Sunil Gupta : L’intuition de Sunil Gupta
L’exposition de Sunil Gupta, présentement à l’affiche du Musée canadien de la photographie contemporaine, propose deux séries photographiques qui traitent, surtout, de questions singulières.
Comme beaucoup d’artistes actuels le font aussi, il n’est pas surprenant que Sunil Gupta puise ses sujets au sein des événements qui ont marqué sa propre vie. Ce qui peut détonner dans cette démarche, c’est que Gupta ne s’adonne point à une interprétation commune à la suite de son introspection.
Dans la première série, il s’inspire de l’histoire de sa famille, et dans la deuxième, il associe des images qui se rapportent intimement à sa séropositivité. Ces séries, Sécurité sociale et Terres d’affinités, proposent des trajets imprégnés du passage de l’artiste sans, toutefois, le sédentariser dans les oeuvres. Nous pouvons facilement dépister une certaine récurrence des thèmes de migration, de voyage et de lieux transitoires.
Sécurité sociale constitue une série d’images dont le contenu visuel vient du véritable fond photographique de la famille immédiate de Gupta. Ce dernier y impose sa perception des faits relatifs à l’évolution de ce noyau familial depuis son immigration au Canada. Aussi, sous les images, Gupta s’approprie des conversations et de certains passages mordants trouvés dans des lettres que sa mère lui a destinées. Cette disposition des éléments fait penser à un photo-roman ou à un storyboard; pourtant, les éléments visuels et narratifs qui composent cette série semblent sans équivoque, mais nous hésitons, avec raison, à n’y voir qu’une simple relation narrative entre les images.
Queens, New York /Lambeth, Londres. De la série Terres d’affinités, 2001-2003. Épreuve à jet d’encre, 76,2 x 149,9 cm. Photo: Sunil Gupta |
La série Terres d’affinités doit être perçue en tant que tentative d’explorer le thème du VIH. Parallèlement à des lieux choisis dans son histoire, l’artiste expose également des images porteuses d’une histoire liée au sida. De grands diptyques nous montrent les Indes de son enfance en apposition aux autres escales qui ont marqué sa vie; on comprend qu’il s’agit également du trajet de la maladie.
Il est intéressant de noter que ces deux séries retracent chacune des itinéraires inexprimables si l’on convient qu’ils appartiennent à l’expression formelle de l’intuition qu’a l’artiste au regard de son vécu.
Malgré des sujets aussi humanitaires qu’individuels, tels que l’immigration et la prolifération du VIH, les oeuvres de Sunil Gupta ne font pas de surplace, et tombent encore moins dans la production de figures rhétoriques, de grandes théories à propos des sujets abordés. Les oeuvres de Gupta nous amènent à battre en retrait et nous renvoient leurs questionnements pour que nous prenions nous-mêmes position. Ainsi, on peut parler de singularité, car les oeuvres viennent imposer la présence de la raison, sans toutefois livrer un sens rationnel définitif. Tout comme Gupta, nous devons avoir recours à nos connaissances intuitives.
Jusqu’au 23 avril 2006
Au Musée canadien de la photographie contemporaine
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