Miki Gingras et Patrick Dionne : Voie de développement
Miki Gingras et Patrick Dionne apprennent à des enfants défavorisés à faire de la photographie. L’art en contact avec le réel.
L’art devrait servir à apprendre à vivre. J’aime que la création soit une nécessité et non pas un mode de vie branché. J’aime l’art qui n’est pas décoratif, mais qui est le signe d’une prise de position esthétique et intellectuelle.
Voilà pourquoi le travail du collectif Diasol a de quoi me réjouir. Fondé en 2002 et formé de Miki Gingras et Patrick Dionne, cet organisme fait un travail remarquable en intervenant auprès d’enfants défavorisés, à Montréal (par exemple, dans une école du Centre-Sud), mais aussi à l’étranger (dans des zones urbaines du Mexique). Cette fois, les deux artistes sont allés au Nicaragua. Là-bas aussi, ils ont enseigné à des jeunes (plus de 200) à faire de la photo en se fabriquant des appareils de fortune. Il s’agit de cameras obscuras constituées de boîtes de conserve adaptées, fermées avec un couvercle opaque et percées d’un petit trou. Cela permet à ces enfants de s’amuser, d’avoir un regard sur leur propre milieu, mais aussi d’apprendre les bases d’un métier.
Certains me trouveront plein de bonnes intentions (ce qui n’est pas un défaut) en célébrant ce projet, mais ce qu’il y a de fascinant dans cette aventure, c’est que les photos produites ainsi sont de grande qualité. En voyant cette exposition intitulée Humanidad, les enfants travailleurs du Nicaragua, devant ses tirages ayant un style certain, bien des artistes actuels m’ont semblé ennuyeux et conventionnels. Ces photos sont parfois floues, à d’autres moments trop obscures, elles sont déformées par la courbure de la boîte de conserve, mais elles ont une présence indéniable. À une époque où l’image photo est totalement standardisée, ces clichés ont une originalité qui souligne tout le potentiel du médium photographique.
J’ai un seul reproche à faire à cette expo: malgré une liste des participants accrochée à la fin du parcours, aucune oeuvre n’est identifiée du nom de son jeune créateur. Je comprends que le projet est collectif, que le dispositif produit déjà un peu le style de ces photos, mais je ne vois pas pourquoi un photographe, aussi jeune soit-il, n’aurait pas le droit de signer sa création. www.ecomusee.qc.ca
Jusqu’au 14 mai
À l’Écomusée du fier monde
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