Inuit: Quand la parole prend forme : Du spirituel dans l’art
Inuit: Quand la parole prend forme réunit 400 sculptures plus émouvantes les unes que les autres. Au Musée national des beaux-arts du Québec.
Des chamans, un chasseur de baleines, une femme et son enfant: de la vie quotidienne aux récits mythologiques, ce sont les rapports fondamentaux entre l’animal et l’humain, entre l’esprit et le corps qui sont en jeu dans l’art inuit. Des aspects essentiels de la vie que notre société a occultés. Les 400 sculptures exposées au Musée sont pour la plupart assez récentes, réalisées pendant les dernières décennies; d’autres remontent aux années 60. Ce sont les œuvres des grands artistes connus de la sculpture inuit. On apprend leurs noms: Manasie Akpaliapik, Barnabus Arnasungaaq, Mattiusi Iyaituk… S’il est question de la vie traditionnelle, certains sculpteurs traitent aussi de problèmes actuels graves; leur travail, de taille directe surtout, est ponctué de collages et d’assemblages. Cette collection, au caractère unique et puissant, c’est celle de Raymond Brousseau, un collectionneur d’art chevronné. L’exposition rend compte des audaces et de la sensibilité du collectionneur, qui cédait récemment une part sa collection au MNBAQ, l’institution en ayant acquis l’autre partie avec l’aide financière d’Hydro-Québec.
La pratique traditionnelle des communautés inuits nomades était surtout constituée de miniatures plus facilement transportables. C’est seulement depuis les années 1950 et la sédentarisation des communautés qu’un marché international de l’art inuit s’est développé. Un important marché. Pour répondre à la demande des Blancs, les artistes inuits ont développé cet art unique qui a permis – et permet encore – à plusieurs communautés, familles ou villages, de vivre de l’art. En fréquentant ces sculptures, les dizaines de miniatures comme un bel ensemble d’œuvres plus imposantes, on comprend pourquoi cet art fascine autant les collectionneurs. Présentée d’abord à Lyon, Paris et Toulouse, l’exposition a remporté un succès qui ne fait aucun doute. Des quelques milliers de pièces de cette nouvelle collection du MNBAQ, ce sont les plus spectaculaires qu’on peut voir jusqu’en avril, avant que soit créée la salle permanente consacrée à l’art inuit.
Des os de baleine sculptés, des bois de caribou gravés, des rêves taillés dans la pierre: on constate, sous le charme, combien les sculptures inuits nous parlent aujourd’hui, et cela à plusieurs égards. Pour Line Ouellet, directrice des collections et de l’éducation au Musée, le mode de vie inuit se reflète dans cet art: "Cette idée de tout prendre et de lui donner un sens, les artistes inuits l’appliquent à la création." Alors qu’aujourd’hui, beaucoup d’artistes du sud commentent la société de consommation en utilisant des matériaux récupérés, la réutilisation, chez les artistes du Grand Nord, va de soi depuis longtemps. Cette pratique exemplaire de la récupération traite au surplus des grands sujets de l’existence humaine; de la vie et de la mort. Comme le soulève encore Line Ouellet, nous pouvons penser qu’à notre époque, où la société de consommation, déconfessionnalisée, a atteint ses sommets, "ces peuples nous parlent à un moment où l’on a la capacité de les entendre".
Jusqu’au 7 mai 2006
Au Musée national des beaux-arts du Québec
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BLOC-NOTES
SPLENDEURS ET ANOMALIES
Le Mois Multi bat son plein. Pendant les prochains jours se dérouleront plusieurs événements importants. D’abord, l’inauguration, le jeudi 16 février dès 17 h, de trois installations qui seront sur place jusqu’à la fin du mois: le G-Player4 de l’Allemand Jens Brand, l’installation attendue de l’Américain Gregory Barsamian ainsi que l’installation réalisée en duo par Émile Morin et Jocelyn Robert. À voir également pendant les prochains jours, le spectacle intimiste L’Espace des autres de Line Nault et l’œuvre "audio-vidéo live" du groupe belge mxHz. Trouvez le programme au Complexe Méduse.
CHEZ ROUJE
Il faut voir les tableaux exposés actuellement chez Rouje. Benoît Blondeau présente un ensemble de peintures qui portent toutes sa signature, sans se répéter, offrant au regard une production généreuse et parfaitement hétéroclite. C’est une des belles expositions à l’affiche en ce moment. Jusqu’au 26 février.
ERRATUM
La rencontre avec l’artiste brésilien Frederico Câmara, à la Chambre blanche, est à mettre à votre agenda non pas jeudi, mais bien vendredi, le 17 février, à 20 h. L’installation vidéo sera encore sur place jusqu’au 26 février.