Lauréat Marois : L’arbre, l’artiste et l’infini
Lauréat Marois, avec Séquences, regroupe trois séries de dessins et un duo d’impressions numériques. Intense, comme toujours.
"Pour passer dans le domaine de l’art, il faut être dépouillé. Il n’y a pas d’autre façon de toucher les êtres." Cette réflexion de Lauréat Marois témoigne parfaitement de la démarche qui soutient le travail de cet artiste. La production de Lauréat Marois est connue depuis la fin des années 60. Il a travaillé l’estampe pendant des décennies avec le même engagement qu’il l’aurait fait pour la peinture; il pratique le dessin avec autant d’intégrité. Tout ce qu’il fait est le résultat d’heures incalculables. Chaque dessin résulte de mille traits de crayons, chaque acrylique sur papier procède de la superposition de multiples couches de couleurs; ses sérigraphies résultent de dizaines de passages. Déjà à la fin des années 70, l’œuvre de Lauréat Marois était tournée vers le paysage. Un de ses plus marquants, Froid bleu, une sérigraphie de 1977 où Lauréat Marois intègre des pylônes de lignes électriques pour leurs formes géométriques notamment, contribuant ainsi à renouveler la représentation du paysage québécois. Quand sa production est plus abstraite, il y aura la plupart du temps des considérations pour les motifs végétaux.
À la Galerie des arts visuels, on peut voir actuellement Les Carrés noirs (1998-2001), des œuvres sur papiers carbone. Des papiers gorgés de vestiges de dessins antérieurs. Des dessins cosmiques! Ce sont des cartes du ciel, des géographies du quotidien: "Ce sont des œuvres que l’on voit de l’intérieur: des carnets de voyage, des récits", explique-t-il. Il y a un temps fou inscrit à même chaque papier. Des dessins au caractère pourtant classique, mais à qui les "réseautages" de lignes donnent toute leur actualité. La série Dermographies (2004) demeure la plus bouleversante de l’ensemble. Ayant survécu à une maladie de peau rare, Lauréat Marois a depuis réalisé cette série comme autant d’autoportraits où il rend un hommage à la médecine qui l’a sauvé. Peinture, couleurs, dessins, poils et minuscules morceaux de peau se laissent voir sous les dizaines de fines couches superposées. Est-ce utile de le préciser? Cela est fait sans sensationnalisme ni provocation: Lauréat Marois loge dans les registres de la subtilité et de la délicatesse. Sur papier, les fragments de sa peau deviennent des éléments d’un paysage et ressemblent encore à une carte du ciel. Topographie du corps ou inventaire de galaxies? Nous sommes confondus. "Il y a une partie de vrai et une partie de jeu", précise-t-il encore. D’ailleurs, et ainsi que le soulignait fort à propos Robert Bernier dans le livre Un siècle de peinture au Québec, l’œuvre de Marois "repose sur la dualité entre le réel et l’imaginaire".
Trille blanc (2003-2005) est la troisième série de cette exposition. Un ensemble réalisé autour du motif floral. Si, comme moi, vous vous demandez ce que propose de nouveau Lauréat Marois, sachez qu’outre les superbes séries de dessins, en guise de point d’orgue, l’artiste présente deux impressions numériques de grand format. L’image source est une photographie prise en forêt, image d’après laquelle Lauréat Marois a fait un dessin, qu’il a ensuite numérisé puis transformé à la suite de superpositions et d’inversions: "Tout le jeu de la création, quoi!" tel qu’il l’explique encore pertinemment. Des œuvres remarquables, réalisées pendant l’été 2005 au Centre national de recherche et diffusion en arts contemporains numériques d’Alma. Lauréat Marois voulait faire de l’image numérique quelque chose de chaud et d’humain. Et cela donne deux œuvres exemplaires dans un contexte où il y a peu de modèles. Voilà un ensemble d’œuvres picturales remarquables, des œuvres au contact desquelles on ressort enrichi.
Jusqu’au 4 décembre
À la Galerie des arts visuels
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BLOC-NOTES
Vernissages
À la Galerie Le 36
En duo, Slobodan Radosavljevic et Marcel Jean exposent respectivement des photographies et des sculptures. Le vernissage a lieu le vendredi 18 novembre à 19 h. Jusqu’au 11 décembre.
À l’OEil de poisson
Pierre Sasseville et Jean-François Cook présentent leur dernier cru: Le Plus Beau Jour de ma vie. Vernissage le18 novembre à 20 h.
À surveiller
Dans la rue, les photographies d’Alfonso Arzápalo en résidence à la Chambre blanche. L’artiste mexicain a installé des photographies dans la ville. Aux angles des boulevards Charest et Langelier, à l’Îlot Fleurie, à la place D’Youville, aux angles de la Grande Allée et de la rue de l’Amérique-Française. Une rencontre avec l’artiste aura lieu le 25 novembre à 20 h à la Chambre blanche.