Main mise : Cuirasse et tendresse
Arts visuels

Main mise : Cuirasse et tendresse

Main mise déroute, réjouit et étonne chez Esthésio. OEuvres récentes de François Morelli.

La production de François Morelli ne m’avait jamais autant interpellée. C’était avant de voir ses œuvres récentes chez Esthésio. François Morelli y présente un ensemble d’encres et de dessins sur papier accompagnés d’étranges objets. Des sculptures de cuir faites de ceintures usagées que l’artiste a récupérées et tressées pour former de drôles d’objets qui ne cachent pas leurs origines. Elles ont un statut tout à fait ambivalent, ces choses, et cela leur donne beaucoup d’intérêt. Tout est dans ce risque formel qui permet d’ouvrir à une multiplication des possibilités de significations. Sculptures de cuir aux connotations sexuelles, objets de jeu ou de lutte: ce matériau chargé de sens favorise les dérives interprétatives. On apprendra que ce sont en fait, et plus simplement, des marionnettes. Des têtes dont certaines sont rattachées par des réseaux de longs cordons de ceintures traînant nonchalamment au sol. Ces marionnettes sont aussi utilisées pour faire des performances, Morelli touchant parfois à l’art action.

Ces figures cocasses et troublantes sont aussi les sujets de l’ensemble de dessins et d’encres sur papier, où l’on retrouve également différentes variations sur le motif de la ceinture. Les dessins, qui ressemblent d’abord à des abstractions faites d’ensembles de lignes spontanées, se révéleront, au détail, des ceintures finement dessinées. Autant les sculptures de cuir sont chargées de sens et connotées, autant les dessins ont un caractère plus détaché. Tout cela se présente dans une réjouissante gaieté de matériaux et de couleurs.

On pourrait penser qu’il s’agit là du travail d’un jeune artiste, avec beaucoup d’expérience. François Morelli expose et enseigne pourtant depuis le début des années 80. Et il a une grande capacité à renouveler son œuvre, comme en témoigne cette production récente. On a vu son travail à quelques reprises à Québec, notamment à la première édition de la Manif d’art. Ses œuvres font partie des collections des musées; il a fait l’objet d’expositions au Musée de Joliette et au Musée régional de Rimouski. Morelli participera à la prochaine édition de la Biennale du Havre aux côtés de Michael Snow. Voilà une des plus belles occasions qui nous aient été données d’entrer dans l’univers de François Morelli.

Jusqu’au 20 novembre
Chez Esthésio
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BLOC-NOTES

RENCONTRE AVEC LAURÉAT MAROIS

Inauguration de l’exposition Séquences de Lauréat Marois à la Galerie des arts visuels le jeudi 10 novembre. Il faut voir les œuvres que l’artiste a réalisées depuis 1998; des séquences de gouaches, de dessins au crayon, des acryliques ainsi que des impressions à jet d’encre. Lauréat Marois expose rarement et cette exposition est attendue. La rencontre avec l’artiste a lieu à partir de 15 h 30 et est suivie du vernissage. L’exposition se poursuit jusqu’au 20 novembre.

UN CONCERT À NE PAS MANQUER

Il faudra être à la Chambre blanche le vendredi 11 novembre à 20 h pour entendre le Quatuor Bozzini et le Quatuor Cartier, qui interpréteront les partitions bien particulières de l’artiste hollandais William Engelen, actuellement en résidence au centre d’artistes de la rue Christophe-Colomb. Depuis son arrivée le 11 octobre, William Engelen tient un journal de bord, notant toutes ses activités, les repas, les heures de travail, de loisir et de sommeil: autant de données dont l’intensité, la qualité et la durée forment les structures d’une musique basée sur un système d’équivalences et de codes (il n’y a pas de notes), mais heureusement fort compréhensible pour les musiciens. Lors du concert, on pourra également entendre les partitions réalisées à partir du journal de bord des musiciennes du Quatuor Cartier.

William Engelen vit à Rotterdam et à Berlin et se produit surtout dans les villes européennes. Il s’agit vraisemblablement de son premier passage en Amérique du Nord. Cette proposition interroge les sources "d’inspiration" de la création. Il est aussi question de l’utilisation du temps; de celui de l’artiste, comme du nôtre. Aux murs, on peut voir – et cela jusqu’au 20 novembre – les partitions du quotidien que l’artiste a réalisées ainsi qu’une partition plus ancienne élaborée à partir des résultats d’un examen de la vue: une œuvre pour trombone… Voilà la manifestation d’un art multidisciplinaire, repoussant les limites des formes connues en arts visuels, une proposition comme seule la Chambre blanche sait nous en offrir! Puisque chaque heure d’une journée correspond à quatre secondes de musique, le concert durera 51 minutes et 20 secondes. Entrée libre.