Dave Ross : L’homme qui faisait des arbres
Avec le projet Autoportrait de l’artiste en nature morte, la salle d’exposition de Langage Plus devient un sentier dans une futaie colorée construite de toutes pièces par l’artiste Dave Ross. Originaire du Québec, il a aujourd’hui fait ses racines à Kelowna, en Colombie-Britannique et, depuis, il a fait pousser ses arbres à Québec, Montréal, Toronto, Chicago et même au Texas. Des arbres sans racines dont le bruissement du feuillage étrange, figé, mais qu’on devine secoué par le vent de la mémoire, est l’écho d’émotions passées qui laissent leur impression bigarrée au fond de l’œil.
Il n’y a pas si longtemps, la courtepointe servait à garder la trace de l’historique des familles, chaque carré étant une racine plongée dans la mémoire familiale, préservant un souvenir en s’abreuvant dans le terreau fertile des anecdotes ancestrales. Si elle conserve son rôle de mémoire, la courtepointe de Ross s’attache plutôt aux branches qu’aux racines, comme si le devenir avait plus d’importance que la provenance, le fruit plus de valeur que la prise dans le sol.
C’est une réflexion bien de son époque que nous présente Ross, véritable travail de reconstruction de l’identité. Plutôt que de poser les individus comme un tout cohésif comprimé dans un fût et partageant des racines diverses, chacun demeure lié au tronc, même en prenant un chemin qui lui est propre dans sa plongée vers le ciel.
L’artiste se présente donc, puisqu’il s’agit d’un autoportrait, comme la mémoire de ses expériences et de ses rencontres. Comme un nœud dans la matière ligneuse où convergent toutes les lignes du bois. La courtepointe qui couvre les branches, conçue à partir de pièces de vêtements offerts par ses amis et connaissances, témoins textiles de leurs expériences les plus marquantes, en est l’image la plus révélatrice. Aussi, quantité d’objets, de prime abord banals, que l’on devine chargés d’une valeur émotive pour l’artiste: les blocs de construction de l’enfance, des chandelles d’anniversaire, des cartes postales… Le quotidien est alors métamorphosé comme s’il avait crû. Le visiteur pourra tenter d’imaginer le vécu de l’artiste à mesure qu’il découvrira ce que cache le creux des branches, ou encore se laisser surprendre par ses propres souvenirs devenus discrets avec le temps…
Jusqu’au 25 décembre
Du 3 au 16 janvier
À Langage Plus
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