Armes de diffusion massive : Les couleurs de la propagande
Avec son exposition Armes de diffusion massive, le Musée canadien de la guerre offre une rare occasion de découvrir le visage humain de la propagande au moyen d’affiches conçues par de nombreux artistes en temps de guerre.
Visiter l’exposition Armes de diffusion massive – La propagande de guerre, c’est découvrir la puissance de l’image et des mots, le visage humain des hostilités et les idéaux qui infiltraient le quotidien jusque dans les cuisines! Augmentée par un contenu canadien tiré de la collection permanente du Musée, la présentation est produite par la Wolfsonian-Florida International University.
Il est fréquent d’associer le mot "propagande" au concept de lavage de cerveau tel que les États le pratiquent lors de conflits armés. L’exposition démystifie cette impression en abordant différents thèmes tels que l’information pure et simple, la sécurité, les conséquences des affrontements et les thèmes plus courants de l’endoctrinement de la jeunesse, de l’appel à se joindre aux efforts de guerre et, bien sûr, de la déshumanisation de l’ennemi. Il est fort intéressant de relever les arguments empruntés par les belligérants afin de soutenir leurs initiatives.
Au XXe siècle, les artistes et concepteurs ont développé un style distinctif fortement influencé par les expérimentations de l’avant-garde. Utilisant des moyens techniques parfois très innovateurs, tels que le photomontage, les affiches tapissaient le paysage visuel et permettaient la propagation rapide d’informations importantes.
La plupart des affiches traitent de sujets militaires usuels, tels que le port du masque à gaz ou les avancées militaires, et incorporent des personnages typiques, tels que l’Oncle Sam ou le soldat idéalisé. D’autres affiches ont une visée sociale et humanitaire incitant, par exemple, à la récupération ou à la frugalité. Une émouvante affiche de la Grande-Bretagne montre deux enfants assis et apeurés. Le titre "Mothers, let them go!" exhorte les mères à laisser partir leurs enfants pour des contrées plus sécuritaires, notamment en campagne.
Abattez-le par votre travail, 1941-1942. Canada, Seconde Guerre mondiale. |
Les outils de communication ne se limitent pas aux seules affiches. En effet, de nombreux articles créés spécifiquement pour des clientèles cibles peuvent être examinés, dont de délicates tasses et assiettes arborant des symboles militaires. Un touchant abécédaire intitulé Alphabet de la Grande Guerre 1914-1918 d’André Hellé explique la guerre aux enfants tout en faisant appel à leur patriotisme. Des pages telles que "N pour N’oublie pas ton glorieux passé" ou "O pour Obéir, aimer et servir", montrant un enfant simulant un combat devant une fenêtre enveloppée du drapeau français, tentent de mettre un baume sur la tristesse des enfants dont les parents devaient s’absenter pour servir leur pays.
Le Canada n’est pas en reste et de nombreux artistes canadiens ont contribué à la diffusion d’information militaire. Jane Marsh Beveridge a produit un film relatant le rôle non traditionnel des femmes lors de la Seconde Guerre mondiale. Née à Ottawa en 1915, elle est la seule femme réalisant et produisant des films de guerre. Le texte original du film Women are Warriors fut censuré car jugé trop féministe. Hubert Rogers, de l’Île-du-Prince-Édouard, avait reçu le mandat de représenter des scènes significatives pour la Galerie nationale du Canada (aujourd’hui le Musée des Beaux-arts du Canada). JEH MacDonald, membre du Groupe des Sept, est également présent avec l’affiche Kulture VS Humanity dépeignant la dérive d’un monde en guerre.
Armes de diffusion massive est une rétrospective étonnante, haute en couleur, richement documentée et (malheureusement) très pertinente à notre époque toujours troublée par de nombreux conflits.
Jusqu’au 30 avril 2006
Au Musée canadien de la guerre
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