée des artistes dont le travail était exposé (nous nous souviendrons d’un Andy Warhol, précurseur du pop art), avaient ébloui plusieurs amateurs d’art contemporain. Jusqu’au 20 décembre, le CIEL nous offre une nouvelle chance de découvrir le travail de plusieurs artistes de renom. En effet, la présente exposition regroupe des artistes contemporains de tous les horizons. L’exposition est très éclectique, tant par la liste impressionnante des créateurs que par la variété des médiums utilisés: dessin, sculpture, photo, vidéo… Sous le titre presque naïf de "Vivre en ville" sont regroupés des points de vue lucides et mordants qui nous confrontent à une lecture brute du réel. L’art est ici un prétexte pour nous faire voir le monde tel qu’il est: chaque œuvre est une fenêtre à guillotine où l’on passe la tête non sans une certaine crainte. Les armes deviennent une façon d’aborder le monde, reflets froids de la vie et des structures sociales. Le corps en a aussi pour son compte alors qu’il se voit masqué ou déconstruit au point d’être méconnaissable.
Parmi les œuvres présentées, mentionnons une photo de Nan Goldin, de cette série où elle a jeté un regard presque distant sur la mort prochaine d’amis souffrant du sida. Comme pendant la première exposition du CIEL, le racisme demeure une préoccupation incontournable. L’œuvre de Kevin Ei-Ichi Deforest, une myriade de peintures sur des pochettes de disques de vinyle, questionne entre autres la définition du racisme. L’énoncé "Chez nous, c’est chez moi aussi" est alors associé à un "racisme de pure laine". D’autres œuvres proposent une vision plus ludique, c’est le cas d’une sculpture de Jeff Koons, qui s’oppose à son environnement d’exposition. L’imitation solide d’un ballon gonflable auquel on aurait donné la forme d’un chien contraste violemment avec les photos de la salle où des hommes nus exhibent un sexe dangereusement exposé.
Cette nouvelle exposition oblige une prise de conscience brutale de la vie en ville, c’est-à-dire du rapport à entretenir avec un monde qui nous fait violence. Un bouleversement à ne pas manquer.
ooo
PLAISIRS ABSTRAITS
Les couleurs et les textures de l’installation de Marie-Claude Bouthillier sont tout simplement remarquables. Photo: Centre national d’exposition |
Jusqu’à tout dernièrement, le Centre national d’exposition présentait l’œuvre de Guido Nincheri dans le but affirmé de donner une nouvelle visibilité au patrimoine religieux. Même si l’exposition est terminée, on projette déjà de la faire revivre, probablement pendant l’été, peut-être sous une autre forme. En attendant, il vous reste une chance de visiter l’exposition de la dixième Expérience photographique internationale des monuments 2005, qui se termine le 20 novembre. Le projet trouve à sa source un concours organisé en 1996 par le gouvernement catalan. Des jeunes de 9 à 23 ans provenant de plusieurs pays du monde, grâce à un encadrement adéquat, se sont approprié leur patrimoine. La qualité de plusieurs photos est déroutante.
Avec l’espoir que les enseignants arrivent à s’entendre avec le gouvernement et qu’ils mettent fin au boycott des activités culturelles, les responsables du CNE ont décidé de prolonger l’exposition intitulée L’abstraction: une manière de voir. Un programme éducatif exceptionnel dort sur les tablettes en attendant le retour des groupes scolaires. Ceux qui ont la chance de s’y rendre sont confrontés à des œuvres qui interrogent la façon dont nous pouvons percevoir ce qui nous entoure et qui permet d’envisager le langage artistique abstrait comme une fenêtre nouvelle s’ouvrant sur une réalité telle que nous avons rarement la chance de l’apprécier.
Grâce à la participation du Musée national des beaux-arts du Québec, qui a organisé et mis en circulation l’exposition, certaines œuvres d’artistes qui se sont inscrits parmi les grands noms de l’art québécois sont présentées au public de la région: l’une des cibles de Claude Tousignant, reconnu pour la richesse de ses couleurs et le pouvoir attractif de ses œuvres, une série de peintures de Guy Pellerin, qui a reçu pour ce projet le prix Ozias-Leduc 2004, etc. Souvent frappantes de simplicité, elles n’en demeurent pas moins des œuvres d’une qualité exceptionnelle. Les couleurs et les textures de l’installation de Marie-Claude Bouthillier sont tout simplement remarquables. Quelques bouts de bois, une plage et des ombres permettent à Serge Tousignant de signer un ensemble photographique qui laisse des traces. Cette semaine, laissons ouvrir notre perception du monde et flirter notre imaginaire avec ces univers éclatants.