Edmond-Joseph Massicotte, illustrateur : La fête en temps et lieux
Edmond-Joseph Massicotte, illustrateur rassemble des dessins de cet artiste fasciné par la tradition et avide de modernité. Quand même.
"Quand même", c’était la devise de Sarah Bernhardt, fameuse tragédienne française de la fin du XIXe siècle. Cette devise rend bien l’esprit de l’époque. Elle "balaie toute possibilité d’échec", tel qu’on le lit sous la plume de David Karel, chercheur et historien de l’art à l’Université Laval, qui a préparé cette exposition de l’illustrateur Massicotte (1875-1929). L’artiste n’a pas été insensible à l’effervescence de la Belle Époque, ces années de frivolité circonscrites entre 1880 et la Première Guerre mondiale. En témoignent certaines des illustrations de Massicotte bravant le puritanisme victorien et celles où l’on perçoit clairement les influences de l’Art nouveau. Il a réalisé des images inspirées du célèbre illustrateur et affichiste thèque Mucha. Comme l’écrit le commissaire: "Il a proposé une vision progressiste, presque futuriste, du XXe siècle naissant, comme si les formes sensuelles et galbées du modernisme étranger avaient eu à ses yeux le pouvoir d’arracher le Québec pudibond à son isolement postcolonial."
Ainsi, en parcourant les 200 dessins puisés à même la collection du Musée national des beaux-arts du Québec – qui n’en compte pas moins de 1683 -, on apprend que Massicotte n’aura pas été qu’un chantre du folklore et des traditions, bien qu’il s’agisse là de la plus grande partie de son œuvre, que l’on apprécie, au demeurant, avec beaucoup de plaisir. En fait, après une incursion dans l’exploration de formes modernes, Massicotte poursuivra un travail plus traditionnel, mais ô combien fascinant. Il illustrera les Récits laurentiens du frère Marie-Victorin. Ses illustrations paraîtront dans différents journaux; des éditions de ses photogravures seront abondamment diffusées. Il deviendra en 1911 le successeur d’Henri Julien. Tous ses dessins, parfois drôles et toujours tendres, étaient destinés au grand public, celui des journaux et des magazines, et dans ce sens, ils sont riches de mille renseignements, comme ils témoignent, il va s’en dire, d’un talent de dessinateur exceptionnel.
Massicotte a représenté le canal Lachine dans un Montréal en plein essor industriel et mille choses encore qui témoignent, comme les meilleurs récits historiques, à la fois des modes de vie et des mœurs du passé. Le début du XXe siècle ou le "bon vieux temps", il immortalise tout à merveille dans des scènes rendues sans jugement. Ce sont des représentations fines et sensibles, qu’il soit question des modes de vie des "Canadiens d’autrefois" ou de la nouvelle vie de ses contemporains. Enfin, ce panorama des illustrations de Massicotte nous fait apprécier les audaces modernistes du dessinateur et – difficile d’y être insensible – ce "bon vieux temps" sujet de plusieurs superbes illustrations, comme La Bénédiction du jour de l’An ou, encore, Le Réveillon de Noël. Autant de dessins qui ne sont pas seulement des documents ethnographiques, mais qui nous font aussi renouer avec une culture ancestrale qui, finalement, n’est peut-être pas si loin que ça dans notre imaginaire.
Jusqu’au 30 avril 2006
Au Musée national des beaux-arts du Québec
Voir calendrier Arts visuels
ooo
BLOC-NOTES
PALMARÈS DE L’EXPERTISE AU LIEU
C’est le plus imprévisible de tous les anti-partys de bureau. L’annuel événement du Lieu est toujours une fête mémorable. Surprises, déguisements, immersions sonore et participative, l’organisation aura recours à des stimulants et à "divers procédés et expédients", qui restent encore dans le plus grand secret et dont nous ne pouvons livrer ici plus de détails. Sachez cependant que la fête débutera à 20 h et sera précédée du lancement du dernier numéro de la revue d’art actuel Inter. Rendez-vous pour la plus improbable des réceptions autour du maître de cérémonie, artiste et animateur Jean-Yves Fréchette. Cette 11e édition se déroulera le vendredi 16 décembre au chic local du Lieu, sur la rue Dupont. On y entendra un groupe musical surprise et la musique du DJ Gengis Dhan.
LUDMILA ARMATA CHEZ ENGRAMME
Letters from the Centre of the Earth, c’est l’exposition qui termine la saison chez Engramme. On peut y voir des estampes remarquables de Ludmila Armata. Ancrées dans la plus pure tradition, ce sont des impressions noires sur papier, faites toutefois avec une certaine désinvolture, une gestuelle et un traitement qui leur donnent toute leur actualité. L’artiste originaire de Pologne poursuit au Québec une carrière plusieurs fois couronnée. Elle a remporté des prix aux biennales d’estampes de Trois-Rivières et d’Alma et remportait, en 2002, le Prix de la Fondation Monique et Léon Parizeau du Musée national des beaux-arts du Québec. Jusqu’au 23 décembre.