Jacques Perrault : Des irisées
Arts visuels

Jacques Perrault : Des irisées

Jacques Perrault, après avoir tâté le pouls de la métropole, revient chez lui avec des projets plein la tête. Il nous présente sa nouvelle exposition, Abus de carton, de retour dans ma cour.

Jacques Perrault

, artiste de la région, revient d’un exil de 10 ans dans la métropole. Il s’est inspiré du rythme effréné qui y règne et s’est approvisionné à même les excès de la grande ville pour produire les œuvres qu’il nous présentera pendant son vernissage, ce soir, à l’Espace culturel Triptik. Il redonne une vie nouvelle aux vieilles encyclopédies obsolètes en les sculptant littéralement, attribue une poésie aux romans Harlequin – quelle imagination! – et, surtout, structure du carton, son matériau de prédilection. "La plupart des grandes œuvres de l’histoire ont été faites avec des matériaux nobles: du bois, du bronze, etc. Pour moi, c’est une question de cycle." Il cherche à redonner de la noblesse à des matériaux qui ont perdu leur valeur.

Son concept est simple: "On fait du papier et du carton à partir du bois. Moi, c’est comme si je refaisais le bois avec du carton. Les gens se trompent, parfois…" Perrault structure toutes ses œuvres avec du carton recyclé, leur donnant des architectures diverses. Certaines rappellent vaguement des niches de statues, d’autres donnent plutôt l’impression d’être des mandalas occidentaux. À l’intérieur de ces cadres, une véritable œuvre de patience: des collages irisés d’images extraites de vieilles revues du National Geographic. Il explique: "Les couleurs sont intéressantes dans cette revue-là. Ils utilisent des filtres, ça donne des couleurs très pures."

Un coup d’œil à ses œuvres lui donne raison. Des couleurs éclatantes agencées avec grand soin. Les images ne sont pas prises pour elles-mêmes, elles perdent leur propriété de représenter pour plutôt contribuer à la formation d’une image abstraite, envoûtante, hypnotique. Puis, le spectateur est curieux, s’approche, et découvre. C’est alors que les histoires naissent, à mesure que sont redécouvertes les différentes découpures qui s’étaient perdues dans le jeu de la perception, et chaque œuvre devient un roman à la trame narrative surprenante.

Photo: Jacques Perrault

Plusieurs mois de travail sont souvent nécessaires à la création d’une seule œuvre. Et il en a une collection impressionnante. Certaines sont interactives, on peut y modifier l’emplacement de certaines pièces, comme un casse-tête qui n’aurait pas de véritable solution, mais les plus impressionnantes sont probablement celles auxquelles il a intégré un jeu de lumière. "J’ai commencé par faire des lampes, révèle-t-il amusé. Ça a donné ça." L’effet est fascinant: alors qu’en plein jour le collage prend toute la place, exerçant une force attractive puissante sur notre regard, il disparaît complètement et permet au fond de surgir dans la pénombre, donnant une autre vie à l’œuvre.

L’artiste a encore des projets plein la tête. Il cherche à repousser les limites du matériau recyclé qu’il utilise. Son plus grand malheur est que les gens de la région semblent moins enclins au gaspillage, alors ses provisions diminuent peu à peu. Il pense bientôt concevoir des meubles en carton qui seraient de véritables œuvres d’art. Il a d’ailleurs déjà revampé une table, ainsi qu’un réfrigérateur, qu’il a pris quatre ans à couvrir…